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Happy birthday Charlot
Célébration du centenaire de Charlot alias Chaplin
Publié dans Le Midi Libre le 20 - 02 - 2014

Charlot, le vagabond attendrissant imaginé par Chaplin en février 1914, fête ses 100 ans. Retour sur un personnage universel qui continue d'incarner nos illusions et nos faiblesses.
Charlot, le vagabond attendrissant imaginé par Chaplin en février 1914, fête ses 100 ans. Retour sur un personnage universel qui continue d'incarner nos illusions et nos faiblesses.
Tout est dans le melon. Charlot, sans celui-ci, se réduit à une moustache et une canne, ce qui n'est déjà pas mal, mais sans melon, je vous le demande, qui est-il ? Voilà donc cent ans que le petit vagabond, le Tramp, amuse les enfants, émeut les parents, émerveille les cinéphiles, et s'enfuit sans payer l'addition. Il est rusé, drôle, souple, vif, et distribue les coups de pied au cul comme personne - sans perdre son melon.
Il n'y a qu'en France qu'il se nomme Charlot - partout ailleurs, c'est "Charlie" et qu'on le confond avec son créateur, Charles Spencer Chaplin. De bonne grâce, Chaplin s'est laissé envahir par ce personnage remuant, se collant un timbre-poste sous le nez lors d'une réception chez le maharadjah de Karthala, et faisant le Charlot avec un lys en guise de canne. Une autre fois, dans un dîner avec Winston Churchill, il échangea son couvre-chef avec celui du Premier ministre du Royaume-Uni, et applaudit à la démarche saccadée de l'illustre diplomate, qui imitait son invité...
Charlot est né le 7 février 1914
Ce jour-là, le président Poincaré faisait l'éloge de l'aviation militaire, "l'Epatant" publiait "les nouvelles aventures des Pieds nickelés", un député proposait de remplacer les pigeons voyageurs par des corbeaux pèlerins, le chérif Abdallah s'abouchait avec lord Kitchener, et Maurice Chevalier jouait dans "le Royaume nain de Lilliput contre Gigas le long, prince des géants", film Pathé réalisé "avec la plus nombreuse troupe de nains du monde".
Le monde était en paix (pour peu de temps), et, sur les écrans, un vagabond sur une piste de course tentait de s'interposer entre la caméra et les pilotes de voitures : c'était "Charlot est content de lui", suivi quelques jours plus tard par "l'Etrange Aventure de Mabel". Dans le premier film, Charlot recevait bourrades et coups de poing, semait la zizanie dans la course, agitait sa badine et agaçait tout le monde. Dans le second, bourré comme un œuf, il poursuivait une jeune femme jusqu'à ce que celle-ci se cache sous le lit d'un homme qui...
Charlot est apparu ainsi, avec une redingote usée, un gilet de maître d'hôtel, des croquenots de géant et des manières d'aristocrate de la dèche. Il eut un succès immédiat. On l'adopta. a Madrid, Saint-Etienne, Moscou ou Berlin, partout où il y avait des appareils de projection cinématographique, on l'adora. On l'imita, aussi : il y eut une invasion de faux Charlot, hommes et femmes :
André Séchan, Florence Turner, Bobby Dunn, Ernst Bosser... Certains poussèrent même la supercherie jusqu'à se nommer Charlie Kaplin (en Allemagne) ou Charlie Aplain (en France). Charlot enthousiasma tout le monde. Paul Morand le compara à "une lame dans son fourreau", Cocteau le loua, voyant "le Guignol moderne", Elie Faure estima qu'il était "le seul poète de ce temps", Apollinaire entraîna son ami Fernand Léger en disant :
"Il a quelque chose. Viens voir", et puis Maïakovski, Eluard, García Lorca, Albert Cohen, Henri Michaux, Robert Desnos, Hannah Arendt, Max Jacob, Eisenstein, tous mirent chapeau bas. Sartre le sacra "Roi du cinéma" dans "les Temps modernes", et Kafka confia qu'il voyait dans les yeux de Charlot "la flamme du désespoir". André Salmon, malgré ses préjugés, trouva sympathique "le petit youpin frisé"...
La plus belle histoire
C'est celle de Blaise Cendrars, qui la raconte dans le journal "Chroniques du jour". En 1915, le bidasse Frédéric Sauser, qui vient de choisir son pseudo de Cendrars pour "la Prose du Transsibérien", est couché dans un entonnoir de mine, au bois de la Vache, en Picardie, avec ses camarades du 1er régiment étranger. Noyé dans la boue, frissonnant dans le froid, il voit son camarade Garnier dit Chaude-Pisse qui revient de permission, saoul comme un Polonais en bordée.
"Il radinait tout droit de Paris. Toute la nuit, il nous parla de Charlot. Qui ça, Charlot ? Une espèce de frangin à lui..." Quinze jours plus tard, Cendrars se rend à la gare du Nord. Il salue la tour Eifel et se précipite dans un petit ciné de la place Pigalle : "Je vis Charlot. C'était LUI." Il est ébahi par le génie du bonhomme. Il en rira encore quarante ans plus tard. Le vagabond est apparu à Chaplin dans un éclair, comme le génie des "Mille et Une Nuits" : "Je n'avais aucune idée de ce que je devais choisir."
Souvenir de Charlot pour toujours
En allant me costumer, je me suis dit que je devrais mettre des pantalons trop larges, des grandes chaussures, une canne et un melon. Je voulais que tout soit contradictoire : le pantalon tombant, la redingote serrée, le chapeau trop petit, les chaussures démesurées. A la seconde où je fus habillé, le costume et le maquillage me firent sentir qui j'étais instantanément. Quand j'entrai sur le plateau, le personnage était entièrement là.
"Depuis ce 7 février, Charlot ne nous a plus quittés. Il se promène dans nos rêves, sur une route poussiéreuse, il hausse les épaules devant le maître d'hôtel inquisiteur, il passe entre les jambes des policiers penauds, il regarde, avec d'autres immigrants, la statue de la Liberté, il court derrière le camion qui emporte le Kid, il mange des savates dans une cabane d'Alaska, et surtout, surtout !,
il fait danser les petits pains comme un magicien de la dèche, un chaman de la poisse noire. Charlot fait rire et pleurer en même temps. Jamais les larmes n'ont eu meilleur goût. En 1975, Charles Spencer Chaplin, invité à Paris, vint faire un dernier tour de piste. Il avait 86 ans, et parlait lentement.
Il était invité partout, à l'Hôtel de Ville, à l'Opéra, au drugstore Saint-Germain, à la Cinémathèque. Fatigué, il répondait de bonne grâce aux questions que je lui posais, ému par les petites fleurs qu'un ami avait rapportées de Londres pour moi, fleurs cueillies entre les pavés de Kennington, non loin du centre de Londres. C'est là qu'il avait connu la misère, enfant, avec sa mère folle.
Juste avant de le quitter, je lui demandai s'il était toujours le petit vagabond, au fond de lui-même. Il se leva, mit le doigt sous le nez en guise de moustache, et fit quelques pas, de sa démarche chaloupée et moqueuse. Puis il se rassit. Je suis parti avec le souvenir de Charlot au cœur, pour toujours."
Tout est dans le melon. Charlot, sans celui-ci, se réduit à une moustache et une canne, ce qui n'est déjà pas mal, mais sans melon, je vous le demande, qui est-il ? Voilà donc cent ans que le petit vagabond, le Tramp, amuse les enfants, émeut les parents, émerveille les cinéphiles, et s'enfuit sans payer l'addition. Il est rusé, drôle, souple, vif, et distribue les coups de pied au cul comme personne - sans perdre son melon.
Il n'y a qu'en France qu'il se nomme Charlot - partout ailleurs, c'est "Charlie" et qu'on le confond avec son créateur, Charles Spencer Chaplin. De bonne grâce, Chaplin s'est laissé envahir par ce personnage remuant, se collant un timbre-poste sous le nez lors d'une réception chez le maharadjah de Karthala, et faisant le Charlot avec un lys en guise de canne. Une autre fois, dans un dîner avec Winston Churchill, il échangea son couvre-chef avec celui du Premier ministre du Royaume-Uni, et applaudit à la démarche saccadée de l'illustre diplomate, qui imitait son invité...
Charlot est né le 7 février 1914
Ce jour-là, le président Poincaré faisait l'éloge de l'aviation militaire, "l'Epatant" publiait "les nouvelles aventures des Pieds nickelés", un député proposait de remplacer les pigeons voyageurs par des corbeaux pèlerins, le chérif Abdallah s'abouchait avec lord Kitchener, et Maurice Chevalier jouait dans "le Royaume nain de Lilliput contre Gigas le long, prince des géants", film Pathé réalisé "avec la plus nombreuse troupe de nains du monde".
Le monde était en paix (pour peu de temps), et, sur les écrans, un vagabond sur une piste de course tentait de s'interposer entre la caméra et les pilotes de voitures : c'était "Charlot est content de lui", suivi quelques jours plus tard par "l'Etrange Aventure de Mabel". Dans le premier film, Charlot recevait bourrades et coups de poing, semait la zizanie dans la course, agitait sa badine et agaçait tout le monde. Dans le second, bourré comme un œuf, il poursuivait une jeune femme jusqu'à ce que celle-ci se cache sous le lit d'un homme qui...
Charlot est apparu ainsi, avec une redingote usée, un gilet de maître d'hôtel, des croquenots de géant et des manières d'aristocrate de la dèche. Il eut un succès immédiat. On l'adopta. a Madrid, Saint-Etienne, Moscou ou Berlin, partout où il y avait des appareils de projection cinématographique, on l'adora. On l'imita, aussi : il y eut une invasion de faux Charlot, hommes et femmes :
André Séchan, Florence Turner, Bobby Dunn, Ernst Bosser... Certains poussèrent même la supercherie jusqu'à se nommer Charlie Kaplin (en Allemagne) ou Charlie Aplain (en France). Charlot enthousiasma tout le monde. Paul Morand le compara à "une lame dans son fourreau", Cocteau le loua, voyant "le Guignol moderne", Elie Faure estima qu'il était "le seul poète de ce temps", Apollinaire entraîna son ami Fernand Léger en disant :
"Il a quelque chose. Viens voir", et puis Maïakovski, Eluard, García Lorca, Albert Cohen, Henri Michaux, Robert Desnos, Hannah Arendt, Max Jacob, Eisenstein, tous mirent chapeau bas. Sartre le sacra "Roi du cinéma" dans "les Temps modernes", et Kafka confia qu'il voyait dans les yeux de Charlot "la flamme du désespoir". André Salmon, malgré ses préjugés, trouva sympathique "le petit youpin frisé"...
La plus belle histoire
C'est celle de Blaise Cendrars, qui la raconte dans le journal "Chroniques du jour". En 1915, le bidasse Frédéric Sauser, qui vient de choisir son pseudo de Cendrars pour "la Prose du Transsibérien", est couché dans un entonnoir de mine, au bois de la Vache, en Picardie, avec ses camarades du 1er régiment étranger. Noyé dans la boue, frissonnant dans le froid, il voit son camarade Garnier dit Chaude-Pisse qui revient de permission, saoul comme un Polonais en bordée.
"Il radinait tout droit de Paris. Toute la nuit, il nous parla de Charlot. Qui ça, Charlot ? Une espèce de frangin à lui..." Quinze jours plus tard, Cendrars se rend à la gare du Nord. Il salue la tour Eifel et se précipite dans un petit ciné de la place Pigalle : "Je vis Charlot. C'était LUI." Il est ébahi par le génie du bonhomme. Il en rira encore quarante ans plus tard. Le vagabond est apparu à Chaplin dans un éclair, comme le génie des "Mille et Une Nuits" : "Je n'avais aucune idée de ce que je devais choisir."
Souvenir de Charlot pour toujours
En allant me costumer, je me suis dit que je devrais mettre des pantalons trop larges, des grandes chaussures, une canne et un melon. Je voulais que tout soit contradictoire : le pantalon tombant, la redingote serrée, le chapeau trop petit, les chaussures démesurées. A la seconde où je fus habillé, le costume et le maquillage me firent sentir qui j'étais instantanément. Quand j'entrai sur le plateau, le personnage était entièrement là.
"Depuis ce 7 février, Charlot ne nous a plus quittés. Il se promène dans nos rêves, sur une route poussiéreuse, il hausse les épaules devant le maître d'hôtel inquisiteur, il passe entre les jambes des policiers penauds, il regarde, avec d'autres immigrants, la statue de la Liberté, il court derrière le camion qui emporte le Kid, il mange des savates dans une cabane d'Alaska, et surtout, surtout !,
il fait danser les petits pains comme un magicien de la dèche, un chaman de la poisse noire. Charlot fait rire et pleurer en même temps. Jamais les larmes n'ont eu meilleur goût. En 1975, Charles Spencer Chaplin, invité à Paris, vint faire un dernier tour de piste. Il avait 86 ans, et parlait lentement.
Il était invité partout, à l'Hôtel de Ville, à l'Opéra, au drugstore Saint-Germain, à la Cinémathèque. Fatigué, il répondait de bonne grâce aux questions que je lui posais, ému par les petites fleurs qu'un ami avait rapportées de Londres pour moi, fleurs cueillies entre les pavés de Kennington, non loin du centre de Londres. C'est là qu'il avait connu la misère, enfant, avec sa mère folle.
Juste avant de le quitter, je lui demandai s'il était toujours le petit vagabond, au fond de lui-même. Il se leva, mit le doigt sous le nez en guise de moustache, et fit quelques pas, de sa démarche chaloupée et moqueuse. Puis il se rassit. Je suis parti avec le souvenir de Charlot au cœur, pour toujours."


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