Le musicien algérien Mohamed Iguerbouchène (1907/1966) est «le premier compositeur de musique de films au Maghreb et au Moyen-Orient», a indiqué, lundi à Tizi-Ouzou, le musicologue Mouloud Ounoughène. Ce spécialiste, qui a animé une conférence intitulée «Mohamed Iguerbouchène : un compositeur algérien de musique de films de renommée mondiale», a rappelé, dans le cadre des activités de la 16e édition du Festival du film amazigh (24-28 février dernier), que la carrière d'Iguerbouchène dans la musique de films a débuté dans les années 1930 avec quelques documentaires dont Aziza et un court métrage, Dzaïr. «Par la suite, le réalisateur français Julien Duvivier lui proposa de collaborer à la bande son de Pépé le Moko, un film dont le rôle principal est campé par Jean Gabin. Il cosigna avec Vincent Scotto la bande son de ce film, qui a lancé la carrière d'Iguerbouchène en tant que compositeur pour le cinéma», a souligné M. Ounoughène. Ce compositeur exceptionnel a gravé sa partition dans les studios américains de la Walter Ranger/United Artists pour le compte du film Algiers, réalisé par Jean Cromwell. Il a aussi illustré musicalement Bim, le petit âne dont le commentaire est écrit et narré par Jacques Prévert, comme il a collaboré avec Tahar Hennache dans le film documentaire Ghatassine Essahra, a-t-il rappelé. Mohamed Iguerbouchène a, en outre, travaillé avec Georgette le Tourneur de Marçay dans Vision saharienne et signé la musique du film Minaret dans le soleil, qui s'articule autour de la ville de Tlemcen. Un film primé au Festival de Venise de 1949, a ajouté le conférencier. Sur un autre volet, M. Ounoughène a fait observer que Iguerbouchène a aidé de nombreux chanteurs algériens en collaborant avec, entre autres, Cheikh Nourreddine, Farid Ali et Ahcène Mezani. Il a composé, par ailleurs, une cinquantaine de musiques pour Salim Hellali sans que l'opinion publique sache qu'il est l'auteur de ces mélodies, a déploré le conférencier. «De la riche carrière musicale d'Iguerbouchène, ce sont ses compositions de musiques de films qui l'ont révélé au monde occidental, car il a le don de capter l'architecture d'un film et d'en faire rapidement une musique. Ce grand compositeur de musiques de films et de concerto était très en avance sur son temps en s'intéressant à un genre musical (rapsodies, quatuors et symphonies) qu'il n'était pas évident de comprendre dans les années 1940.» «Aujourd'hui, il faut absolument réhabiliter ce monument de la musique, par des colloques sur son œuvre et en l'intégrant dans l'enseignement musical au sein des établissements scolaires, car son catalogue éclectique est un cas unique d'école», a insisté Mouloud Ounoughène, qui a ajouté qu'Iguerbouchène doit retrouver sa place dans le paysage artistique algérien.