Les Ethiopiens sont appelés lundi aux urnes pour des élections législatives et régionales jugées cruciales pour l'avenir du pays, secoué par les violences, notamment dans la région du Tigré. Prévues initialement en août 2020, ces élections ont été reportées à deux reprises, en raison de la pandémie de coronavirus puis de difficultés logistiques. Elles se tiendront finalement lundi. Trois ans après avoir été nommé à son poste, le Premier ministre Abiy Ahmed a exhorté les 37 millions d'électeurs à participer à cette «journée historique», tout en s'engageant à organiser les élections les plus démocratiques que l'Ethiopie ait jamais connues. La semaine passée, le Premier ministre avait appelé à «l'apaisement». «Nous sommes face à une élection qui va développer ou détruire notre pays, le construire ou le démolir. Nous, Ethiopiens, savons fermement que la division née du conflit n'est pas une meilleure option. Je souhaite lancer un nouvel appel à un accord et à la protection et à la prospérité de notre pays», avait-il déclaré. Toutefois, les électeurs ne voteront pas dans près d'un cinquième des 547 circonscriptions du pays. Dans 64 d'entre elles, le vote a été reporté au 6 septembre. Dans certaines pour des questions sécuritaires, en raison d'insurrections armées et de violences intercommunautaires. Dans d'autres en raison de difficultés logistiques (impression et distribution de bulletins, manque de formation du personnel électoral...). Quant aux 38 circonscriptions du Tigré, où la guerre fait rage depuis plus de sept mois, aucune date de scrutin n'y a été fixée. Dans cette région septentrionale, la rapide opération de «maintien de l'ordre» lancée par Abiy en novembre contre les autorités régionales dissidentes s'est transformée en un conflit dévastateur : des combats persistent, et selon l'ONU, au moins 350.000 personnes y sont désormais en situation de famine. A la veille de ce scrutin, la commission électorale éthiopienne a dit espérer que les élections législatives et régionales seraient «meilleures, participatives et crédibles». Cependant, de nombreuses circonscriptions n'afficheront pas de candidature de l'opposition, qui boycotte par endroits le vote de lundi. Ainsi en région Oromia, la plus peuplée du pays et d'où M. Abiy est originaire, la majorité des sièges à pourvoir ne sont brigués que par un candidat du parti au pouvoir, selon les données officielles. Selon la porte-parole de la Commission, Mme Shimeles Solyana, seuls 3 des 49 partis enregistrés ne participent pas au scrutin, et plus de 9 500 candidats concourent pour les deux scrutins - un record absolu dans l'histoire de l'Ethiopie. Face au défi d'organiser un vote inclusif et crédible - reporté de près d'un an à cause du coronavirus, la commission électorale a manqué de ressources. Faute de pouvoir recruter et former les dizaines de milliers d'assesseurs nécessaires, elle a été contrainte de repousser de nouveau les élections, initialement prévues le 5 juin. Vendredi, la chef de la commission électorale, Birtukan Mideska a réclamé dans une lettre au Premier ministre l'aide urgente du gouvernement, affirmant avoir besoin d'avions et de camions pour livrer le matériel à temps. «Nous travaillons 24 heures sur 24, à plein régime», a-t-elle écrit. Le vote de lundi sera suivi par cinq missions d'observation et par des milliers de membres de la société civile. En raison de désaccords avec le gouvernement, l'Union européenne (UE) a décidé de ne pas envoyer d'observateurs.