Des analystes de l'Etat français ont corroboré pour la première fois, de manière indépendante, les récentes révélations liées à l'affaire du logiciel espion Pegasus dans laquelle est impliqué le Maroc, mettant à nu notamment «la faiblesse de la riposte européenne» à ces dérives, selon le journal français Le Monde. Dans un dossier consacré à cette affaire, le journal français a rapporté, samedi dernier, que les premiers éléments issus des analyses techniques conduites ces derniers jours dans le cadre de l'enquête judiciaire confortent les informations avancées par le consortium de 17 médias, dont Le Monde, ayant mené l'enquête et par les constatations techniques d'Amnesty International. Selon les informations publiées par Le Monde, un journaliste de la chaîne France 24 a soumis lundi 26 juillet son téléphone à une analyse intégrale dans les locaux de l'Agence nationale de sécurité des systèmes d'information (Anssi), autorité chargée de la cybersécurité de l'Etat (français). Le numéro de téléphone de ce journaliste figure sur la liste des numéros sélectionnés par le client marocain de Pegasus pour une éventuelle mise sous surveillance. Les résultats de l'analyse sont formels : des traces de passage du logiciel Pegasus y ont été retrouvées. C'est la première fois, selon le média, que des autorités officielles viennent confirmer de manière indépendante les preuves techniques avancées par Amnesty International dans le cadre du «Projet Pegasus», au même titre que les informations du consortium de journalistes. Analyses poussées Les téléphones d'Edwy Plenel, fondateur de Mediapart, et de Lenaïg Bredoux, l'une des journalistes du site d'information, à leur tour ont été soumis à une analyse poussée par les services de l'Etat, dans le cadre de l'enquête judiciaire ouverte à la suite de la plainte qu'ils ont déposée. Les analystes de l'Etat ont corroboré les constatations réalisées précédemment par le Security Lab d'Amnesty International. Les téléphones des deux journalistes ont bien été compromis par le logiciel espion. Par ailleurs, sont actuellement examinés par les services de l'Etat (français) les téléphones appartenant aux 15 ministres sélectionnés comme cibles potentielles par le client marocain de Pegasus, selon le journal qui s'est étalé également sur Abdellatif Hammouchi, le chef des services de renseignement du royaume. «L'impunité dont bénéficient les tortionnaires du Maroc et leurs services de sécurité est un classique. Mais le plus regrettable, c'est la bienveillance et le zèle mis en œuvre par Paris (...)», dénonce la juriste Hélène Legeay, dont le numéro de téléphone a également été sélectionné. Consultante en droits de l'Homme, elle fut chargée du programme Maghreb à Action des chrétiens pour l'abolition de la torture (ACAT), l'ONG qui soutenait les plaignants. D'après la juriste, le Maroc dépense des millions pour se présenter sur la scène internationale comme soi-disant «un parangon des droits de l'Homme» et «il pratique un entrisme dans les instances internationales, alors que, dit-elle, l'on sait que non seulement le Maroc torture mais, qu'en plus, il poursuit ses victimes et les espionne». R. I./APS