Qui du corrupteur ou du corrompu est le plus à blâmer ? Cela ne souffre d'aucun débat, le bras de la justice, comme attendu, frappe lourdement les «indélicats». Nul besoin d'aller chercher trop loin les exemples de cette nature. Il se trouve que l'ère post- Bouteflika regorge d'affaires toutes aussi indécentes les unes que les autres. À se demander de quelle pâte sont faits ces géniaux voleurs. Quelle que soit la sentence qu'encourent ces délinquants au col blanc, il n'est pas dans les capacités du simple travailleur journalier ou même un activiste-hirakiste, imbu d'idéal de justice, de cerner la profondeur et l'étendue du fléau de la corruption, tentaculaire, voire transnationale. Ne soyons pas dupes, dans chaque pays existe un personnel disposé à jouer le jeu tout obnubilé par la masse d'argent susceptible de gonfler ses avoirs bancaires. Si ce phénomène existe tout aussi bien dans les démocraties occidentales, c'est sans commune mesure avec les aberrations auxquelles se laissent aller les pays autoritaires qui plus sont à fragile économie. J'ai eu vent d'un éclat de voix, en plein Conseil des ministres, chez nous, le chef de l'Etat reprochant vertement à l'un de ses ministres qui négociait des contrats de centaines de millions de dollars à raison d'une «tchipa» à 30%. Même les habitués aux dessous de table semblaient choqués. En Afrique et ailleurs, de juteux marchés suscitent les convoitises notamment des multinationales qui font du bakchich, un atout irrésistible pour soudoyer les hauts cadres sensibles aux plaisirs du confort matériel. À un certain seuil, la corruption bloque toute la machine économique. En effet, combien de projets d'utilité publique sont à l'arrêt faute de financement, l'argent ayant été tout bonnement détourné. L'absence de l'Etat de droit aggrave l'impunité. Vu les conséquences induites, l'alerte est donnée au plan international. L'on se méfie quant à la finalité de l'aide au développement nécessaire pour des populations vivant dans la misère absolue. À ce propos, l'explosion du phénomène des migrations transnationales en est la parfaite illustration. Des institutions relevant des Nations-Unies sont mobilisées pour suivre les cas de corruptions avérées. Des chefs d'Etat ou de gouvernement d'Europe ne tarissent pas de discours anticorruption et pointent le doigt sur des fonctionnaires véreux d'Afrique. Rares sont les procès retentissants sur ces affaires, qui finissent par être étouffées. L'un des mots d'ordre récurrents dans les manifestations de rue en Algérie, en Tunisie est la chasse aux fonctionnaires corrompus. Mais le mal a pris déjà racine, seul un séisme politique pourrait inverser la tendance. S'attaquer aux corrompus, c'est courir le risque de se mettre sur le dos tous les aparatchiks d'un système. Dans nombre de pays d'Europe, aux Etat-Unis, au Japon, en Asie du sud-est, des balises pour se prémunir des dangers de ce fléau sont mises en place grâce à la transparence dans la gestion des biens publics. Des têtes couronnées tombent pour avoir failli. Il en est ainsi de la Présidente des Philippines, du président du directoire du groupe Wolksvagen dans le dieselgate, l'héritier et patron de la marque mondiale Samsung mis en prison pour plus de deux ans. C'est encore pire lorsqu'il y a collusion politique et argent. Rappelons-nous l'Irangate. En Algérie, tous les ministres de l'ancien régime et leurs démarcheurs auront tout le temps de réfléchir au mal qu'ils ont fait au pays. L'opération de «ratissage» de cette mauvaise graine, est toujours en cours. Il reste à extirper les racines de ce fléau ancré dans les mentalités. À quelque niveau que ce soit. Plutôt que des milliards volés, comptez les moutons avant de dormir. Brahim Taouchichet