Par Abdelmadjid Bouzidi [email protected] Le ministre de l�Industrie alg�rien a r�cemment relanc� l�id�e de mettre en place des zones franches sur le site Alg�rie. C�est l� une bonne nouvelle pour tous ceux qui attendent du �neuf� pour redynamiser notre �conomie et la sortir de son ronronnement actuel. Il faut rappeler que notre pays a d�j� travaill� sur la question au d�but des ann�es 2000, une loi a m�me �t� d�battue au sein de l�APN mais a, par la suite, �t� abandonn�e, les tenants de l��tatisme �conomique forcen� se refusant de prendre acte, une fois pour toutes, de l�implacable processus de mondialisation de l��conomie et de l�imp�ratif vital pour nous de s�y inscrire positivement, de l�int�grer par le haut et de quitter les berges du soporifique �tout-p�trole�. Qu�est-ce qu�une zone franche ? L��conomiste g�ographe Fran�ois Bost dans une excellente contribution parue dans les �annales de g�ographie� sous l�intitul� �Les zones franches, interfaces de la mondialisation�, propose une d�finition claire de ce qu�est une zone franche. C�est �un p�rim�tre g�ographique dans lequel l�entreprise implant�e b�n�ficie d�avantages douaniers et fiscaux et se soustrait l�galement au r�gime en vigueur dans le pays�. Entre 1980 et 2000, les zones franches se sont consid�rablement multipli�es de par le monde. Les pays du Sud en ont fait un v�ritable outil de promotion de leurs �conomies et de leur d�veloppement. Ils y ont trouv� d�innombrables avantages : cr�ation d�emplois, formation de la main-d��uvre locale, diversification de l��conomie, d�veloppement des exportations, transfert de technologie et de savoir-faire. Fran�ois Bost reprend de mani�re tr�s claire les caract�ristiques des diff�rentes cat�gories de zones franches existant dans le monde : les zones franches commerciales (ZFC) ; les zones franches d�exportation (ZFE) ; les zones �conomiques sp�ciales (ZES). 1) - Les ZF commerciales (Free Trade zones) Elles sont localis�es dans les p�rim�tres portuaires et a�roportuaires ou le long des grands axes maritimes, routiers et ferroviaires. Elles sont dot�es d�infrastructures de transbordements et de stockage tr�s modernes. Les soci�t�s d�importexport peuvent y d�charger librement, sans droits de douane ni taxes, et avec des formalit�s r�duites, toutes sortes de marchandises import�es dans l�attente de leur r�exportation ou de leur vente sur le march� national. Dans ce deuxi�me cas, les marchandises paient les droits de douane et taxes pr�vus sit�t l�enceinte franchie. Il est interdit d�avoir sur les ZFC des activit�s de fabrication. Les seules activit�s permises sont le stockage, l�emballage, l'empaquetage, l�assemblage simple, la mise sur palette� 2/- Les �zones franches industrielles et de services� ou �zones franches d�exportation�. Elles sont d�di�es � la production manufacturi�re et de plus en plus � la fourniture de services. Les entreprises agr��es en zones franches d�exportation peuvent importer en franchise de droits de douane des mati�res premi�res, des �quipements et autres intrants n�cessaires � la production des biens qu�elles fabriquent. Elles peuvent �galement exporter leurs productions sans payer de droits de douane � la sortie. Ces entreprises b�n�ficient aussi d�une fiscalit� r�duite, voire nulle durant un temps fix� par la loi (3, 5, 10, 15, 20 ann�es) en contrepartie, les entreprises agr��es en zones franches d�exportation doivent exporter un pourcentage �lev� de leurs productions, entre 80 et 100%. Elles doivent �galement travailler dans des secteurs d�activit� destin�s � diversifier la structure �conomique du pays r�cipiendaire. Elles peuvent vendre sur le march� local une partie de leur production d�finie par la loi, mais cette part est assujettie au paiement des droits de douane et des taxes locales. Les autres avantages dont b�n�ficient les entreprises agr��es en ZFE concernent la simplification des proc�dures administratives (guichet unique), b�timents standardis�s et modulables offerts � la location afin d�acc�l�rer la proc�dure d�installation, tarifs pr�f�rentiels pour l�eau, l��lectricit�, les t�l�coms, libre rapatriement des b�n�fices en devises. Certains Etats ont pr�f�r� d�velopper des �points francs�. Il s�agit d�un statut juridique attribu� � des entreprises exportatrices qui b�n�ficient des m�mes avantages fiscaux et douaniers. Ici, les entreprises agr��es peuvent s�installer l� o� elles le d�sirent partout dans le pays d�accueil, g�n�ralement � proximit� de certaines mati�res premi�res, sur les bassins de main-d��uvre, � proximit� d�infrastructures particuli�res ou encore dans les r�gions transfrontali�res. C�est le Mexique qui le premier a inaugur� cette formule en 1965 : les maquiladoras (2 820 unit�s en 2006). 3/ Le troisi�me type de zones franches est celui des �zones �conomiques sp�ciales� (ZES) Elles sont apparues en Chine en 1978. Ce sont de tr�s vastes territoires pouvant atteindre plusieurs centaines de kilom�tres carr�s. Elles regroupent des zones franches, des points francs. Les zones franches par les chiffres : L�Atlas mondial des zones franches d�nombre 1 257 zones franches de par le monde � la mi-2007 (Z.F.C., ZFE, ZES). Il y en avait 850 au milieu des ann�es 90. A la mi-2007, 123 pays sur 192 avaient une l�gislation sur les zones franches. M�me la Cor�e du Nord et Cuba ont des zones franches (et pas l�Alg�rie !!) En Asie, 28% du total des Z. F. dans le monde, le tableau des Z. F. est le suivant : Mais en Asie les entreprises locales agr��es en Z. F. sont plus nombreuses que les entreprises �trang�res, gr�ce � leur capacit� � capter les activit�s externalis�es dans le cadre de la sous-traitance internationale (outsourcing). * La p�ninsule arabique et le golfe Persique totalisent 46 Z. F. r�parties dans six pays dont * Les pays m�diterran�ens (Sud et Est) comptent 71 Z. F. r�parties dans 11 pays dont la Turquie, la Tunisie, la Jordanie. * L�Am�rique latine compte 203 Z. F. en 2007 et l�Europe orientale, 89 Z. F. dans quinze pays (Pologne : 14, Bulgarie : 6 ; Roumanie : 6 ; Tch�quie : 9 ; Pays de l�ex-Yougoslavie : 44. Les zones franches : des enclaves Dans les ann�es 90, les zones franches faisaient l�objet de fortes critiques de la part de nombreux �conomistes du d�veloppement : les zones franches fonctionneraient le dos tourn� au reste du territoire national : soustraites au r�gime commun, travaillant pour les exportations, recevant surtout des entreprises �trang�res. Les Z. F. sont �plaqu�es � sur les �conomies d�accueil, tr�s d�pendantes de l�ext�rieur pour leurs approvisionnements, leurs capitaux, leurs technologies, leurs d�bouch�s. Aujourd�hui, l�analyse a �volu�. Les entreprises agr��es en zones franches ont su tisser des liens avec leurs milieux d�accueil : leurs approvisionnements en intrants se font aupr�s des fournisseurs locaux ; elles g�n�rent de la sous-traitance locale ; des entreprises locales s�y installent et cr�ent des joints-ventures avec les entreprises �trang�res. Elles cr�ent une �atmosph�re� industrielle dans le pays. Les zones franches cr�ent donc des effets d�entra�nement b�n�fiques au pays d�accueil. Les processus de d�localisations des firmes internationales ont permis l�implantation de filiales de firmes internationales importantes ainsi que de PME/PMI innovantes, implantation favoris�e par l�existence de zones franches : l��conomie d�accueil s�en trouve dynamis�e. Enfin, dans le domaine de l�emploi, les zones franches ont permis la cr�ation de milliers d�emplois. 1,1 million d�emplois au Mexique, 904 000 aux Philippines, 267 000 en Tunisie, 80 000 en Egypte, 40 000 en Turquie, 18 000 au Maroc. Sur le plan entr�e de devises, entre 1/3 et 2/3 des entr�es en devises de plusieurs pays (Mexique, Malaisie, Chine�), sont dues aux zones franches. Les zones franches apparaissent au vu de leurs bilans comme de v�ritables diffuseurs de la mondialisation de l��conomie. Elles aident incontestablement les pays du Sud � int�grer le processus mondial d��changes �conomiques. Elles permettent aussi, lorsqu�elles sont bien con�ues, bien g�r�es, et reli�es au contexte �conomique national, de dynamiser l��conomie d�accueil et d�y am�liorer l�esprit et la culture d�entreprise. Alors, pourquoi notre pays est ici aussi absent. Est-ce une incompr�hension du ph�nom�ne, une mauvaise lecture du bilan des Z. F. ou tout simplement encore ici, l�effet pervers du voile p�trolier ?