Djamila Moula a vécu tous les combats de Lounès. En 1988, lorsqu'il a été mitraillé par la gendarmerie algérienne et qu'il s'est retrouvé affalé sur un lit à la clinique des Orangers sur les hauteurs d'Alger, Djamila gardait la porte et sélectionnait les visiteurs. Elle en avait le droit. Elle avait raison. N'importe qui aurait pu rentrer dans cette chambre et l'achever. Matoub, en ce temps-là, était fier de Djamila. Elle était belle. Très, trop belle. Matoub, le troubadour, a fini par s'en séparer. Un divorce à l'amiable, un divorce tragique tout de même. Djamila fait une rencontre nouvelle, s'exile au Canada, fait trois enfants et finalement revient en France. Elle s'installe à Marseille. Dans une cité du nord. Elle galère pour élever ses enfants, elle ne se revendique jamais de Matoub. Elle se fait discrète. Elle n'a pas oublié Lounès. Lounès ne l'a jamais oubliée. Il l'a même chantée. Djamila vient de mourir ce dimanche 8 février à cinq heures du matin chez elle, toute seule, à côté de ses enfants, après une rechute due à un cancer. Matoub Lounès est un héros. Djamila, sa première femme, le serait-elle moins ? Adieu Djamila, nous t'aimons autant que nous avons aimé Lounès et nous nous souviendrons toujours de cette pudeur qui t'a caractérisée, de ce chemin que tu as suivi seule, sans jamais dire que tu étais la femme d'un monstre que tout un peuple aime et aimera toujours.