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CARNET DE VOYAGE D'AREZKI METREF
SI TU VAS À SAN FRANCISCO... 7/ Quelques heures dans la Ruée vers l'or
Publié dans Le Soir d'Algérie le 19 - 03 - 2016

Allez, go ! Vaille que vaille, nous poursuivons notre road trip. Façon très individuelle de se faire son cinéma ! Nous voilà désormais réglés à l'heure américaine. Enfin, pour ce qui est du mouvement... Vraiment ? La bagnole, le lacet de bitume qui se perd dans l'horizon plat, la caravane, la mobilité, tout cela fait partie du mode de vie des Américains. S'il y a une chose qui ne fait pas peur aux habitants de ce pays continent, c'est bien la distance. Marcher, rouler, se déplacer à n'importe quelle heure, de jour comme de nuit, est comme inscrit dans l'ADN. Ils commencent une vie dans un Etat puis, du jour au lendemain, plaquent tout, et vont s'installer ailleurs, à des milliers de kilomètres de là. Bien entendu, cette transhumance n'est pas toujours la concrétisation d'un désir de partance ou de la démangeaison du vagabondage, comme chez Kerouac et ses copains, et ses émules.
Elle est souvent dictée par la coercition économique. Deux phases majeures de cette poursuite de la migration primale sont incarnées par la ruée vers l'or de 1849 et par la grande dépression de 1929 qui, l'une et l'autre, ont jeté des millions de personnes sur les routes, la première fois attirées par le mirage de l'enrichissement rapide, et la seconde chassées par le chômage massif. Cette culture du voyage en voiture est incarnée d'ailleurs par la légendaire route 66 qui relie les rives du lac Michigan à Chicago (Illinois), au rivage du Pacifique à Santa Monica (Californie).
Surnoms : The Mother Road, la route mère, ou la Main Street of America, la rue principale de l'Amérique. Elle traverse huit Etats et trois fuseaux horaires, parcourant 3 670 km. Elle est la scène de l'exode des ouvriers dans le roman de Steinbeck, Les raisins de la colère, et, en partie, celle du film Easy Reader. C'est de tout cela que nous discutons avec Dahmane et Krimo qui, eux, non plus, n'ont pas peur de la distance. Dahmane à lui tout seul résume la bougeotte américaine. Il commence son parcours à San Francisco en 1975. Puis le voilà à Seattle, dans l'Etat de Washington, en 1977. En 1981, il est à Portland, Oregon. Retour en Californie en 1988... Tandis que les paysages et la parole défilent, nous nous rendons à peine compte de la nécessité d'une autre halte. Ce sera Folsom, dans la banlieue de Sacramento, la capitale de l'Etat de Californie qui eut comme gouverneurs deux acteurs, Ronald Reagan (1967-1975) et Arnold Schwarzenegger (2003-2011).
Pour avoir été cadre supérieur (directeur de conceptions des microprocesseurs) pendant 25 années chez Intel, le géant informatique américain, roi de la puce, qui y élut domicile, Dahmane connaît bien cette ville. Nous stationnons dans sa partie ancienne qui date du temps de la ruée vers l'or, du côté de l'ancienne gare. Ce quartier de la ville est aussi un authentique morceau de western. A sa naissance, Folsom était habitée par les chercheurs d'or de la Sierra Nevada.
La rue principale qui porte le nom de Sutter semble tout droit sortie du western réalisé par Clint Eastwood, Pale Rider, le cavalier solitaire. Mais c'est surtout la gare, avec son wagon témoin de la Southern Pacific, qui figure bien le mythe de la ruée vers l'or avec sa grandeur et ses vicissitudes. L'ancienne Granite City ne doit pas sa prospérité aux chercheurs d'or mais au lobbying de l'un de ses habitants, Joseph Folsom, qui fit construire la voie ferrée Folsom-Sacramento. A son décès en 1855, une année après la fin officielle de la ruée vers l'or, la ville prit son nom actuel.
Je quitte la gare et j'emboîte le pas à Dahmane et Krimo qui s'engouffrent dans l'antre d'un brocanteur. En captant quelques mots de français dans nos échanges, la vendeuse nous confie qu'elle venait de séjourner en France pour ses études. Nous chinons dans les rayonnages ployant sous le poids d'objets hétéroclites. Et je songe aux Mythologies de Roland Barthes qui arrachent du sens aux objets du quotidien. A travers eux, on peut suivre toutes les étapes de l'histoire des Etats-Unis.
Le regard de Dahmane accroche un vieux moulin à café en bois qui lui rappelle celui de nos mères. Inventaire partiel de cette brocante : rocking chair style Petite maison dans la prairie, stetsons et sombreros usagés, gourdes, selles, caméras, banjos, etc. Une photo ancienne de Sutter Street en noir et blanc et de grand format m'interpelle. Tout a changé aujourd'hui, et pourtant à y voir de près rien n'a vraiment changé.
Dahmane me rappelle l'autre notoriété de Folsom. Il s'agit de sa prison. Construite en 1880, elle était connue pour sa rigueur. Mais ce qui la rendit vraiment célèbre, ce fut Folsom Blues, cette chanson de Johnny Cash, l'un des pères du rock and roll, qu'il enregistra en live au début des années 1950, dans l'enceinte carcérale.
Retour vers la voiture en passant par la rue principale. Partout je remarque les barres d'attache qui servaient à arrimer les chevaux. Me trouver dans cette petite ville de la Ruée vers l'or, autrefois minière, me fait penser à John Auguste Sutter dont la rue principale, comme nous l'avons vu, porte le nom. Aventurier suisse, il fut contre son gré dans l'œil du cyclone. En vérité, ce personnage est intéressant à plus d'un titre. En lui-même d'abord car, ancien apprenti devenu un temps l'homme le plus riche de la planète, il symbolisa la volonté de créer un monde nouveau. Mais intéressant aussi en tant que héros de l'un des romans d'un auteur voyageur qui m'inspire énormément, Blaise Cendrars, et que John Passos surnommait l'Homère du Transsibérien. Dans L'or, sous-titré La merveilleuse histoire du général Johann August Suter, son roman paru chez Grasset à Paris, en 1925, et dont la légende fait le livre de chevet de Joseph Staline, il raconte le départ de cet aventurier, en 1834, de Bâle pour New York puis pour la Californie, pays alors quasiment désert.
Le 1er juillet 1838, il arrive dans le village de Yerba Buena, futur San Francisco, où il obtient une concession de 20 000 hectares. En 1848, il possédait un empire foncier auquel il donna le nom de New Helvetia. Il fit construire une scierie à Coloma, à l'est de Sacramento. Le 24 janvier 1848, James W. Marshall, un charpentier employé de Sutter, donna un coup de pioche dans le bief du bord de l'American River, mettant à jour des morceaux de métal brillant. Son patron les fit expertiser. C'était bien de l'or. Il tint secrète la découverte de crainte de compromettre son projet agricole. Mais le secret fut bientôt éventé et la fièvre de l'or se propagea.
Cet épisode qui enfanta de la Californie et même des Etats-Unis modernes dura de 1848 à 1856. La fièvre de l'or attira plus de 300 000 aventuriers venus de tous les pays du monde. En 2 ans la population de San Francisco passa de 1 000 à 25 000.
Bientôt ressurgit cette blague récurrente entre Dahmane et moi consistant à s'interroger sur l'éventualité d'une rencontre avec le fameux et inévitable Algérien. Du coup, je me demande si parmi les 2 000 Africains victimes de la Ruée vers l'or ne se trouvait pas quelque Algérien. Plus tard, cette question fera l'objet d'une petite recherche de ma part. Et je ne trouverai pas de réponse. En revanche je ferai la découverte suivante : au milieu du XIXe siècle, lors de la conquête de l'Algérie, nombreuses étaient les références à la conquête de l'Ouest : refoulement des indigènes, colonisation agraire, mythologie pionnière. Ces trois piliers sur lesquels se fonde l'épopée coloniale ont été consolidés par Lyautey lors de la conquête du Maroc qualifié de Californie française, dans le but à la fois d'évoquer le rêve américain mais aussi de concrétiser cette fascination ancrée dans l'inconscient européen pour les richesses en déshérence de l'Orient.
Donc, nulle réponse à ma question ; par contre, j'apprends en lisant un livre qui apparemment n'a rien à voir avec le sujet, Nuages sur la Révolution, Abane Ramdane au cœur de la tempête de Belaïd Abane, que M'hand et Rabah Abane, le père et l'oncle du fameux dirigeant du FLN, colporteurs d'objets artisanaux orientaux de leur état, débarquèrent vers 1909 à San Francisco où ils séjournèrent. Mais dans l'instant présent, pas de rencontre inopinée avec un Algérien. Nous quittons Folsom en milieu d'après-midi. Nous décidons de visiter le vieux Sacramento et de dîner dans un restaurant marocain avant de rentrer pour la nuit à Napa, chez Krimo. Sacramento, la capitale de la Californie, a été fondée en 1848 par John Sutter fils sur les terres de fort Sutter, le quartier général de son père, qui reste à ce jour l'une des attractions touristiques du lieu. Dahmane qui connaît très bien la ville nous mène directement au vieux Sacramento, microscopique vieille ville bâtie sur les berges de la rivière Sacramento par laquelle arrivèrent les premiers colons.
La gare en bois a conservé ses trains à vapeur. Sur la rivière, on voit encore les steamers, bateaux à roues à aube de la Steam Navigation Company.
Dans la vieille ville, les bâtiments sont en bois et brique, et les devantures des magasins ont gardé le style western. Nous poussons la porte battante du River City Saloon. Hangar obscur où s'activent aux tables de billard des consommateurs.
On s'interpelle avec cet accent guttural des Yankees tout en sifflant Bourbons et whisky. Qui plus est nous voici, sans le savoir, en plein dans le Gold Rush Day, la journée commémorative de la Ruée vers l'or. On ne pouvait mieux tomber. La plupart des visiteurs portent en cette occasion des tenues de l'époque. On reconstitue des duels, des cavalcades, des poursuites à cheval. En la circonstance, la vieille ville est interdite à la circulation.
Sur les berges de la rivière, on a même fait venir une troupe de comédiens qui jouent à s'y croire aux soldats nordistes bivouaquant après une bataille. Un gamin demande à l'un des soldats d'opérette une précision sur un épisode de la guerre de Sécession. Et voilà le comédien parti dans un vrai cours vivant. Un régal ! Les chevaux hennissent devant une botte de foin, un harmonica diffuse dans la nuit des notes nostalgiques de folk. Nous récupérons la voiture dans un parking souterrain à l'orée de la vieille ville. Dîner dans un restaurant marocain de Sacramento. Poufs, meïdas et danse du ventre qui scotche les rares clients américains du soir...
A. M.
Demain 8/ Avec les Algériens de la Silicon Valley.


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