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A FONDS PERDUS
Un apr�s-midi avec Francis Jeanson
Publié dans Le Soir d'Algérie le 17 - 08 - 2009


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Prendre le train jusqu�� Bordeaux puis, de l�, un bus menant � la petite ville de Claoueysur- L�ge, au bord du bassin d'Arcachon. Ainsi que nous l�avions convenu, nous trouvons Francis Jeanson � l�arr�t du bus. Pr�sentations rapides.
La cons�ur qui m�accompagne, Marie- Jo�lle Rupp, a pris rendez-vous avec lui, en qu�te de t�moignage sur son p�re, Serge Michel. Elle me pr�sente. En fait, elle compl�te la pr�sentation commenc�e au t�l�phone quelques jours plus t�t. C�est donc lui, Francis Jeanson. Cette l�gende, pour nous autres, Alg�riens, est l�humilit� m�me. Il nous embarque dans sa voiture. Chez lui, c�est une maison toute simple, avec au bout d�une all�e de jardin, une pi�ce en guise de bureau. Emplie de livres. Nous passerons l�apr�s-midi � bavarder. A l��couter, plut�t. En sa qualit� de chef du r�seau de soutien au FLN, il �tait habilit�, nous avait-t- il sembl� � l�hebdomadaire pour lequel je travaillais alors, � exprimer son opinion sur le r�le de l�arm�e en ce d�but des ann�es 2000 o� de larges courants alg�riens et fran�ais la mettaient directement en cause dans la situation de violence que connaissait l�Alg�rie. Je voulais, en fait, conna�tre l�avis d�un philosophe familier des analyses complexes doubl� d�un ami de l�Alg�rie sur ces th�ses qui imputaient tout � l�arm�e. A l��poque, le juste milieu �tait impensable. Les deux courants qui s�affrontaient dans l�ar�ne politique et les m�dias attribuaient, l�un, toute la responsabilit� du chaos alg�rien � la grande muette tandis que l�autre d�fendait l�arm�e mordicus. Francis Jeanson nous explique sereinement que dans aucun pays du monde, � aucun moment de l�histoire, sauf en Alg�rie, une arm�e n�a �t� incrimin�e dans son ensemble du fait de la d�rive r�elle ou suppos�e de quelques-uns de ses chefs, aussi grad�s soient-ils. Ce qui gardait toute sa cr�dibilit� � son propos, c�est que l�amiti� sinc�re qu�il �prouvait pour l�Alg�rie n��tait entach�e d�aucune complaisance. Son esprit critique fonctionnant d�abord � l�encontre de ses amis. De ce point de vue, il �tait diff�rent de certains de ses camarades �porteurs de valises� que le noble engagement de leur jeunesse en faveur de l�ind�pendance de l�Alg�rie avait rendu, une fois celle-ci acquise, aveugles au pi�tinement des principes de libert�. Francis Jeanson �voqua longuement ses rencontres clandestines avec Serge Michel � cette �poque des �porteurs de valises�. Sa fille le questionna sur la vie dans la clandestinit�, les planques, les d�placements d�guis�s, les rencontres avec les responsables de la F�d�ration de France du FLN. Les r�ponses � ces questions r�v�laient, outre l�intelligence pratique de l�intellectuel engag� dans la clandestinit�, un v�ritable conteur sachant tenir son auditoire en haleine. Mais autant que son r�le dans le soutien au FLN, il m'importait de savoir pourquoi, alors que jeune philosophe venant d�entrer aux Temps modernes, prestigieuse revue du pape de l�existentialisme, il s��tait lui trouv� m�l� � la brouille entre Jean-Paul Sartre et Albert Camus. Nous sommes en 1952. Jeanson a 30 ans. Camus publie L�Homme r�volt�, ouvrage qui consomme la rupture entre les deux hommes autour de la notion de l�engagement. La r�union de r�daction aux Temps modernes, dont la direction a �t� confi�e par Sartre � Jeanson depuis quelques mois, d�bat autour du sort � r�server au livre de Camus. L�ignorer ? Impossible. En parler ? Oui mais en le passant au crible de la critique. C�est Sartre qui d�cide : �C�est encore Jeanson qui fera la note de lecture la moins m�chante.� Jeanson jugera le livre de Camus �r�actionnaire�, et �certains de ses jugements erron�s�. Camus r�pond mais � Sartre qu�il sait �tre le commanditaire de l�article et, par la m�me occasion, � Jeanson. Il �crit ceci : �Un m�lange de suffisance sombre et de vuln�rabilit� a toujours d�courag� de vous dire des v�rit�s enti�res� Il se peut que vous ayez �t� pauvre, mais vous ne l'�tes plus. Vous �tes un bourgeois comme Jeanson et comme moi� Votre morale s'est d'abord chang�e en moralisme, aujourd'hui elle n'est plus que litt�rature, demain elle sera peut-�tre immoralit�.� La pol�mique est entr�e dans l�histoire des id�es car elle s�articulait autour d�une question qui allait prendre de plus en plus d�ampleur : l�engagement de l�intellectuel par rapport au communisme, notamment. Un autre point sur lequel je voulais m�entretenir avec lui �tait son r�le d��diteur de Frantz Fanon. Dans les ann�es 1950, il cr�e et dirige aux �ditions du Seuil, � Paris, la collection �Ecrivains de toujours�. C�est dans son bureau qu�il voit arriver un jour un jeune Martiniquais. Frantz Fanon avait envoy� par la poste quelques mois auparavant un manuscrit que Jeanson avait trouv� int�ressant. Il le convia � une rencontre. Les deux hommes engag�rent la conversation. Jeanson lui dit qu�il �tait pr�t � publier le livre mais que le titre ne collait pas. C�est � lui qu�on doit Peaux noires, masques blancs. Puis il fait l��loge de l�analyse d�velopp�e par Fanon. Ce dernier r�torque alors : �C�est pas mal pour un Noir, non ?� C�est le genre de plaisanterie que Jeanson ne go�te gu�re. Il r�plique : �Si vous pensez que je suis capable de tenir un tel propos, autant vous en aller tout de suite.� Fanon �clate de rire. C��tait l�une de ses provocations. Nous n'avons pas vu passer les heures. Mesur� et passionnant, Francis Jeanson �tait a�rien. Il savait convaincre par suggestion. Et jamais il ne s�attardait sur ce qu�il avait fait de glorieux. Telle est la marque des grands.
A. M.
PS d�Ici : Cette chronique ne para�tra pas pendant deux semaines.


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