Manifestement, la célébration du Nouvel An berbère, Amenzu n Yennayer, ne se fait plus comme au temps des ancêtres. Autres temps autres mœurs. Dans la wilaya de Bouira, chacun accueille la nouvelle année berbère comme il peut. Si l'un célèbre Yennayer parce qu'il faut préserver la tradition et s'affirmer sur le plan identitaire, l'autre ne voit en cette fête qu'une opportunité pour la réunion de la famille. «Yennayer c'est une autre occasion de se réunir en famille le temps d'une soirée et c'est ce qui nous intéresse le plus. On se réunira autour des plats traditionnels, nous avons déjà tout prévu pour que la fête se passe dans de bonnes conditions», dit une femme rencontrée alors qu'elle faisait ses courses pour Yennayer. Ainsi, ce qui pourrait distinguer Yennayer des autres fêtes, c'est bien la particularité culinaire de la région. Le couscous au poulet, les crêpes et d'autres mets préparés à l'occasion, ce sont les principaux plats dont est constitué le dîner de Yennayer. S'agit-il dans ce cas de la pure tradition culinaire de la région qui a été transmise de génération en génération ? Plusieurs rituels ont été abandonnés par les populations. «Les temps ont beaucoup changé. Nos grands-mères ne badinaient pas avec la célébration de Yennayer. Pour ce qui est de la cuisine, des plats sont préparés pour le dîner. La tradition veut aussi que la maison soit nettoyée de fond en comble le premier jour de l'année. Pour eux, tout ça avait un sens. Mais aujourd'hui, tout a changé. On célèbre Yennayer comme toutes les autres fêtes», a déclaré Kamel, président d'une association. Dans plusieurs régions de la wilaya, notamment berbérophones, à l'occasion de Yennayer, les femmes se chargeaient des préparatifs de plusieurs plats pour le dîner. On raconte qu'avant, le dîner de Yennayer était composé de sept plats différents. En plus du plat principal qui est le couscous au poulet, les crêpes et d'autres mets figurent dans le menu de la tradition. Outre la variété des plats que l'on réserve pour Amenzu n Yennayer, les populations profitaient de cette occasion pour «conjurer» le sort et émettre des vœux d'une année prospère et d'abondance. Mais aujourd'hui, ces rituels ont bel et bien disparu. L'aspect superstitieux de Yennayer n'a plus droit de cité. Avant, les murs des maisons sont recouverts de chaux et le trépied de l ́âtre (Lkanoun) est changé. Ajoutons à cela l'opération de nettoyage de la maison. Il faut souligner que ces rituels ont perdu de leur influence. De nos jours, il faut le reconnaître, célébrer Yennayer est devenu une forme de revendiquer son appartenance à une culture plusieurs fois millénaire.