Les juges ont effectué une première étape vers une éventuelle saisine de la Cour de Justice de la République dans le volet financier de l'affaire Karachi, en sollicitant le parquet sur la compétence de cette instance chargée d'enquêter sur les ministres, a-t-on appris mardi de source judiciaire. Les juges Renaud van Ruymbeke et Roger Le Loire ont délivré lundi une ordonnance demandant "des réquisitions ou l'avis" du parquet "sur la compétence de la Cour de justice de la République", a-t-on indiqué. Cette ordonnance ne mentionne aucun nom, a-t-on précisé de sources proches du dossier. Les magistrats financiers enquêtent sur le financement de la campagne présidentielle d'Edouard Balladur en 1995, soupçonnant l'utilisation occulte de rétrocommissions sur des contrats d'armement et le détournement des fonds secrets de Matignon. Edouard Balladur et son ancien ministre de la Défense François Léotard, dont la villa varoise a été perquisitionnée lors de l'enquête, sont cités dans le dossier. Me Olivier Morice, l'avocat des familles de victimes de l'attentat de Karachi, dont une plainte avait déclenché l'enquête, a demandé aux juges que le dossier de Nicolas Sarkozy, ministre du Budget au moment des faits, soit également transmis à la CJR. Mais des sources proches du dossier estiment qu'il n'y a pour l'heure pas d'éléments dans le dossier susceptibles de conduire à une mise en cause de l'ancien chef de l'Etat. Une fois que le parquet aura remis un avis ou rendu des réquisitions, les juges pourront lui transmettre le dossier des personnalités dont ils pensent qu'elles peuvent faire l'objet d'une poursuite. Le parquet de Paris décidera alors de transmettre, via le parquet général, à l'avocat général près la Cour de cassation. Ce sera à lui de décider s'il faut transmettre à la commission des requêtes de la CJR, qui décidera d'une éventuelle enquête. Celle-ci serait alors menée par la commission d'instruction. Créée en 1993, la CJR est chargée d'enquêter et de juger des ministres pour des faits commis dans l'exercice de leur fonction. Elle enquête actuellement, dans deux dossiers distincts sur Christine Lagarde et Eric Woerth. Les anciens ministres de l'Economie et du Budget ont été placés sous le statut de témoins assistés, respectivement dans le dossier de l'arbitrage Tapie/Crédit Lyonnais et dans celui de la vente controversée de l'hippodrome de Compiègne.