Nouvelle brouille diplomatique entre Alger et Paris ? Au moment où les responsables des deux pays claironnent sur l'excellence des relations bilatérales, voilà un nouvel incident qui remet à l'ordre du jour le caractère tendu des liens algéro-français. Alors que les Algériens fêtent l'anniversaire des manifestations du 17 octobre 1961, réprimées dans le sang par les pouvoirs coloniaux, un ministre de la République s'est fait humilié dans un aéroport de Paris. Le ministre de la Communication, Hamid Grine, a été soumis, avant-hier soir, à une fouille par la police française de l'air et de frontières de l'aéroport d'Orly (Paris). «Il a été fouillé au corps», a affirmé une source à TSA, ajoutant que les bagages du ministre, qui est détenteur d'un passeport diplomatique algérien, ont également été passés au scanner malgré ses protestations. D'autres sources évoquent que le ministre n'était pas en mission officielle et qu'il était en voyage privé pour passer le week-end à Paris. A ce titre, il est traité comme tout autre voyageur. Cet incident prend les allures d'un scandale non par parce c'est Hamid Grine qui en est victime mais parce qu'il s'agit d'un ministre de la République algérienne porteur d'un passeport diplomatique. A Alger, une colère noire s'est emparée de la diplomatie algérienne, surtout qu'en Algérie, c'est toujours ou souvent le tapis rouge qui est déroulé aux officiels français. Selon Sihem Souid, l'auteur de Omerta dans la police, ancienne policière à l'aéroport d'Orly, qui s'est exprimée sur TSA, «la police de l'air et des frontières n'a pas à fouiller, sauf si la personne est apparue en train de faire quelque chose de dangereux». Elle explique qu'on n'a pas le droit de fouiller un ministre détenteur d'un passeport diplomatique, car le ministre doit passer par le pavillon d'honneur. En plus qu'elle provoque une brouille diplomatique, la fouille du ministre de la Communication dans un aéroport de France soulève beaucoup d'interrogations ? Ce n'est donc plus les dossiers politico-sécuritaires, comme l'assassinat de l'avocat Ali Mecili à Paris et les moines de Tibhirine qui sont actionnés mais le traitement réservé aux Algériens, et à plus forte raison, aux responsables gouvernementaux, qui créent des brouilles pour ne pas dire des crises diplomatiques. Hamid Grine n'est pas, en effet, le premier ministre algérien à subir un traitement de la sorte. Le ministre de l'Industrie, Abdessalem Bouchouareb et celui de l'Habitat, Abdelamdjid Tebboune, ont déjà subi un traitement similaire. La récidive renseigne sur le peu de cas qu'accordent les autorités françaises à l'Algérie même si le discours officiel véhicule tout le contraire. Elle renseigne également sur la faiblesse et la timidité de la réaction des autorités algériennes qui ne veulent pas sortir les griffes et se faire respecter. Selon certaines indiscrétions, le ministre des Affaires étrangères, Ramtane Lamamra, avait protesté verbalement auprès de son homologue français, Laurent Fabius. L'affaire de la fouille du ministre de la Communication prend de l'ampleur avec la convocation hier de l'ambassadeur de France à Alger, Bernard Emié, par le département des Affaires étrangères. Quant au représentant diplomatique de l'Algérie à Paris, il protestera officiellement aujourd'hui auprès des autorités françaises. C'est que l'incident est grave. Il l'est davantage lorsque l'on sait les honneurs avec lesquels les officiels français sont reçus à Alger : accueil par des officiels à l'aéroport et entretiens avec les hauts responsables même pour les responsables de rang inférieur comme le maire de Paris. Comme si les blagues de mauvais goût et les provocations ne suffisent pas, on y ajoute des traitements inconvenables aux ministres algériens. Il est vrai que la France n'aime pas l'Algérie mais il est vrai aussi que l'Algérie ne fait pas tout ce qui est nécessaire pour imposer son respect. En tout état de cause, l'incident est «une moins-value par rapport à l'esprit qui enveloppe nos relations», pour reprendre le ministre des Affaires étrangères qui répondait, en 2013, à une mauvaise blague sur l'Algérie du président français, François Hollande.