C'était au tour des jeunes de la commune de Bou Ismaïl de s'insurger, avant-hier, pour crier leur ras-le-bol et dénoncer la situation précaire dans laquelle ils vivent depuis des années. Après avoir coupé la route menant vers le centre-ville de la commune, les jeunes ont exigé l'attention des autorités et une prise en charge réelle de leurs doléances. «Nous avons trop attendu. Nous ne voyons rien à l'horizon et ne demandons rien d'autre qu'un travail digne pour vivre», assène Hassan, un jeune diplômé du centre de formation rencontré dans un café avec un groupe d'amis. «Nous ne sommes pas contre l'Etat, ni contre les élus. Nous ne sommes pas des jeunes qui veulent détruire, au contraire nous voulons construire. Notre cri s'adresse aux responsables algériens. Nous exigeons un minimum de considération», a ajouté Hilal, un technicien supérieur en agronomie. Hilal a déposé une demande d'emploi au niveau de la commune en février 2010, mais à ce jour rien n'a été fait pour lui. «Voici le reçu qui m'a été remis par la mairie en février 2010. La wilaya de Tipaza et plusieurs autres organismes ont fait des offres d'emploi à la commune. Mais moi, je n'ai rien eu», a-t-il ajouté. Pour revenir à l'action de ces jeunes dont l'âge varie entre 19 et 38 ans, une explication nous a été donnée par Rachid, marié et père de deux enfants en bas âge : «Nous ne sommes pas des gens à problèmes. Nous sommes originaires de Bou Ismaïl et n'avons aucune intention de détruire notre commune, mais sachez que cette action est un cri de détresse en direction des autorités afin qu'elles prennent en charge nos demandes qui sont justifiées et logiques.» Au quartier des Neufs martyrs, une cinquantaine de logements de type RHP (résorption de l'habitat précaire), étaient destinés aux habitants des bidonvilles de l'autoroute menant d'Alger vers Bou Ismaïl. «Nous avons reçu une décision interministérielle signée par les ministères des Finances et de l'Habitat qui ont en décidé autrement.» «Nous avons prévu d'octroyer ces logements RHP aux habitants de ce bidonville afin de dégager le terrain pour le tronçon d'autoroute, mais à notre grande surprise, la décision interministérielle n°06 du 31 juillet 2002 en a décidé autrement», a avoué l'adjoint au maire, Abdellah Rouaz. Plus explicite, l'élu ajoutera : «La note en question limite l'octroi de ces logements RHP aux citoyens habitant la campagne, avec l'exigence d'être agriculteur affilié.» «Moi, éboueur ?» Interrogé sur la manifestation des jeunes qui l'ont élu, M. Rouaz fait le point. «Nous ne sommes pas une usine. Nous dépendons de la wilaya et d'autres organismes qui nous envoient chaque mois une liste de métiers souhaités. Notre travail consiste à choisir parmi les inscrits aux bureaux de main d'œuvre, selon les profils recherchés et à envoyer des convocations à ces jeunes.» L'adjoint au maire a aussi évoqué les différents programmes, à savoir l'Anem et la DAS qui participent de manière active à la résorption du chômage. «Nous recevons chaque mois un quota de 30 à 40 demandes d'emploi et nous prenons ceux qui remplissent les conditions demandées par l'organisme employeur. Malheureusement, il y a des jeunes inscrits qui ne remplissent pas les conditions exigées.» L'autre volet sur lequel M. Rouaz s'est étalé est celui du refus par les jeunes d'exercer certains métiers. «Regardez cette liste ; sur les 17 convoqués 7 seulement ont rejoint leur poste d'emploi. Nos jeunes refusent de travailler comme éboueur, jardinier ou autre. Ils veulent tous être agent de sécurité, chose qu'on ne peut pas toujours satisfaire.» Le logement, un rêve ! Le problème du logement n'est pas particulier à la commune de Bou Ismaïl, bien que des efforts aient été fournis par les pouvoirs publics dans ce domaine. Mais la balance reste toujours déficitaire, le nombre de demandeurs dépassant de loin celui des logements existant. M. Rouaz nous fait un état de la situation qui prévaut à Bou Ismaïl. «Nous avons reçu plus de 3000 demandes à la fin de l'année 2010 et pour le seul programme RHP, nous n'avons que 50 logements. C'est vous dire le déficit que connaît notre commune en matière de logement.» Le logement précaire (bidonville) occupe une place de choix dans la commune de Bou Ismaïl, ce qui fait que la population ne cesse d'augmenter au fil des ans. «En 2007, nous avons recensé 792 bidonvilles, quatre ans après je peux vous dire que ce chiffre a doublé», a souligné M. Rouaz. S'agissant des chantiers en cours, le second responsable de la commune a fait savoir que «200 logements de type RHP sont en cours de construction, comme et il est prévu de construire 1120 logements de même type d'ici 2014». Pour ce qui est du logement social, M. Rouaz a indiqué que «2000 demandes ont été déposées pour un projet de 100 logements en construction, dont 380 sont déjà prêts pour la formule du logement participatif aidé (LPA)». Enfin, l'adjoint au maire fait appel aux différents services de sécurité afin qu'ils accomplissent leur mission : «Le manque de sécurité qui sévit au niveau de notre commune nous amène à demander l'intervention des services de sécurité afin d'éradiquer la délinquance.»
