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«Matoub est le plus grand chanteur kabyle de tous les temps»
Aomar Mohellebi
Publié dans Le Temps d'Algérie le 13 - 09 - 2011

, journaliste et auteur, publiera bientôt un nouveau livre intitulé Matoub Lounès, le dernier poète libre. Il a à son actif trois romans édités entre 2000 et 2004, un essai et un recueil de poésies. Dans cet entretien, Aomar Mohellebi, journaliste à Tizi Ouzou depuis 1994, parle de Matoub Lounès, de la chanson kabyle et d'autres sujets.
Le temps d' Algérie : Vous avez mené un travail de recherche sur la vie et la carrière artistique du chanteur kabyle Matoub Lounès et vous allez terminer un livre sur son œuvre. En quoi consiste exactement votre travail ?
Aomar Mohellebi : Il s'agit d'une sorte de randonnée dans la poésie de Matoub Lounès. Je le considère comme étant le plus grand chanteur d'expression kabyle de tous les temps. Plusieurs arguments existent pour conforter ce que je dis. A titre d'exemple, qui peut interpréter mieux que lui n'importe laquelle des 220 chansons qu'il a chantées en vingt ans de carrière.
Matoub a également repris plusieurs chansons des maîtres de la chanson algérienne comme El Anka, El Hasnaoui, Slimane Azem, Boudjemâa El Ankis, Fadéla Dziria, etc. En écoutant les deux versions, on constate amplement la différence. Matoub, en rendant hommage aux maîtres, en est devenu un. Pour revenir à mon livre qui paraîtra bientôt, il est consacré à la poésie de Matoub.
Quand j'étais au lycée à la fin des années 80, pour me taquiner, mes camarades me disaient que les textes de Matoub sont superficiels. Evidemment, bien que je fusse encore trop jeune, je n'étais pas d'accord. A l'époque déjà, ses chansons me faisaient pleurer.
Certainement, sa voix était pour beaucoup dans cet excès d'émotion mais il y avait également ses poèmes d'une rare profondeur. Peut-être que certaines de ses chansons étaient simples mais elles étaient loin d'être simplistes. Dans ce livre, je reviens à ses poèmes sur la vie, la souffrance, l'amour, l'injustice, l'amitié, l'identité, le terrorisme, le fanatisme et la liste est encore longue.
Selon vous, pourquoi Matoub demeure-t-il toujours omniprésent en Kabylie ?
Je dois vous informer que votre question a fait l'objet d'un mastère dans une université canadienne en 2003. J'ai même reçu à Tizi Ouzou la dame qui a effectué ce travail de recherche et elle n'a pas cessé de se triturer les méninges afin de réunir des éléments de réponse. Malheureusement, je n'ai pas eu la chance de lire sa thèse.
Toutefois, il y a quelques éléments de réponse qui sont plutôt frappants et évidents. Il y a d'abord le fait qu'il s'agisse du plus grand chanteur et poète kabyle qui n'ait jamais existé et il est pratiquement sûr qu'il n'y en aura pas un deuxième. Il a aussi la plus belle voix qu'aucun chanteur ne pourra imiter. Quand bien même d'autres chanteurs ont essayé de faire comme lui, en vain.
Sa façon d'interpréter est unique. Pour s'en rendre compte, je vous conseille par exemple d'écouter la même chanson plusieurs dizaines de fois, en se concentrant, non pas sur la musique, la voix ou les textes, mais sur la façon d'interpréter. En écoutant entre autres bien sûr, le prélude de la chanson Izriw, on constate à quel point Matoub peut aller loin grâce à ses cordes vocales impressionnantes.
Matoub est toujours vivant à cause aussi de son parcours de militant unique dans les annales de la Kabylie mais aussi de l'Algérie. C'est sûr que l'Algérie n'a jamais connu un chanteur aussi engagé et enragé que Matoub. Il avait la chance d'être en plus le meilleur sur le plan artistique. L'ensemble de ces éléments ajoutés à d'autres expliquent amplement pourquoi Matoub est entré dans l'immortalité.
Peut-on qualifier Matoub Lounès de chanteur anticonformiste ?
Bien évidemment. Matoub Lounès est l'anticonformisme personnifié. Il a chanté des thèmes qui n'ont jamais été abordés auparavant par aucun autre poète kabyle. Je citerai la liberté sexuelle de la femme, la déshérence, le maraboutisme, le fanatisme religieux.
Matoub Lounès est le seul poète kabyle qui cite les noms des personnes et des personnalités dans ses textes souvent pour les égratigner mais aussi parfois pour les louer. Aucun autre poète ne l'a fait. En écoutant ses chansons, on retrouve les noms des grands hommes qui font l'Histoire de notre pays, l'Algérie, à l'image de Abane Ramdane, Krim Belkacem, le colonel Amirouche, Khider. Matoub est aussi le seul à avoir dénoncé le terrorisme.
Il est le seul à avoir rendu hommage à Mohamed Boudiaf, qui n'était pas kabyle. Ce qui montre, si besoin est, que Matoub était loin d'être un raciste. Matoub n'était pas faible, il ne pouvait de ce fait pas être raciste. Il revendiquait la reconnaissance de sa langue maternelle et de sa culture. Il dénonçait certes l'arabisation forcenée et l'idéologie arabo-baathiste dont nous récoltons les conséquences néfastes aujourd'hui. Ce sont toutes ces spécificités et les richesses de cet homme que je tente de restituer à ma manière.
Quel est le meilleur souvenir que vous gardez de ce chanteur, sachant que vous l'avez côtoyé de son vivant ?
Avant l'assassinat de Matoub, une amitié commençait à naître entre nous. La veille de son assassinat, le 24 juin 1998, j'étais chez lui à Taourirt Moussa. Au milieu de l'après-midi, il m'a déposé à la nouvelle ville de Tizi Ouzou en me fixant un rendez-vous pour le surlendemain, c'est-à-dire le vendredi 26 juin. Jeudi, il a été assassiné.
Vous pouvez imaginer le traumatisme que cela m'a provoqué. Rien, absolument rien ne pourrait me consoler de ce choc. Pour moi, la vie se divise en deux périodes : celle d'avant le 25 juin 1998 et celle d'après. Après avoir vécu une telle épreuve, je ne peux sincèrement pas raconter un quelque bon souvenir avec Matoub bien qu'il y en ait eu.
Vous êtes à votre cinquième livre et vous avez cessé d'écrire depuis plusieurs années. peut-on savoir pourquoi ?
La sortie de mon dernier roman, Les montagnes pleurent aussi remonte à 2004. Depuis, je n'ai rien publié. Mais je n'ai pas cessé d'écrire. Il m'arrive souvent de me demander à quoi servirait l'édition d'un livre. Cela peut paraître égoïste mais j'écris beaucoup plus pour moi. Par exemple, le livre sur Matoub que j'ai intitulé Le dernier poète libre représente une thérapie.

Vous écrivez beaucoup sur la chanson kabyle et les artistes de la région. Comment voyez-vous la chanson kabyle d'aujourd'hui ?
Je crois que le constat est évident. Même si on devait avoir la prudence d'être indulgent, je dois dire que personne ne peut nier que la chanson kabyle traverse une grande crise sans précédent. On est loin de la période faste et de grande apogée que la chanson kabyle a connue durant le début et le milieu des années quatre-vingt. Aujourd'hui, la durée de vie d'un nouvel album ne dépasse pas un mois quand il s'agit vraiment d'exceptions. La disparition de Matoub a signé la fin de l'étape prospère de la chanson kabyle.
Les anciens chanteurs ont arrêté de produire. D'autres, en panne d'inspiration, produisent n'importe quoi sans pouvoir conquérir l'intérêt des jeunes mélomanes qui sont majoritaires.
Il ne faut pas non plus oublier que la chanson kabyle a été la voix du peuple. Les artistes avaient pour mission d'exprimer l'interdit, de casser les tabous, de dénoncer les pratiques des gouvernants et de l'opposition.
Depuis le 25 juin 1998, aucune voix discordante n'existe pour dénuder les imposteurs et les usurpateurs de tous bords. Matoub est parti et semble avoir tout pris avec lui.
Entretien réalisé par


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