Ce mois de juillet, mois anniversaire de l´indépendance, est propice pour aborder le maximum de sujets ayant trait à notre guerre de Libération. Parmi ces sujets, celui des faux moudjahidine n´est pas des moindres. Le ministre des Moudjahidine vient de révéler que 10.000 intrus, qui, à l´aide de faux documents, se sont incrustés dans le dispositif des avantages octroyés aux combattants de la liberté, ont été débusqués. L´affaire des faux moudjahidine est vieille comme l´ouverture démocratique du pays. Elle a démarré au début des années 90. Le dossier n´est toujours pas clos. Nous allons commencer par prendre le sujet par son côté le plus glorifiant avant de revenir sur celui qui fâche. Un des auteurs de l´attaque de la poste d´Oran, au début des années 50, bien avant le déclenchement du 1er novembre 1954, Ammi Rabah comme on l´appelait affectueusement à El Moudjahid où il travaillait, a vécu avec une grande humilité sa vie durant. Quand d´autres couraient après les divers avantages qu´offrait l´Algérie à ses moudjahidine et aux ayants droit des chouhada, Lourguioui Rabah se contentait de vivre la liberté. La sienne et celle de son pays. La sienne pour avoir été, après M.Mazouzi, ancien ministre du Travail, le plus vieux détenu politique de la Révolution, Ammi Rabah «dégustait» chacune des journées qu´il vivait depuis sa libération en 1962. Il était humble parmi les humbles. Il se trouvait même des employés qui travaillaient avec lui au journal qui ne connaissaient pas son parcours militant. Il ne le criait pas sur les toits. Ainsi a vécu Ammi Rabah qui a pris sa retraite, avant de s´éteindre quelques années plus tard dans la plus grande discrétion. L´autre exemple a toujours pour cadre le journal El Moudjahid. Il s´agit du grand responsable de la zone autonome qu´était M.Kadri Hamid. Une fois l´indépendance acquise, il intégra le journal en qualité de chef correcteur. Jamais il n´a voulu introduire de dossier de moudjahid. Jamais il ne fut attiré par les privilèges généreusement distribués aux autres. Même à ceux qui n´avaient pas eu d´aussi importantes responsabilités que lui durant la Révolution. Comme Ammi Rabah, Si Hamid ne criait pas sa participation à la guerre de Libération sur les toits. Comme pour Ammi Rabah, au journal, ce n´est pas tout le monde qui connaissait le glorieux passé de Si Hamid. Humble parmi les humbles, Si Hamid s´est éteint sans faire de bruit. Ces deux exemples pour témoigner que l´Algérie a des hommes valeureux, honnêtes, dignes qui ont mis leur vie en péril pour une seule raison: la libération du pays. Des hommes qui ont refusé de «chiffrer» leur combat et d´adresser la facture à la société. Des hommes qui ont vécu heureux au seul motif que leur pays soit libre et qu´ils y ont contribué. Des hommes qui n´ont rien à voir avec tous ceux qui ont monnayé leur engagement dans la lutte. Ammi Rabah et Si Hamid n´ont eu ni kiosque, ni licence de taxi, ni usine, même pas une licence d´importation de véhicule. A l´inverse de ceux qui ont fraudé pour avoir la qualité de moudjahidine, Ammi Rabah et Si Hamid ont «fraudé», à leur façon, de ne pas avoir déclaré officiellement cette qualité. Des deux catégories de fraudeurs, les derniers sont plus nobles, ce sont ceux à qui la patrie ne devrait pas cesser d´être reconnaissante. Ce sont ceux que le ministère des Moudjahidine devrait honorer plus que tous les autres. Faire du bruit pour inscrire leurs noms au fronton de la patrie. Et écarter en silence les intrus, tous les intrus, y compris les magistrats faussaires qui forment aujourd´hui le 3e, quand ce n´est pas carrément le 4e âge. ([email protected])