Ces laissés-pour-compte errent à longueur de journée avant de trouver refuge sous les arcades du Cours de la révolution. Il n'est pas une ruelle qui ne soit occupée par des SDF, notamment à proximité des cafés et boulangeries. Triste sort que celui de la ville de Lalla Bouna, de voir des dizaines d'individus des deux sexes, s'approprier les coins et recoins de la ville, sans aucun égard aux usagers de cet espace, devenu par la force des choses, de véritables habitations à ciel ouvert. Entre vieux, vieilles, voire même des familles entières et aussi des malades mentaux, tous dans, une même situation, sans-logis. Ces laissés-pour-compte, errent à longueur de journée, avant de trouver refuge, qui sous les carcades du Cours de la révolution, qui dans les couloirs des immeubles, et d'autres tout simplement sous les préaux des édifices publics. Comme c'est le cas de l'Hôtel des finances devenu le point de repère des sans-abri. En plus de l'existence de foyers pour personnes en situation difficile touchant, notamment, les personnes âgées, abandonnées et même les expulsés de leurs logements, pour diverses raisons, ces hospices sont, aux yeux de certains, une prison, où faits et gestes sont contrôlés. Oubliant que ces infrastructures sont leur seul espoir, pour y vivre décemment. A l'exception des personnes âgées et malades, qui acceptent cet hébergement. Quant aux autres, elles optent pour la vie de la rue. Cet espace grandeur nature, leur permet tout, notamment la mendicité. C'est le cas de «Bebbouche». Appelé l'homme de carton, des années durant, cet SDF a élu domicile sous le préau du Café de la paix, en face du Cours de la révolution. Le jour, Bebbouche, mendie devant la boulangerie de l'Emir-Abdelkader, la nuit tombée, il regagne ses quartiers, avec de la nourriture à la main. Veillant tard dans la soirée, Bebbouche se permet une grasse matinée, notamment en période hivernale. Une saison avec laquelle, l'homme s'accommode plutôt bien en s'enveloppant de carton et de plastique, pour se réchauffer le corps. Devenue habituelle, sa présence ne semble pas déranger les passants, encore moins les services de la direction des affaires sociales (DAS). Car interpellé par lesdits services, notamment en hiver, et conduit au centre des SDF de Ben Boulaïd de Annaba, ce mordu de la vie de rue, fugue le lendemain, comme un adolescent. Une situation pour laquelle nous nous sommes approché de Bebbouche, pour en connaître les raisons. A notre grande surprise, n'étant pas originaire de Annaba, Bebbouche a été chassé de chez lui. Venu en réfugié depuis la wilaya de Tissemsilt, ce sans domicile fixe, a échappé à la mort, pour avoir refusé de départager ses biens, entre ses futurs héritiers, en l'occurrence sa femme et ses enfants. «Je me suis exilé moi-même, je ne veux plus posséder d'argent encore moins de maison...Je veux juste ce dont j'ai besoin pour survivre la journée...», dira le SDF, qui a opté pour la vie dans la rue, sachant pertinemment que sa mort aura lieu dans la rue. Autres cas de sans-abri, ces familles qui, l'été venu, affluent de partout, du Sud notamment. En effet, chaque haute saison, la ville de Annaba enregistre un nombre important de familles venues depuis Béchar, Adrar et autres régions du Sud, pour faire la manche. Accaparant des espaces publics, ces familles sont des SDF le temps d'une saison. Elles viennent pour gagner leur croûte, et c'est alors la mendicité. Qui, à Annaba, ne connaît pas L. Meftah? Originaire de la wilaya de Biskra, cet homme vient chaque année à Annaba, pour mendier, accompagné de sa femme et ses deux enfants. Dormant à la belle étoile, sur la plage de Rizzi Amor, cette famille de mendiants saisonniers, est devenue la coqueluche des Annabis, qui, à la fin de l'été; l'approvisionnent en tous produits. Depuis le vestimentaire pour que la rentrée scolaire, jusqu'aux denrées alimentaires en passant par divers objets domestiques. C'est dire que la situation de SDF assortie de mendicité, puise son soutien de l'élan de la solidarité humaine. Le cas n'est pas le même à l'égard des malades mentaux, dont la croissance est visible, au vu du nombre de personnes mentalement atteintes, qui circulent en ville. Les uns agités, les autres calmes, mais aussi bien les uns que les autres sont des squatteurs permanents de la rue. Cette dernière constitue chaque été, un espace pour cette catégorie de personnes, abandonnées la plupart du temps par leurs familles, ou venues de wilayas limitrophes. Représentant un danger pour la population, les passants surtout, ces locataires de la rue, ne peuvent faire l'objet d'une admission à l'hôpital psychiatrique d'Abou bakeur El Razzi de Annaba, à défaut d'une demande au préalable, émanant de la famille du malade. C'est pour dire que la majorité des malades mentaux circulant à Annaba, semblent ne pas avoir de famille, du moins domiciliées à Annaba. C'est ce qui explique leur situation de sans domicile fixe. En somme, qu'ils soient SDF par contrainte sociale ou par déficiences sanitaires, les sans domicile fixe à Annaba, constituent une situation sociale à ne pas négliger. Ces personnes sont à l'origine de la prolifération d'un phénomène, devenu, depuis quelque temps, l'un des maux sociaux ternissant la réputation de cette ville cosmopolite.