Une mère de famille est effondrée à la barre du tribunal criminel d'Alger. Elle est effondrée car elle était en train de donner les détails de l'assassinat de son époux et père de famille, retraité, présenté comme étant «coupable» de vouloir re-convoler en justes noces. Le président du tribunal criminel voulait savoir le pourquoi et le comment de cette sale entreprise. «Il était devenu insupportable. Depuis la retraite, il était franchement désagréable. Je ne pouvais plus l'entendre parler surtout qu'il a mis au-devant de ses projets, son remariage. Alors là, c'était la goutte qui débordait du vase déjà plein.», a-t-elle expliqué courbée au-dessus de la barre et emmitouflée dans son hidjab ample, la tête invisible dans un foulard encore plus ample que ceux portés quotidiennement. Visiblement, elle sait ce qu'elle a fait. Elle sait ce qui l'attend. Pourtant, elle demandait, sans le savoir, des circonstances atténuantes en répétant qu'il voulait refaire sa vie avec une autre femme. C'était presque un brandissement de la... «légitime défense». Elle a même sangloté. Nous n'avons pas vu sa mine et donc nous ne saurions verser dans le «mensonge» en écrivant qu'elle avait pleuré. Nous ne voyions que le dos... Quant à la position de son mari, elle a affirmé qu'il ronflait très fort, signe qu'il était donc affaissé. C'est donc à ce moment qu'elle en avait profité pour tuer le père de ses enfants. Et au moment où elle avait commencé à raconter comment elle avait procédé de sang-froid, les membres du tribunal criminel, surtout les deux jurés, étaient sur leurs gardes. Il y avait certes, cette intime conviction qui suit nécessairement les faits, mais aussi et surtout comment ces mêmes faits s'étaient déroulés: «J'ai pris la hache et j'ai frappé, frappé, frappé. Il n'avait pas bougé. Il était déjà inerte. Je ne saurais dire combien de coups, j'avait donnés», murmurait-elle. Le président aide l'accusée pour ce qui est du nombre de coups: «Douze. Tous sur la tête et la poitrine!» La salle baigne dans le silence. Un lourd silence enveloppait la salle à moitié vide à cause de l'absence des proches des deux parties. Probablement pour ne pas se retrouver côte à côte dans la même salle d'audience mais parce que surtout, l'accusée n'avait pas besoin d'entendre d'autres sons de cloche que les siens. Le meurtre avait eu lieu à huis clos! C'était donc normal qu'il n'y ait ni témoins, ni perte de temps pour le tribunal criminel qui n'aura retenu que cette phrase ressassée plusieurs fois sur le même ton: «Je l'ai tué parce qu'il voulait se remarier!» Le président lui avait répondu qu'elle aurait pu dialoguer avec lui et à défaut, demander le divorce, mais pas le supprimer. «L'âme appartient à Allah. C'est Lui qui l'a créée et c'est Lui qui la reprend», avait mâchon-né sentencieusement le magistrat qui reviendra après de longues délibérations i-e que le verdict n'avait pas été facile à arrêter: cinq ans de réclusion criminelle. Ce qu'il faut retenir, ce n'est pas tant le crime de l'époux par madame: non, c'est la phrase prononcée à un moment des débats par la meurtrière: «La brute ronflait au moment où»... Sans commentaire sur les intentions de madame...et le verdict.