Ce mouvement de grève a mis à nu bien des incuries Le débrayage des blouses blanches a révélé les conditions difficiles dans lesquelles exercent les praticiens et les paramédicaux dans les hôpitaux du pays. Alors que les blouses blanches montent au créneau et brandissent le mot d'ordre de grève, les malades se retrouvent dans une bien fâcheuse situation. Ils sont les otages de la logique jusqu'au-boutiste des syndicats de la santé qui paralysent depuis près d'une semaine les structures de santé publique. Révision du statut particulier, du régime indemnitaire, la généralisation de la prime de contagion à l'ensemble des travailleurs, le glissement catégoriel et la régularisation des contractuels sont autant de revendications soulevées par les adhérents au mouvement de protestation. Statut du personnel paramédical, l'élaboration du dispositif portant intégration des paramédicaux brevetés dans le nouveau statut et l'élaboration d'un calendrier de travail et des dispositifs réglementaires afin de rendre effective la progression de carrière et autres pétitions que l'on qualifie d'urgentes, sont les autres requêtes qui motivent cette montée au créneau. En fait, ce mouvement a mis à nu bien des incuries, notamment la gabegie qui semble s'emparer de quelques services sensibles comme ceux dédiés aux cancéreux par exemple. C'est du moins ce que décrit avec rage Mme Samia Gasmi, présidente de l'Association nationale des cancéreux Nour Doha. «Une prise en charge appropriée manque cruellement dans les urgences spécialisées», dénonce-t-elle en signalant que la grève des médecins et des paramédicaux «ne fait que dévoiler l'état lamentable dans lequel se trouvent nos malades». A l'en croire et alors que les praticiens décrochent pour les motifs que l'on sait, «les patients arrivent des quatre coins du pays, particulièrement de l'extrême sud et se heurtent à une amère réalité. Ces derniers, de même que leurs parents, souffrent de leur terrible mal», dit-elle en indiquant que le médecin et le paramédical dans les services d'oncologie ont le plus grand mal à venir en aide à cette catégorie de patients, voire n'arrivent pas à soigner du tout. «Le matériel comme les tubulures n'existent pas dans les hôpitaux» s'indigne-t-elle en poursuivant: «On refuse de donner des traitements pour des lymphomes non hodgkiniens car le traitement est absent, ainsi en est-il du MabThera!» poursuit-elle, exaspérée en rappelant que les malades parcourent des milliers de kilomè-tres pour prétendre à un éventuel traitement. Ces derniers viennent de Timimoun, Adrar, Tamanrasset, Ghardaïa... finalement et à en croire cette dame, le débrayage des blouses blanches a révélé les conditions difficiles dans lesquelles exercent les praticiens, les paramédicaux et tous les professionnels de la santé publique dans les hôpitaux du pays. De son côté, la Fédération algérienne des consommateurs (FAC) dit suivre avec une grande inquiétude la situation des malades dans les hôpitaux publics. Elle ne manque pas d'épingler les syndicalistes en indiquant que leur grève n'aura pas respecté la notion de service minimum, surtout que certains services ne peuvent, pour aucun motif, suspendre leur activité, notamment la radiologie dans le service d'oncologie, note la FAC dans un communiqué adressé à notre rédaction. Elle se dit néanmoins «solidaire avec les praticiens qu'elle invite à privilégier la négociation et à aplanir les points de discorde avec leur tutelle en recourant à une méthode plus correcte, tout en avantageant le service public et l'entraide avec leur administration en vue d'améliorer les prestations en direction du citoyen» mentionne le communiqué qui invite enfin le ministre de la Santé, à réviser le système de santé national. Des sources proches d'autres associations de malades comme celle des hypertendus ou des diabétiques font part de leur combat quotidien contre la maladie. Un combat qui devient plus âpre à la faveur de cette levée de boucliers. En effet, tous ces malades chroniques, précise une source, sont contraints désormais de mettre la main à la poche le temps que durera la grève. Puisque ces patients ne pourront se présenter aux urgences qu'en cas de crise et pour tout renouvellement d'ordonnance, ils n'ont d'autre choix que de se rendre chez le privé. Ce qui grèvera lourdement leur budget. Ce schéma est valable pour tous les autres malades chroniques comme les asthmatiques. A noter que l'Intersyndicale de la santé englobant les praticiens de la santé publique, les spécialistes et les professeurs en paramédical a entamé, lundi dernier, une grève de trois jours renouvelable. La plupart des centres de santé d'Alger se sont joints à la grève. Aux dernières estimations, le taux de suivi de la grève est de 80%, selon le Dr Lyès Merabet, du Syndicat national des praticiens de la santé publique, qui a affirmé que la grève était suivie à l'échelle nationale.