«A l'exception de Kara Mohamed-Seghir, qui fait partie des vétérans du mouvement, tous les autres sont des arrivistes, venus profiter des fruits de nos années de militantisme et de sacrifices», c'est en ces termes amères qu'un des membres influents du ce mouvement a exprimé hier son sentiment par rapport à la composante du nouveau gouvernement. Le ton, désormais, n'est plus à la joie, ni à l'enthousiasme des premiers jours qui avaient suivi la victoire écrasante de Bouteflika et dont le FLN, version Belkhadem, s'était attribué la quasi-intégralité des mérites. Les anciens pro-Benflis, totalement écartés de la composante du «nouveau» gouvernement, n'en jouissent pas moins d'un certain délai de grâce, depuis que les animateurs du mouvement de redressement, encore sous le choc, ont décidé de s'accorder quelques jours pour réfléchir à la démarche à suivre. Il n'est même plus question de l'ultimatum qui avait été lancé au fameux groupe des douze mis en place par le comité central issu du 7e congrès qu'avait convoqué Benflis avant de démissionner. D'autres sources proches du mouvement de redressement, dès lors, tentent de se montrer rassurantes en maintenant le flou dans leurs propos : «La prochaine rencontre avec le groupe des douze aura lieu au début du mois.» Nous n'en saurons pas plus. A ceci près que Belkhadem, rentré de Tripoli, aurait été sollicité pour se consacrer beaucoup plus à ses tâches diplomatiques face au redéploiement libyen d'un côté, aux offensives marocaines de plus en plus musclées et aux négociations avec l'OMC qui touchent désormais à leur phase cruciale. C'est donc son «adjoint», Mahmoud Khodri, qui aurait été chargé de maintenir les contacts avec l'autre aile dans le but, nous dit-on, «d'arriver à un consensus le plus tôt possible afin de mettre en place une direction transitoire commune chargée de gérer les affaires courantes du parti, ainsi que la commission paritaire ayant pour mission la préparation du 8e congrès, deuxième du nom, qualifié de rassembleur par les uns et les autres». Au niveau du groupe parlementaire, qui aurait tenu hier une énième réunion de coordination, le ton est également à l'apaisement. Des sources proches de cette rencontre nous indiquent, en effet, qu' «un consensus est en passe d'être trouvé». Il ne serait même plus question, dans l'état actuel des choses, d'en vouloir aux postes de Abbas Mikhalif et de Karim Younès, respectivement président de l'APN et président du groupe parlementaire, tous deux anciens partisans de la ligne pro-Benflis. Notre source, qui semble comprendre que désormais le soutien présidentiel n'est pas si évident que cela, alors que le rôle joué par le FLN redresseurs dans la réélection de Bouteflika aurait pu être «grossi» pour les besoins de la cause, irait donc vers un ton moins arrogant envers ceux qui avaient soutenu Benflis, sans lesquels, en fin de compte, le FLN perdrait de sa superbe et cèderait même sa place de première formation politique du pays au profit de son frère ennemi le RND. Ce parti, qui n'attend que son heure depuis sa double déconfiture de 2002, n'attend du reste que son heure pour reprendre sa place de leader et, même, devenir la locomotive de la fameuse coalition gouvernementale. En tout état de cause, il semble qu'il faille attendre quelques jours avant que l'annonce de la composante gouvernementale ne soit digérée par les uns et les autres. Ce n'est qu'à partir de ce moment que les manoeuvres reprendront et que la tendance générale se dessinera de nouveau avec la netteté voulue.