Le Parlement tunisien va-t-il donner raison à Habib Essid? Si, dans un premier temps, Habib Essid qui n'avait pas été informé de cette initiative par Beji Caïd Essebsi, s'était déclaré «prêt à la démission si l'intérêt du pays l'exigeait», il avait ensuite évoqué des «pressions» et prétendu que l'unique façon de le pousser vers la sortie consiste en un retrait de confiance exprimé par le Parlement. L'Assemblée des représentants du peuple (ARP), Parlement tunisien, était hier en conclave pour décider si oui ou non la confiance accordée au gouvernement Habib Essid serait renouvelée. Le Premier ministre dont le sort semblait scellé depuis l'annonce du 2 juin par le chef de l'Etat, Beji Caïd Essebsi, d'un projet de formation d'un gouvernement d'union nationale, une réponse opportune aux nombreuses critiques qui pleuvaient depuis de nombreux mois sur le cabinet Essid, incapable de répondre aux défis sécuritaires et surtout de relancer la mécanique économique gravement affectée par plusieurs attentats terroristes. Cette réunion de l'ARP constitue le point d'orgue d'un feuilleton qui aura agité le sérail politique tunisien depuis au moins trois mois, les partis de l'alliance gouvernementale ayant clairement manifesté, à l'instar de Nidaa Tounes et d'Ennahda leur intention de «soutenir la proposition du président Essebsi». La formation de Rached Ghanouchi avait même, lors de son congrès, laissé «fuiter» le nom de l'éventuel successeur de Habib Essid avant que d'autres contre-propositions n'émanent du camp de l'ancien parti majoritaire conduit, dans des conditions rocambolesques, par le fils du chef de l'Etat, Hafedh Caïd Essebsi. On se souvient que si, dans un premier temps, Habib Essid, qui n'avait pas été informé de cette initiative par Beji Caïd Essebsi, s'était déclaré «prêt à la démission si l'intérêt du pays l'exigeait», il avait ensuite évoqué des «pressions» et prétendu que l'unique façon de le pousser vers la sortie consiste en un retrait de confiance exprimé par le Parlement. Apparemment, ce qui fut dit est fait!En un an et demi d'activité, le gouvernement Essid a accumulé les constats d'échec et malgré le remaniement intervenu en janvier dernier, les Tunisiens conservent une opinion défavorable, eu égard à la situation du pays au double plan sécuritaire et socio-économique. La transition politique, tant vantée depuis 2011 et régulièrement saluée par les puissances occidentales ainsi que par la communauté internationale, ne s'est jamais accompagnée du soutien financier maintes fois promis par l'Union européenne, entre autres. Résultat des courses, c'est une économie affligée (0,8% de taux de croissance en 2015) par un chômage très élevé surtout chez les jeunes et les universitaires et par une insécurité qui a dramatiquement asséché la manne touristique. Il serait vraiment surprenant que le gouvernement Essid obtienne les 109 voix nécessaires à son aval, plusieurs partis dont les quatre qui constituent la coalition au pouvoir, lui ayant déjà retiré leur confiance depuis belle lurette. Des ténors de Nidaa Tounes et d'Ennahda ont violemment critiqué Essid et pris position contre son équipe gouvernementale au cours des derniers jours, lui reprochant d'avoir «fait descendre la Tunisie très bas». Pour le porte-parole d'Ennahda, Imed Hammami, «la prochaine étape nécessite des qualités spéciales, comme le courage et la capacité de prendre des décisions cruciales». Un avis partagé par le Front populaire, une coalition de gauche, qui souligne en outre que les partis au pouvoir ont formé «une équipe gouvernementale hétérogène et sans programme». Si le départ de Habib Essid ne fait aucun doute, en revanche le nom de son successeur fait l'objet de beaucoup de spéculations même si aucun nom ne fait encore l'unanimité. Quant aux ministres sortants, de farouches tractations ont d'ores et déjà commencé, en prévision de la future équipe gouvernementale.