C'est une tradition que leurs ancêtres leur ont léguée, qu'aucun ne peut délaisser Les 20.000 habitants du village Ighil Ouansar dans la commune de Mcisna se sont partagés équitablement 10 veaux sacrifiés à l'occasion de la fête du Mawlid Ennabawi. C'est la plus grande opération de solidarité et d'entraide qu'a connue cette année la région de Béjaïa. Hier il y en avait certainement d'autres mais celle-ci s'est signalée par son importance et la mobilisation qu'elle a suscitées auprès des villageois, qu'ils soient résidents ou travaillant ailleurs sous d'autres cieux. Ighil Ouantar, ce village connu jadis pour ses fabriques de selles est aujourd'hui La Mecque de la solidarité. »Louziaâ» ou encore «timechret», cette tradition ancestrale de solidarité destinée exclusivement à la prise en charge des pauvres est encore une fois renouvelée par les habitants du village d'Ighil Ouansar dans la commune de Mcisna, wilaya de Béjaïa. L'enjeu, qui est social, entre dans le cadre d'entraide et non pas communautaire, en célébrant ce rite de taille dans toute la Kabylie.L'organisation de «louziaâ» ou encore «timechret» est décidée suite à un consentement de tous les villageois à l'approche des différents rites religieux ou identitaires comme à l'occasion des fêtes amazighes de Yennayer et de Tafsut, ou des fêtes religieuses comme l'Aïd El Fitr et l'Aïd El Kébir, Taâchourt (Achoura) et le Mouloud, mariages ou circoncisions collectives, raconte ce villageois aux anges en présence de la presse. C'est une fête du partage. Tout le monde a droit à sa part de joie. Cette solidarité est un acte à la fois de foi et identitaire pratiqué depuis la nuit des temps. 10 veaux sont sacrifiés publiquement dans un climat empreint de joie et de fraternité sanctionné par le partage, à parts égales de la viande. C'est une tradition que leurs ancêtres leur ont léguée, qu'aucun ne peut délaisser. Pour les villageois, cette tradition symbolise beaucoup de valeurs sociales dont la solidarité, le pardon et la sensibilité et également les retrouvailles. Des villageois résidant ailleurs dans différentes régions se rencontrent et partagent ensemble ces moments de joie. Hier les villageois d'Ighil Ouansar ont poussé plus loin en associant les habitants des villages environnants invités eux aussi à prendre part et à savourer cette joie, question de renouer également avec les rapports de fraternité qui lient tous les habitants de tous les villages de la commune de Mcisna. Cette tradition, à classer en tant que patrimoine international à préserver, véhicule des valeurs communes de paix et d'entraide. Délaissée durant les années 1980, cédant la place à d'autres traditions qui ne sont nullement algériennes, cette manifestation redore son blason ces dernières années. Elle est revenue en force. Des jeunes et moins jeunes ont pris le relais après s'être concertés avec les vieux pour mieux étudier socialement cette tradition. A Ighil Ouansar dans la commune de Mcisna, ce fut par le biais de l'Association Tamellaht que cette tradition a été ressuscitée et célébrée pompeusement. Au retour de cette tradition, la première expérience a été lancée par les jeunes de l'association. Dans le sillage de cette action, six veaux ont été sacrifiés. Une année plus tard, les villageois ont reconduit le même projet en se lançant un défi pour venir à l'aide aux nécessiteux de toute la région en sacrifiant 10 veaux. Louziaâ est devenue un simple jeu de routine, notamment suite à la restructuration du village d'Ighil Ouansar en ressuscitant une autre tradition qui a failli disparaître, les chefs et notables du village appelés localement «Eloqqal taddart». C'était la fête, un moment de solidarité, de fraternité qui en appelle d'autres. A Ighil Ouantar et partout ailleurs en Kabylie, la naissance du Prophète (Qsssl) est une occasion de ressusciter les véritables valeurs de notre culture millénaire.