Dans les années 2000, j'avais évoqué l'arrivée impétueuse de la Chine et son intérêt grandissant pour l'Afrique, convaincu qu'en une décennie à peine, des bouleversements structurels et psychologiques viendraient métamorphoser en profondeur la relation non seulement politique, mais aussi et surtout économique, avec l'Empire du Milieu. De cette rencontre inéluctable entre l'éléphant africain et le dragon chinois devait forcément émerger une relation absolument inédite et un partenariat réellement gagnant-gagnant, comme aiment à dire les négociateurs. Aujourd'hui, les résultats sont là, de sorte que les pays occidentaux, longtemps persuadés que l'investissement de la Chine demeurerait marginal et sans grand danger pour leurs intérêts, ont poursuivi leur approche condescendante et leurs promesses sans lendemain de programmes de développement vite sacrifiés sur l'autel du commerce de brocantes. Bien loin du transfert de technologie, maintes et maintes fois vanté et promis, mais jamais concrétisé, ils ont fait de l'«aide» à la consommation un sacerdoce et contraint la majorité des pays du continent à une dépendance technologique et scientifique quasi totale. Ce n'est qu'avec les premiers partenariats engagés par Pékin dans plusieurs contrées africaines qu'on a vu naître un modèle pertinent de coopération mutuellement avantageux. Et là, les pays occidentaux, par le biais notamment de l'OMC ou de la Banque mondiale, ont crié au loup chinois, dénonçant avec une véhémence suspecte un prétendu surendettement des pays qui coopèrent avec les entreprises chinoises. Preuve que le danger devenait plus que perceptible, le président Xi Jinping ayant enclenché une dynamique encore plus volontariste avec les fameuses «Nouvelles routes de la soie». Pékin a multiplié, à cet égard, les séminaires et les journées d'études pour expliciter le plan et les ambitions de cette stratégie qui englobe aussi bien le continent africain que les régions du Moyen-Orient et de l'Europe, entre autres. Xi Jinping a dévoilé le sens et la dimension de cette stratégie en accueillant les 54 chefs d'Etat et de gouvernement africains à Pékin, dernièrement, et il a balayé les appréhensions soulevées par les organismes précités en matière de surendettement, promettant 60 milliards de dollars d'investissement, sous diverses formes. Il affichait ainsi la volonté de poursuivre l'action entreprise et de parfaire le cadre objectif de sa mise en oeuvre: «Nous respectons l'Afrique, nous aimons l'Afrique et nous soutenons l'Afrique», avait -il ainsi martelé, dans son discours d'ouverture, à l'antipode des propos désobligeants de certains chefs d'Etat occidentaux.Cette idylle entre une Chine appelée à devenir la première puissance mondiale et un continent sans cesse convoité pour ses richesses naturelles et une soif d'émancipation qui impacte les nouveaux enjeux stratégiques, ne pouvait laisser indifférent. Toujours est-il que la stratégie chinoise compte désormais s'appesantir sur la promotion de l'industrie, l'interconnexion des infrastructures, la facilitation du commerce, le développement vert, le renforcement des tic, la santé, les échanges humains et culturels et la paix et la sécurité, autant d'axes qui ouvrent la longue marche vers une communauté de destin longtemps attendue par des peuples en quête d'une authentique libération socio-économique.