D'ici à la prochaine rentrée scolaire, fixée à la première semaine d'octobre, les élèves et leurs enseignants auront consommé 7 longs mois de vacances forcées. Dans le lot, il y a bien entendu les élèves de quatrième année moyenne et de troisième année du lycée qui devront passer leurs examens de fin de cycle. Le ministère de l'Education nationale, qui a déjà ficelé l'agenda scolaire, a apporté les dernières retouches d'une année scolaire pas comme les autres (lire l'article de Mohamed Amrouni). Désormais, les parents d'élèves sont fixés sur l'avenir immédiat de leurs enfants scolarisés. Il restera, bien entendu, la question des classes de terminale avec le traditionnel stress qui entoure le plus déterminant des examens scolaires, à savoir le baccalauréat. L'Algérie qui organisera, cette année, un bac «au rabais», diront les plus «méchants», a donc préféré cette solution à celle préconisée ailleurs dans le monde. Ce qu'il faut retenir de la batterie de mesures mises en oeuvre par la tutelle, c'est la volonté de «passer comme on peut l'année scolaire 2019-2020», pour pouvoir se concentrer sur celle qui lui succédera. La prochaine ne sera pas aussi courte que «celle du Covid-19», mais se verra amputée d'un bon mois. Mais pour les pédagogues du ministère de l'Education nationale, qui luttent depuis des années pour faire admettre aux Algériens que la fin pédagogique d'une année scolaire est réglementairement fixée à la fin du mois de juin, pourront jouer sur «le retard d'allumage» pour rallonger la prochaine année scolaire jusqu'à ses limites légales. D'autant que pour l'ensemble des paliers, tout le troisième trimestre non étudié basculera sur la saison scolaire 2020-2021. Cela pour le double aspect pédagogique et organisationnel. Deux facteurs limitants de l'efficacité du système éducatif national. Il est entendu que l'école de la nouvelle République, qui représente l'un des chantiers majeurs du programme présidentiel, part handicapée par l'impact de la pandémie du coronavirus. Même si le gouvernement exclut l'Education nationale de l'effort de réduction des financements et autorise même les recrutements dans le corps des enseignants, la partie est très loin d'être gagnée pour un Exécutif, actuellement en butte aux mêmes forces idéologiques qui ont empêché l'épanouissement de l'école algérienne. Le président de la République, qui se veut globalement dans la continuité des réformes engagées depuis plusieurs années dans le sens de la promotion de la citoyenneté et la lutte contre l'idéologisation de l'institution éducative, mise énormément sur les éducateurs pour impulser une dynamique novatrice à l'Education nationale. Mais ces éducateurs, faut-il le souligner, sont «encadrés» par une multitude de syndicats qui ont déjà largement montré leur penchant pour la logique de l'affrontement, mais surtout, pour certains, des arrière-pensées idéologiques plus que manifestes. Même si, depuis l'entrée en vigueur du confinement, l'on ne les entend pas beaucoup, des syndicalistes fourbissent leurs «armes» et attendent le ministre de l'Education au tournant de la prochaine année scolaire. Ainsi, impactée comme tous les secteurs par le Covid-19, l'école a ceci de plus: la reprise risque d'être semée d'embûches. Et pour cause, personne ne peut prévoir le ton du dialogue social à la rentrée des classes et il sera visiblement très difficile de prétendre engager une réforme profonde, sachant le poids que fait peser le courant islamiste sur le comportement d'une bonne partie des enseignants. La bataille n'est certainement pas perdue d'avance, mais il est utile de signaler que l'ancienne ministre de l'Education nationale, Mme Benghebrit, s'y est essayée et a dû faire face à une levée de boucliers sans précédent de la part de toutes les représentations politiques, intellectuelles et associatives du courant islamiste. En effet, des partis comme le MSP de Makri et Adala de Djaballah, des associations comme celle des Uléma et certaines figures de l'islamisme radical et modéré s'étaient autoproclamées propriétaires de l'école algérienne et dénié au gouvernement le droit d'apporter la moindre réforme au système éducatif national. Après la parenthèse du Hirak et du Covid-19, l'actuel ministre de l'Education nationale saura-t-il faire avancer le bateau?