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Aux racines de Djanet
Voyage au cœur du Tassili N'Ajjer
Publié dans L'Expression le 31 - 08 - 2024

«Aman, iman», dit un proverbe targui, «l'eau, c'est la vie». Une eau qui a donné naissance à cette perle du Tassili. Plonger dans les racines des populations oasiennes de Djanet n'est pas une mince affaire. L'expérience est, cependant, excitante.
Le brassage de groupes humains, notamment subsahariens et négro-africains, a donné naissance à un métissage qu'unit une aire linguistique commune sur laquelle les frontières n'ont pas de prise. Une aventure humaine. Du nord au sud, la population de Djanet est répartie sur trois ksour. Au nord, Azellouaz et les maisons alentour, se dressant sur un piton rocheux. Plus au sud, sur la rive gauche de l'oued, El Mihan, petite Casbah avec son dédale de ruelles et son vieux quartier en ruine accrochée désespérément à une éminence rocheuse comme pour porter à la face du monde des millénaires d'histoire. Sur la rive droite, Adjahil, lui faisant face, étire au pied de la falaise ses maisons entourées de verdure. Les retenues d'eau et gueltas partent toutes de ce village.
Les sources qui jaillissent au pied de la falaise à l'ouest de la palmeraie sont à l'origine de l'oasis. Elles étaient fort nombreuses. Le sud de la palmeraie se trouve dominé par un vaste plateau de grès reposant sur une couche argileuse. Cette importante masse gréseuse collecte les eaux de pluie et absorbe l'humidité atmosphérique qui glisse sur la couche imperméable, puis se répand en petites sources très pures. Cette eau est redistribuée par des canaux, puis recueillie dans des bassins d'arrosage. Aujourd'hui, les motopompes à eau ont pris le pas sur ces systèmes d'irrigation et de récolte traditionnels. Des puits de plus en plus nombreux sont creusés pour pallier des sécheresses qui peuvent durer plusieurs années. La palmeraie de Djanet s'étend sur environ cinq kilomètres dans le lit de l'oued Idjeriou, qui sinue de direction nord-sud, sur plus de 10km, vers In Debiren, pour se perdre dans l'immensité de l'erg Admer.
L'émeraude des Garamantes, mythe ou réalité?
D'Iffaq et d'Amedjni à Timziredj, d'amont en aval de l'oued Idjeriou, les trois villages de Djanet se partagent les milliers de palmiers et les jardins de l'oasis (23 120 palmiers en 1944) plus du double aujourd'hui. Cette immense émeraude semble être peinte sur fond de sable blond bordée de falaises de grès rose serti de noir. Un tableau qui sied si bien à un peuple aux origines fascinantes.
L'histoire des Touareg, décrits comme des cavaliers aux moeurs guerrières, a toujours été liée aux razzias. Cette vision réductrice d'un peuple peut travestir la genèse de toute une civilisation.
Les récits de voyage ont été d'un grand apport dans l'historiographie antique. Ces témoignages renvoyant à un passé lointain peuvent ne pas paraître précis, néanmoins utiles, leur interprétation peut ne pas faire l'unanimité chez les historiens. Vers 527, Hérodote rapporte qu'une révolte des Libyens, nom attribué par les Grecs à tous les peuples d'Afrique du Nord, sous le règne de Bebu (3e dynastie) aurait mis à mal l'intégrité de l'empire des Pharaons. Bien après, Ramsès II a dû repousser les insurgés vers le désert occidental et les réduisit en esclavage pour les offrir à Ammon et à la déesse Mout. Ces faits établissent, en fait des contacts entre l'Egypte pharaonique et les anciens Libyens. Ce qui peut nous faire croire qu'il pourrait s'agir de Touareg.
Le pays des Ajjers, qui a de tout temps connu les invasions et les migrations, aurait été soumis à une tribu voisine occupant le Fezzan actuel.
Il semble probable que les légions de Septimus Flaccus et de Julius Meternus, alliées à Mersys, roi des Garamantes, soient parvenues à l'oasis de Djanet.
Le Fezzan du sud libyen a été pendant longtemps le point de convergence de différentes migrations au point d'y rattacher celle des Garamantes qui, selon une historiographie récente, établirait un lien avec les Touareg actuels. Chassés des bords du Nil durant la 18e dynastie, ils se seraient fixés au Fezzan. D'après Hérodote, les Garamantes chassaient en char à quatre roues et leur émeraude était célèbre à Rome. Ils seraient aussi des creuseurs de foggaras, des constructeurs de bazinas, tombeaux de pierres que l'on rencontre au Tassili et qui recèlent un grand culte des morts. Selon Théodore Monod (naturaliste et savant français), l'histoire de l'émeraude des Garamantes mentionnée par les auteurs de l'Antiquité ne serait qu'une légende. Evoquer ce trésor caché au fond du Sahara, où continue d'errer la silhouette d'Antinéa, est si tentant, nous avait-il signalé.
La réalité serait moins romanesque. Toujours selon Théodore Monod, cette pierre verte, même portée par un pharaon, n'est pas nécessairement de l'émeraude, espèce minérale décrite avec précision, elle n'aurait fait son entrée que tardivement en Egypte. À partir des Plométées, trop dure pour être taillée, elle était portée sous forme de cristaux naturels. Les «émeraudes» citées par les archéologues dans des bijoux de l'Egypte pharaonique seraient une variété de microline de l'amazonite.
Les auteurs anciens n'auraient pas fait référence à des émeraudes sahariennes, mais seulement à des pierres différentes: calcédoine, jaspe... Monod fait remonter l'origine du mythe à Duveyrier qui, en 1864, se mit à citer «l'ancienne émeraude garamantique des musées». Duveyrier, érudit et sérieux, aurait commis un lapsus!
Le mythe prenant corps, la seconde mission Flatters vient conforter la légende, en annonçant en 1881, le 6 février, avoir découvert au Sahara central des «émeraudes» dont certaines seraient aussi grosses qu'un oeuf.
En 1920, E.Hultreger, colon suisse, organisa deux missions, dont une confiée à Conrad Kitian, et part à la chasse au trésor. Théodore Monod, qui s'est rendu sur le site de la mission Flatters, affirme, que non seulement il n'a pas trouvé de traces d'émeraude, mais pas même de traces de minéral vert, qui peuvent expliquer une quelconque confusion. L'émeraude des Garamantes ayant acquis droit de cité, elle continuera d'alimenter les rêves exaltés.
De l'islam à l'occupation française
Au IXe siècle, les Touareg islamisés se placent sous l'autorité des imanans, sultans qui se donnent pour origine la branche de Saguiet El Hamra de Moulay Driss et Moulay Aloui descendants de Sidna Ali. La légende raconte que ces sultans, qu'une malédiction frappait, ne dépassaient jamais en nombre 7 hommes en âge de porter les armes. Sur le point de s'éteindre, ces «Imanians» (les «rois morts») virent leur dernier survivant donner naissance à une lignée mâle. Miracle! D'où le nom d'«imanan» qui signifie «ressuscités». Leur règne fut ponctué de guerres inutiles. Leurs sujets mécontents provoquèrent des débuts de révolte. Vers la moitié du XVIe siècle, le sultan Goma, considéré comme le fondateur du village d'Azzelouag, procéda à un partage des terres entre femmes touarègues de descendance noble. Cela avait pour but d'éviter que les mâles par leurs alliances avec des tribus étrangères ne transmettent leurs biens. Ainsi, était instaurée cette forme de matrilocalité et d'héritage transmis par la mère qui peut se vérifier encore aujourd'hui.
La tyrannie qu'exerçait Goma n'a cependant diminué en rien. La réaction ne se fit pas attendre. Il fut assassiné par un noble Ajjer, Biska, de la tribu des Oraghen.
Le rocher sur lequel il fut exécuté est encore visible aujourd'hui, à Azzelouaz. Originaires du Fezzan et de Ghat, les Oraghen s'installèrent d'abord au Soudan puis au pays Ajjer vers le XVIe siècle. Mohamed Ag Tinaberkas, dont la mère était originaire du Niger, vint au secours de ses frères des Ajjers et mit fin au règne des imanan. Une rivalité entre les deux groupes prit naissance. C'est de cette époque-là que daterait la distinction entre Touareg de l'Ahaggar et ceux des Ajjers. Dès 1899, la nécessité d'unifier l'empire nord-africain à certaines autres possessions de l'Afrique, dont le Niger, rendait indispensable l'occupation des Ajjers par la France.
L'occupation de l'oasis de Djanet par les militaires français, le 29 novembre 1911, se fit sous le commandement du capitaine Charlet. Les militaires français durent farouchement batailler contre Cheikh Amoud (ancêtre du chanteur Bali) pour s'imposer. Vers 1920, le pays retrouva quelque peu son calme.
Le fameux combat de l'Assakao, à une cinquantaine de kilomètres au nord-ouest de Djanet, reste cependant gravé dans toutes les mémoires. Des mémoires façonnées au gré des migrations humaines. Descendants de captifs, tributaires (imghadh), militaires, tous ont participé à l'émergence d'un groupe social si particulier. Ouvert et généreux, il se régénéra de façon remarquable. Des liens de parenté se sont tissés pour donner naissance à une entité sociologique attestée. Des histoires qui seront racontées un jour comme des légendes.


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