Le club londonien est riche, mais il lui manque le trophée européen. Entré dans la cour des grands sur le plan financier depuis qu'il a déménagé à l'Emirates Stadium, Arsenal a l'occasion de démontrer ce soir en Ligue des Champions contre l'AC Milan qu'il appartient désormais aussi au gotha européen pour ce qui est du statut sportif. Selon l'étude annuelle du classement des clubs ayant généré le plus de revenus, Arsenal est désormais cinquième avec 263,9 millions d'euros au cours de la saison 2006/07, soit plus de deux fois et demi la somme de l'année 2000. Le club londonien a gagné quatre places en un an, la plus forte progression continentale malgré un parcours en Ligue des Champions interrompu dès les huitièmes. «Le déménagement d'Arsenal à l'Emirates Stadium a transformé ses revenus», analyse Dan Jones, l'auteur de l'étude chez Deloitte. La saison 2006/07 a été la première disputée par les Gunners dans leur nouveau stade. Cette réussite signe le triomphe économique de son entraîneur français, Arsène Wenger, avocat et architecte du départ du vieil Highbury, malgré des résistances au sein même des instances dirigeantes de ce club traditionaliste. Son seul regret pourrait être de n'avoir pas bâti une enceinte encore plus grande. Vendues à prix d'or, les 60.000 places trouvent preneurs à chaque rencontre. Le club des ouvriers et employés du nord de Londres est devenu celui des yuppies, des professions libérales et des entreprises, qui présentent l'avantage d'avoir un portefeuille mieux garni. Preuve de cet engouement, pour espérer voir ses favoris, un supporter non abonné doit désormais payer un droit d'entrée avant de prétendre pouvoir acheter une place... Si la construction du stade a laissé Arsenal lourdement endetté (260 millions de livres, 350 millions d'euros), le bénéfice dégagé l'an passé (73,5 millions d'euros) permet largement d'en assumer le service. Le contrat pharaonique sur les droits de télévision du championnat d'Angleterre, entré en vigueur en début de saison, promet un avenir encore plus radieux. Tout comme la popularité croissante du club en Asie, à laquelle il a répondu en ouvrant des sites Internet en coréen, en chinois et en thaï où ses produits dérivés sont vendus. Avant de savoir que son équipe caracolerait en tête du championnat d'Angleterre, son directeur financier Keith Edelman avait promis à l'automne une enveloppe de recrutement de 110 millions d'euros à Wenger pour les marchés d'hiver et d'été. Le Français n'a toujours pas entamé ce trésor de guerre. Au classement Deloitte, Arsenal devance désormais son adversaire des 8es de finale, l'AC Milan, pourtant vainqueur de la dernière édition de la C1. Mais Wenger sait que personne ne s'aviserait de prétendre que son club est devenu plus grand que l'institution lombarde. Une Coupe de l'UEFA et une Coupe des Coupes ne pèsent pas lourd au regard des sept C1 remportées par les «rossoneri». La finale 2006, logiquement perdue face à Barcelone, est encore perçue comme un glorieux accident dans une compétition où Arsenal a dû, par le passé, se contenter de deux quarts (2001, 2004). L'image du club dépend en partie de son choc avec l'AC Milan. Une défaite et il sera ramené au rang de nouveau riche impudent, giflé par un véritable aristocrate. Une victoire face au club le plus titré du continent derrière le Real, et il pourra envisager de poser sa candidature au Gotha.
