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«Les régimes arabes sont politiquement dépendants des USA»
KARIM EMILE BITAR, CHERCHEUR À L'IRIS, À L'EXPRESSION
Publié dans L'Expression le 12 - 01 - 2009

«Hosni Moubarak ne peut prendre de décisions importantes sans en référer à Washington
Diplômé de sciences politiques de Paris et ancien élève de Harvard et de l'ENA, Karim Emile Bitar, fils de feu l'ancien ministre libanais, le professeur Emile Bitar, préside aujourd'hui le KB Consulting Group et est chercheur (cabinet de conseil en stratégie, communication et affaires publiques). Il a également suivi des études de droit, d'économie, d'histoire et de relations internationales à la Sorbonne et aux universités McGill et Harvard. Il est chercheur associé à l'Institut de relations internationales et stratégiques (IRIS). Il a dirigé l'ouvrage collectif Regards sur la France, (Seuil, 2007), ouvrage qui comprend des entretiens avec Boutros Boutros-Ghali, Vaclav Havel, Mohammed Arkoun, Edward Said, Daniel Barenboim, Bronislaw Geremek et une vingtaine d'autres personnalités internationales.
M.Bitar estime que la décision d'Israël d'interrompre ses bombardements sur Ghaza, trois heures par jour, est une stratégie militaire qui permettra à l'armée israélienne de se «réorganiser avant de poursuivre sa besogne». Ce chercheur de l'Iris revient, dans cet entretien, sur la position statique de l'Egypte qui reste, selon lui, dépendante de l'aide militaire et économique américaine. Et que Hosni Moubarak «ne peut prendre de décisions importantes sans en référer à Washington».
L'Expression: Israël a décidé d'interrompre quotidiennement, depuis mercredi dernier, ses bombardements sur Ghaza durant trois heures. Quelle lecture faites-vous de cette trêve inédite?
Karim Emile Bitar: Comme le soulignait avant-hier la représentante du Comité international de la Croix-Rouge, cette guerre a ceci d'inédit et de particulièrement tragique, que les populations civiles qui en sont les victimes n'ont même pas la possibilité de fuir. En effet, les bombardements touchent toute la bande de Ghaza. Israël soumet Ghaza à un blocus total depuis plus de seize mois. Blocus qui, il faut le rappeler, est considéré par le droit international comme un «casus belli». Dans ces conditions, une trêve quotidienne de trois heures est bien le strict minimum pour permettre aux mouvements humanitaires d'apporter un peu de soutien à une population traumatisée. D'un point de vue stratégique, les armées, même les plus puissantes, ont besoin de ce type de cessez-le-feu temporaire pour se réorganiser avant de poursuivre leur besogne.
Plus de 850 morts dont 235 enfants ont été victimes des bombardements de l'armée israélienne. Que veut-elle signifier par de tels actes? Pourquoi, à votre avis, Israël a-t-il cette liberté d'agir dans l'impunité?
Après son incapacité à venir à bout du Hezbollah durant la guerre de juillet 2006, Israël souhaite réaffirmer son «pouvoir de dissuasion». Aussi étrange que cela puisse paraître, aux yeux des dirigeants israéliens, pareils bombardements permettent de «restaurer le moral de la population», en démontrant à nouveau l'impressionnante force de frappe militaire de l'armée israélienne, dont l'image avait été très écornée. Par ailleurs, le courageux historien israélien, Tom Segev, a visé juste lorsqu'il a estimé que cette guerre visait à «mater» les Palestiniens, à leur «donner une leçon», en fonction de cette vieille idée raciste selon laquelle «les Arabes ne comprennent que la force» et qu'il faut les cogner jusqu'à ce qu'ils changent de comportement. Or, la grande philosophe Hannah Arendt avait, quant à elle, souligné: «Il n'y a qu'une chose que les Arabes ne comprennent pas, c'est la force.» On retrouve chez les dirigeants militaires israéliens d'aujourd'hui, la mentalité de Massu et de Bigeard. Quant aux raisons qui font qu'Israël bénéficie toujours d'une impunité, elles sont nombreuses. Elles sont essentiellement liées à la relation privilégiée entre Israël et les Etats-Unis, et au droit de veto dont disposent les Etats-Unis au Conseil de sécurité des Nations unies. La «communauté internationale» se permet parfois quelques remontrances verbales mais n'a jamais imposé à Israël de respecter les résolutions de l'ONU, notamment celles qui exigent la restitution des territoires occupés. Israël a, en outre, bénéficié du contexte de «guerre globale contre le terrorisme» qui lui a permis de «noyer le poisson». Israël s'efforce de faire oublier aux Occidentaux qu'il s'agit d'un conflit territorial lié à l'occupation, et de noyer cela dans l'affrontement supposé entre l'Occident et l'Islam. Il faut, par ailleurs, souligner que les Palestiniens et les Arabes en général ont été, à ce jour, incapables de mener une véritable campagne d'information en Occident, et de sensibiliser l'opinion américaine. Il faut prendre conscience que la bataille se joue désormais au coeur de la société américaine, et que la résistance doit aussi être intellectuelle, culturelle, médiatique et sociale. Contrairement à ce que pensait Arafat, il ne suffit pas de dialoguer avec la Maison-Blanche, il faut mobiliser la société civile américaine et l'opinion publique.
Israël affirme vouloir «éradiquer» le Hamas de la bande de Ghaza. A votre avis cela est-il possible? Ne croyez-vous pas que nous allons assister à une radicalisation encore plus forte des partisans du Hamas?
Le Hamas va sûrement subir de très lourdes pertes au niveau de ses cadres et de ses infrastructures. Il sortira militairement très affaibli, mais il pourra néanmoins revendiquer une victoire politique symbolique en raison justement des objectifs trop ambitieux annoncés par Israël. L'objectif d'éradiquer le Hamas est bien évidemment illusoire. Le Hamas, comme le Hezbollah, sont des mouvements issus de la population locale, avec laquelle ils font corps. Par ailleurs, l'affaiblissement politique du Fatah sera au moins aussi grand que l'affaiblissement militaire du Hamas.
C'est à partir du Caire qu'a été annoncée l'attaque contre Ghaza et c'est au Caire que les ballets diplomatiques se poursuivent pour arrêter les massacres. Quelle lecture faites-vous de cela?
Le régime égyptien est dans une position très inconfortable, ballotté entre son opinion publique révoltée et son souhait de respecter les accords de paix signés avec Israël. Il faut se souvenir que les Frères musulmans sont la principale force d'opposition en Egypte, et que le Hamas est, à l'origine, la branche palestinienne des Frères musulmans.
Le régime de Hosni Moubarak est, par ailleurs, extrêmement dépendant de l'aide militaire et économique américaine (soutien qui dépasse les 2 milliards de dollars annuels). Moubarak ne peut prendre de décisions importantes sans en référer à Washington.
Et les régimes arabes dans toute cette histoire sanglante?
La plupart d'entre eux sont confrontés au même dilemme: les régimes sont politiquement dépendants des Etats-Unis et les opinions publiques bouillent.
La monarchie jordanienne est dans une position particulièrement inconfortable.
Leurs condamnations ne peuvent être que verbales et certains régimes prêteront même le flanc à des accusations de complicité, puisque leurs opposants ne comprennent pas leur inaction.
L'administration américaine affiche son soutien direct à Israël. Cette attitude ne vous rappelle pas celle adoptée lors des bombardements du Liban en 2006?
En effet, en juillet 2006, l'administration Bush avait alors attendu trois semaines et plus de 1000 victimes civiles avant de réclamer un cessez-le-feu.
Le silence de la «communauté internationale» et l'impuissance des régimes arabes me rappellent aussi les invasions israéliennes du Liban en 1982 et en 1996. Comme disait Tocqueville: «L'histoire est une galerie de tableaux où il y a peu d'originaux et beaucoup de copies.» C'est ce sentiment de déjà-vu qui renforce la lassitude et l'écoeurement des observateurs et surtout des victimes.
Comment d'après vous la paix peut-elle être instaurée?
Il est clair que les Accords d'Oslo sont dans l'impasse. Ces accords avaient été mal négociés. Les négociateurs palestiniens ne disposaient même pas de cartes géographiques et négociaient dans une langue anglaise qu'ils maîtrisaient très mal! Ils n'ont obtenu aucune garantie quant à l'arrêt de la colonisation et aucun calendrier quant au retrait de l'armée israélienne des territoires occupés. Il y avait à l'époque 130.000 colons en Cisjordanie. Il y en a aujourd'hui plus de 280.000. Il y a également aujourd'hui près de 200.000 colons israéliens à Jérusalem-Est. Dans ces conditions, on voit mal comment l'Etat palestinien qu'on nous promet pourrait être viable, puisqu'il est découpé en tranches. Il faut donc repenser radicalement le «processus de paix», en prenant en compte deux réalités indéniables: l'imbrication des populations israélienne et palestinienne, et l'impossibilité d'une solution militaire. Il ne pourra y avoir de paix sans une reconnaissance par Israël de la légitimité des aspirations nationales palestiniennes. Il faudra également que les Arabes comprennent l'histoire tragique du peuple juif et comprennent que les Israéliens sont, à tort ou à raison, persuadés que pèse toujours sur eux une menace existentielle. Compte tenu du déséquilibre des forces, les Arabes ont de la difficulté à admettre que les Israéliens, eux aussi, vivent dans l'angoisse.
Pourtant, en raison des traumatismes liés à leur histoire, les Israéliens sont eux aussi confrontés à une peur existentielle, et il incombera aux Arabes et aux musulmans de les aider à la surmonter. Et les fanfaronnades et déclarations sottes de M.Ahmadinejad sont le parfait exemple de ce qu'il ne faut absolument pas faire.


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