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Les mains ont la mémoire courte
RIEN QU'UNE EMPREINTE DIGITALE DE MOURAD BRAHIMI
Publié dans L'Expression le 26 - 05 - 2010

«L'immense parc de matériel qui a servi à la construction de la Nouvelle-Ville a complètement disparu!»
Le sujet est posé: clair et net; la convocation envoyée; l'arrestation du suspect effectuée. Est-ce le début d'un roman policier? Ça y ressemble, et c'est même plus que ça, car un innocent paie pour quelque chose qu'il n'a pas commis... Dans Rien qu'une empreinte digitale (*), Mourad Brahimi nous retrace l'histoire d'un arbitraire dont il a été la victime. Né le 15 mai 1955 à Tlemcen, l'auteur est diplômé de l'Ecole Nationale d'Administration, ancien directeur général de l'Office de Gestion et de Promotion Immobilière et «l'année des faits, il était Chef de Daïra dans la wilaya de Médéa».
L'intérêt de ce court récit ne réside pas dans la recherche de la vérité, car, dans ce cas précis, comme dans d'autres d'ailleurs, il appartient à la justice d'en décider. Mais «l'aventure», avec ses tenants et ses aboutissants - et, tout compte fait, «la chose» attire l'attention par le fait de son caractère universel -, trouble le citoyen paisible.
L'auteur aurait pu commencer sa narration ainsi: «Comme chaque lundi matin, un amoncellement de dossiers dissimule le tribunal. Une main émerge, saisit la première liasse de papier, et la voix du président, comme chaque lundi matin, donne le programme, annonce les rôles. Les personnages s'avancent, se présentent, racontent des aventures effroyables qui tiennent le public en émoi, le plongeant dans un univers de vol, de violence, et d'innocence. Si la prison est un asile de fous, le tribunal en est le cabinet de psychiatrie, le divan du psychanalyste. Les patients dévoilent des vies saccagées, des destins brisés, ravagés; le praticien écoute les confessions, extirpe les aveux, pénètre le tréfonds de l'âme, et prescrit invariablement, quelle que soit la gravité du mal, la profondeur du désarroi, le même traitement, la même thérapie. Seule, la durée change: ´´Un an, cinq ans, dix ans...´´»
Un homme est surpris par la jalousie et pris dans un piège. Mourad, autrefois directeur général d'une grande entreprise de gestion immobilière, est accusé de prévarication. Il est arrêté, emprisonné et jugé. L'auteur, dans une langue simple, émouvante et sur un ton crédible, retrace son cauchemar. Oubliés «les parfums d'armoise et de thym [...] qui mènent vers l'inconnu.», perdus «ce matin de printemps [...] l'haleine fraîche des roses, l'arôme du café, les senteurs tièdes qui se répandent de maison en maison...» Le charme est brusquement rompu: l'arrestation est réelle, la terreur aussi.
Le fait est annoncé avec la plus grande des violences, son ami Hamid lui apprend: «Tu ne vas pas en revenir! À l'Office de Promotion et de Gestion Immobilière, ils ont tout volé, tout pris, rien laissé! Tout le matériel de l'Office a été détourné, une valeur de six milliards!» Ce n'est hélas pas une plaisanterie puisque, de son côté, «L'officier de police triomphait: ´´Vous avez ruiné le pays, tout volé, rien laissé, et vous voulez une cigarette en prime!´´» Peu importe, il faut maintenant comprendre la cause, la décrire, l'analyser et en tirer les conséquences pour soi et pour les autres, les innocents, - il y a tant d'innocents. La narration est méticuleuse, aussi forte qu'un scrupule. L'auteur s'interroge et n'a aucune réponse. Comment la «chose» s'est-elle produite? Par qui? Pourquoi? Les détails sur l'incarcération foisonnent: «une cage pour bêtes féroces», la rumeur et l'erreur, la nostalgie de la fête organisée pour la finale de la coupe d'Algérie, solidarité entre les détenus, l'intervention de la presse, grève de la faim, «le silence du tombeau», «la découverte de nouveaux personnages», et des jeunes, oui, des jeunes d'une étonnante conscience citoyenne, la ronde des avocats et enfin «la salle d'audience...». Toute justification est mise en contradiction. Une simple empreinte digitale, un indice capital, quelque part a ruiné une vie humaine. Tous les stades, les cinq, qui mènent au procès se succèdent et terrifient: «La convocation»; «Dans un asile de fous»; «L'isolement»; «Une histoire de délais»; «Le procès».
La narration se termine ainsi:
«... Juste au moment où il me semblait entendre mon nom, un tonnerre d'applaudissements vint emporter la voix presque inaudible du président et soulever la salle. Entraîné par ce mouvement d'ensemble je me retrouve debout, les yeux sur ces mains qui me trahissent, le dos tourné au public, de peur qu'il ne les voie. Les mains ont la mémoire courte. C'est en ces lieux qu'on les a entravées, qu'on les a emprisonnées, qu'on s'est acharné à leur refuser la liberté, mais elles oublient déjà, et, sans que je comprenne pourquoi, me désobéissent et applaudissent. ´´Ils sont courageux! Ils sont courageux!´´ ne cesse de répéter une voix derrière moi pendant qu'un avocat se fraie un chemin jusqu'au box des accusés: ´´Ce n'est rien. Ce n'est que de l'émotion.´´ Instinctivement je me retourne, regarde en direction de ma femme et ne la trouve pas; je crus que la foule, debout, m'empêchait de la voir, mais je comprendrai, bien plus tard, qu'habituée à n'entendre dans ces lieux que l'annonce de nouveaux malheurs, au premier mot du jugement elle perdit connaissance, et ne sut qu'à son réveil que par ´´Hakamet El Mahkama ´´ le tribunal mettait fin à une longue nuit de cauchemar. À ces mots, le procureur se redresse; sa robe noire l'enveloppe comme la nuit et l'entraîne dans l'obscur enchevêtrement des couloirs d'où nous parviendra l'écho de son effroyable appel; et pendant que tout le monde se réjouissait de le voir finir, le cauchemar ne faisait que revenir.»
Le cauchemar est alors un souvenir ancré dans la mémoire: une souffrance impossible à soulager, permanente. Souffrir passe, avoir souffert ne passe pas, et d'autant que la souffrance est bien au-dessus de la condition de l'homme. D'autre part, je pense que beaucoup comme moi auront noté agréablement, tout au long du récit, la grande et pudique tendresse de l'auteur pour son épouse...Rien qu'une empreinte digitale de Mourad Brahimi est une double leçon de morale et de civisme pour dénoncer la pollution de la vérité et prévenir des limites de l'information donnée par l'empreinte digitale; c'est aussi un plaidoyer pour une Justice, celle de la sauvegarde de l'Algérie. Au reste, «l'affaire» ne serait pas unique; ce n'est ni la première fois ni la dernière, hélas, hélas, hélas..
(*) Rien qu'une empreinte digitale de Mourad Brahimi, Casbah Editions, Alger, 2009, 143 pages.


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