La vie de Omar, ce jeune chômeur, a basculé en quelques secondes. Six mois après le drame qu'il a vécu, Omar Slimana rompt le silence. Kidnappé le 14 novembre 2010 et libéré après une semaine de séquestration, il livre un témoignage fracassant sur cet acte terroriste qui a coûté la vie à son cousin Hend dit «Hidouche». La vie de Omar, ce jeune chômeur, a basculé en quelques secondes. Alors que les deux hommes rentraient au village après un dîner avec des amis à Azazga, seulement à 4 kilomètres, du chef-lieu de la commune d'Aghribs, ils ont été interceptés par les kidnappeurs. «Je n'ai pas encore fini de traverser la forêt de Bouhlalou lorsque, au détour d'un virage, je vois surgir dans la nuit des individus encagoulés et armés de kalachnikovs. Deux hommes pointent vers nous un puissant projecteur qui m'a aveuglé. Je ne sais pas comment je me suis trouvé à l'arrêt», raconte Omar qui a vite compris qu'il s'agissait d'un faux barrage. «Les hommes armés nous ont immobilisés sur le côté droit de la chaussée. Sous la menace des armes, ils nous ont obligés de sortir du véhicule, on s'est laissé faire sans protester», a-t-il indiqué. Sur place, Omar a été tabassé à coups de poings et à coups de crosse sur le visage. D'ailleurs, il garde toujours une mâchoire fracturée. Un autre, parmi ces braqueurs pointe son arme sur Hidouche, tire et lui perfore l'abdomen. «Une rafale déchire le silence de la nuit et j'ai vu Hidouche gisant par terre, baignant dans le sang. Tandis qu'il est laissé pour mort, on m'a ligoté avec une chaîne en fer et jeté sur la banquette arrière du véhicule», a-t-il poursuivi. Deux individus se sont mis à l'arrière du véhicule avec lui tandis qu'un autre qui s'est mis au volant, démarre en trombe. Le véhicule a pris le chemin du village de Tala Tgana avant de bifurquer vers El Qahra puis Tamda, à une vingtaine de kilomètre, au nord de la wilaya de Tizi Oouzou. C'est non loin de Tamda que les trois hommes armés abandonnent le 4x4 de Hidouche. Ils emmènent Omar qu'ils placent dans la malle d'un autre véhicule, vers une destination inconnue. Terrassé par la peur et la douleur des coups reçus, Omar n'a rien pu voir dans l'obscurité. «On m'a séquestré dans une maison très ancienne. Elle ressemble à une cave. On m'a placé dans une pièce noire et froide. Ils m'ont attaché avec une chaîne en fer et m'ont couvert les yeux», se rappelle Omar. «Mes kidnappeurs semblaient être très nombreux. De temps à autre, l'un d'entre eux encagoulé, vient m'apporter à manger ou me dire ce qui se passait dehors», a-t-il précisé. Le village de la victime et la région entière se sont mobilisés pour sa libération. Omar n'a pas encore donné de nouvelles, ses ravisseurs non plus. Hidouche, qui a succombé à ses blessures deux jours plus tard, est enterré alors que Omar demeure toujours en captivité. Des dizaines de milliers de personnes sont venues témoigner leur solidarité à la famille Slimana. Omar ne savait pas grand-chose de ce qui se passait vraiment dehors. Mais ses ravisseurs l'ont mis au courant de tout ce qui se déroulait. L'un des kidnappeurs s'est rendu au cimetière le jour de l'enterrement de Hend Slimana. Il a même rendu visite à la famille de Omar qui était alors toujours kidnappé. «J'ai vu ton fils. je suis rentré chez toi pour signifier ma solidarité à ta maman pour ce qu'elle endure», a raconté d'un ton sarcastique l'un des ravisseurs. «Durant toute une semaine, je n'ai rien mangé. J'ai pris 4 verres d'eau, C'est tout... et j'attendais qu'on vienne me tuer. C'était le seul sens que je donnais à mon existence dans ce climat de terreur», a indiqué Omar. Après une semaine, face à la mobilisation citoyenne de toute la Kabylie, les ravisseurs cèdent. «Il m'ont relâché au milieu de la nuit non loin de Mekla. J'ai couru comme un fou. j'ai traversé une oliveraie et je suis tombé sur un groupe de jeunes qui m'ont donné un téléphone portable pour pouvoir appeler mon frère», se souvient Omar les larmes aux yeux. «Tout le temps que j'ai passé en captivité, la seule image qui n'a jamais quitté mon esprit est celle de Hidouche. je voulais mourir à l'idée qu'il soit mort assassiné», a-t-il conclu avec amertume.