La distribution du médicament fait subitement l´objet d´une attention particulière ces jours-ci. Partant de la décision du gouvernement d´écarter les distributeurs de médicaments importés de l´écoulement de la production nationale, les cris d´effroi et discours annonçant l´apocalypse se succèdent. Devant cette levée de boucliers le Syndicat national des pharmaciens d´officine (Snapo) garde la tête froide et applaudit la mesure. Et pour cause! Pour bien comprendre les tenants et aboutissants des uns et des autres, il faut défricher le terrain, la visibilité n´en sera que meilleure. Chacun sait que tous les opérateurs doivent déposer au ministère de la Santé, pour agrément, leur programme annuel d´importation des médicaments avant l´entame de l´année concernée. Tout le monde a entendu le ministre de la Santé, M.Ould Abbès, dire que l´Algérie a importé en 2009 pour 2 milliards de dollars de médicaments. En clair, cela veut dire qu´il a fallu débourser cette somme pour couvrir le programme annuel présenté par les importateurs. Première question élémentaire: comment une quantité de médicaments prévus jusqu´à la fin de l´année peut-elle «disparaître» à mi-chemin? Vous l´aurez compris, il est question ici des pénuries signalées récemment. La réponse nous est donnée par M.Messaoud Belambri, président de la Snapo, dans notre édition du 24 août dernier: «La spéculation prédomine largement le marché du médicament. En plus du diktat des lobbies, de la mafia et d´exclusivités, nous subissons comme pour n´importe quel produit banal, des rétentions de stocks et des ventes concomitantes» dit-il sans détours. Le noeud gordien de la disponibilité du médicament se trouve incontestablement dans sa distribution. Ce métier-là souffre chez nous de plusieurs maux. Il y a un déficit de savoir-faire. Le souci du gain facile. Les travers du monopole et autres magouilles au profit des plus offrants parmi les producteurs. C´est là que se comprend mieux la décision du gouvernement. La production nationale a toutes les chances d´être «cassée» par sa cohabitation avec l´importation. Ceci sur un plan purement commercial. L´aspect subversif peut exister aussi quand on sait que le médicament est un produit hautement stratégique. Prenons les voix contraires à celles de la Snapo qui se liguent pour «huer» la décision gouvernementale et essayons de suivre leur raisonnement. Ils disent à peu près ceci: «Comment un petit producteur de vingt médicaments pourra-t-il distribuer aux 8000 officines que compte le pays?» On a envie de répondre que ces vingt médicaments n´étaient pas plus disponibles dans les 8000 officines avant la mesure. Mais l´essentiel est dans la solution dont on perçoit le début de mise en place dans l´énergique intervention de M.Ould Abbès pour stopper la liquidation de l´Endimed (Entreprise nationale de distribution des médicaments) qui devait intervenir avant la fin de cette année. Voilà un potentiel qui, bien repris en main, peut garantir un retour à la normale dans l´approvisionnement des officines et, pourquoi pas, même des hôpitaux. Il est même possible d´introduire dans la lancée, un partenariat public-privé sous forme de coopérative ou de prises de participation entre l´Endimed et les producteurs nationaux. L´outil est là, il faut juste, l´adapter, le perfectionner en le dotant de moyens conséquents. Quand on entend des cris, il faut juste vérifier d´où ils proviennent. Les vraies raisons viennent d´elles-mêmes ensuite.