Son poids : 12 milliards 900 millions de dinars. Sa taille : le centre du pays, particulièrement l'Algérois. Son âge : dix ans de pub à la télévision. Tel est le certificat de toise du marché publicitaire algérien. Ces chiffres ont été révélés lundi 26 janvier 2009 par Sigma Groupe. “Bilan 2008, Média et publicité en Algérie et dans le Maghreb”, c'est l'intitulé de la rencontre organisée à l'hôtel Sofitel à Alger, en présence de tous les acteurs du monde de la communication, venus nombreux en quête d'informations susceptibles de mieux décrypter l'univers de la publicité en Algérie. Cette journée fait suite à la 9e édition de l'Open Sigma, tenue l'avant-veille à Tunis. Malgré un léger fléchissement prévu de l'ordre de -0,2%, au niveau mondial, pour l'année à venir, le marché publicitaire maghrébin se maintiendra en 2009 et gardera sa croissance habituelle à deux chiffres. Il y est prévu 10 à 12% de croissance. En Algérie, les investissements publicitaires (IP) bruts prévisionnels pour l'année 2008 sont évalués à 12,9 milliards de DA, en légère progression par rapport à l'année 2007 (près de 8 milliards de dinars). La part du lion revient à la télévision avec 5 milliards de DA, talonnée de près par la presse écrite, 4,5 milliards de DA, la radio 1,3 milliard de DA et enfin 2,1 milliards de DA pour l'affichage. L'audience quotidienne TV 2008 en Algérie : chaînes arabes, 46,4%, chaînes françaises, 37,1%, chaînes locales, 27,5%, autres, 2,8%. Quant à l'écoute quotidienne des principales chaînes radiophoniques concernant les 3 plus grandes villes du pays, l'étude Sigma donne ce qui suit : Grand Alger (El-Bahdja 30,3%, Chaîne III 9,2%, Chaîne II 4%, Chaîne I 1,5%). Pour Oran, là aussi la primauté va à la radio de proximité, El-Bahia, qui affiche 13,8% d'audimat. La seconde place demeure toujours occupée par la Chaîne III avec 4,2%, la Chaîne II : 1,1% et une toute petite part d'audience pour la Chaîne I : 0,4%. Pour la région de Constantine, on retrouve aussi naturellement la radio locale Cirta, en premier, avec un excellent taux d'écoute de 41%, suivie de la Chaîne III, 13,8%, la Chaîne II, 5,2% et enfin, la Chaîne I avec 4,1% d'écoute. Selon M. Hassan Zargouni, directeur général de Sigma Groupe, le trend est toujours à la hausse et l'ouverture de l'économie fait croître le marché publicitaire sans altération de la conjoncture mondiale. Il estime en substance que le marché publicitaire algérien, encore vierge, regorge d'un potentiel important, seulement, il est retardé par trois obstacles, néanmoins surmontables, à savoir, l'exiguïté des médias, surtout la télévision. Elle doit s'ouvrir au privé ! Deuxièmement, il n'existe pas de cadre réglementaire soutenant les professionnels de la publicité dans leur exercice. En définitive, il faut incontestablement ouvrir le marché national aux investissements directs étrangers (IDE). Par ailleurs, notamment en Algérie, mis à part les supports traditionnels, comme la télévision, la radio, la presse écrite ou l'affichage, la force de vente (l'offre) reste amplement sous-exploitée. La téléphonie mobile ou encore Internet sont très peu ciblés comme vecteur de communication. D'ailleurs les chiffres parlent d'eux-mêmes : 3 500 000 internautes en Algérie, soit une pénétration de 10,4% (Tunisie 17% - Maroc 21,3%). Nombre d'abonnés ADSL en Algérie : 250 000. Le nombre de sites Internet est jugé faible, “près de 6 000 sites Web car 95% des navigations vont vers des sites étrangers”. Toujours selon M. Zergouni, le taux d'audience des chaînes télévisées les plus regardées durant l'année sont, en tête de peloton, la télévision nationale (ENTV) 17,6%, TF1 13,4%, A3 9,4%, MBC 8,7%, M6 8,1%. Pendant le mois de Ramadhan, les chaînes françaises cèdent leur place à d'autres chaînes essentiellement arabes, avec en tête, bon premier l'ENTV 45,7%. En attendant, une hypothétique, quoique inéluctable, ouverture des médias lourds, le Maroc connaîtra incessamment l'attribution de deux visas pour des télévisions privées qui augmenteront obligatoirement le volume global des achats d'espaces publicitaires TV, déjà considérablement élevés, comparés à l'Algérie et même à la Tunisie. Le marché maghrébin Le groupe Sigma avec ses trois filiales respectives au Maroc, en Algérie et en Tunisie (maison mère) a pu croître en 2008 de 12%, grâce à deux facteurs principaux : l'activité marocaine, malgré un marché très concurrentiel et le développement du marketing des services en Tunisie. La maturité de la demande marocaine et la conviction forte des multinationales installées depuis très longtemps au Maroc, l'intérêt des études marketing, publicitaires et des médias, ont permis le décollage de la filiale (longtemps restée au stade de bureau de liaison) en 2008. L'autre point à relever a été la mutation que connaissent actuellement certains secteurs des services (banques, TIC…) en Tunisie, désormais le client final est au cœur des stratégies gagnantes, ce qui a favorisé la multiplication des études consommateurs pour mieux les comprendre et mieux les servir. Des typologies comportementales, attitudinales, événementielles, de l'analyse des profils, des modes de consommation, des habitudes d'achat, voire des valeurs qu'ils incarnent, les partenaires Sigma, en maîtrisant l'information sur leurs clients ajustent mieux leurs stratégies, peaufinent efficacement leurs plans d'action de prospection et de fidélisation et optimisent ainsi leurs investissements. Par ces temps qui courent de cost killing ou de compression des coûts, la connaissance client et l'anticipation des comportements des acteurs économiques deviennent l'arme absolue “anti-récession.” (Bilan dressé par M. H. Zargouni, lors de l'Open Sigma de Tunis – 24/01/2009). “Investir en période de crise est une stratégie payante” L'actualité économique étant ce qu'elle est, aujourd'hui, on se pose la lancinante question de savoir, est-ce qu'on doit mettre encore de l'argent dans la communication ? Eh bien apparemment, oui ! Pour Guillaume Pannaud, président de TBWA Paris, (groupe complet de communication structuré en neuf pôles opérationnels). “Les annonceurs qui communiquent sur une période de crise en sortent plus vite et plus forts.” À la tête de la filiale du groupe américain Omnicom depuis deux ans, il détaille par ailleurs sa stratégie d'investissement. L'agence de communication vient de recruter Eric Holden et Rémi Noël à la direction de sa création, “l'un des meilleurs teams de leur génération”, maintes fois récompensé lors de prix français et internationaux. “Investir en période de crise est une stratégie payante”. Une marque qui cesse de communiquer en ce moment s'avère quasiment suspectée de faillite La forme des messages publicitaires n'est pas non plus exempte de projections. “Beaucoup d'annonceurs se demandent si dépenser de l'argent dans une campagne de communication ne semble pas indécent aujourd'hui”, note Raphaël de Andreis, (président de l'agence BETC Euro RSCG), alors qu'aux yeux des consommateurs, une exécution publicitaire au rabais est interprétée comme un manque de moyens de la part des annonceurs pour faire face à la crise ! Ainsi, une marque qui cesse de communiquer en ce moment “s'avère quasiment suspectée de faillite”. Il ressort d'une étude qualitative que le registre de la “compassion” doit être utilisé avec précaution. “Les consommateurs s'avèrent bienveillants envers les marques qui disent comprendre leurs difficultés quotidiennes, mais la fausse modestie ou, pire, le "je suis comme vous" sont immédiatement repérés et rejetés. Non seulement, les consommateurs n'y croient pas, mais ils jugent ce type de posture moqueuse, voire humiliante”, explique Raphaël de Andreis, président de BETC Euro RSCG. Côté promesses et engagements, les marques sont plus que jamais sous pression. “Elles s'avèrent attendues au tournant en matière de fiabilité et de transparence.” Pendant ce temps, moi je dors ! reprenait Fernand Renaud, dans une de ses célèbres scènes. Pendant ce temps, moi je communique dans mon petit coin ! semble se complaire le publiciste algérien… Vivement une corporation qui parlera d'une même voix… Une voix qui mènera vers mille et une voies. R. L.