IATF 2025: la société AQS signe un contrat de plus de 1,2 milliard de dollars avec la Banque de développement Shelter Afrique    Algérie-Chine: les moyens de renforcer la coopération dans le domaine agricole examinés    France: démission du Premier ministre François Bayrou    L'Algérie condamne vigoureusement l'agression sioniste ayant ciblé Doha    IATF: nécessité d'unifier les données pour renforcer l'intégration économique du continent    Un tournoi vendredi en mémoire d'Abderrahmane Mehdaoui au stade Chahid "Mouloud Zerrouki'' des Eucalyptus    Réorganisation des matières et horaires de la 3e année primaire à partir de cette année    Décès du chanteur Hamid Meddour à l'âge de 50 ans    Mascara: inhumation du moudjahid Ahmed Zouareb    Gymnastique : l'Algérienne Nemour engagée dans trois grandes compétitions en cette fin d'année    Boughali préside au Caire les travaux de la 39e session du Comité exécutif de l'UIPA    Accidents de la route: 42 morts et 1942 blessés en une semaine    IATF: la forte participation hors continent confirme le rôle de l'Algérie de porte d'entrée vers l'Afrique    Boughali plaide depuis le Caire pour une Union interparlementaire arabe plus solidaire et proactive    Workshop international à Alger sur les dossiers d'inscription au patrimoine mondial situé en Afrique et dans les pays arabes    Des pluies sur plusieurs wilayas du pays mardi et mercredi    Agrément à la nomination du nouvel ambassadeur d'Algérie auprès de la République du Belarus    Tour du Cap Bon VTT L'Algérien Omar Zeggaï en argent    Football national Joueurs, supporters, VAR et lois    Madar Pro-Team engagée avec cinq coureurs    Poursuite des travaux de la quatrième édition du Salon du commerce intra-africain    Le CSJ participe à l'animation du pavillon dédié à la jeunesse    Une Algérie victorieuse sur tous les plans    Vague de chaleur sur Jijel et Béjaïa Pluies et orages sur d'autres wilayas    Lâcher de 300 perdrix locales dans les forêts de la wilaya    Vaste opération conjointe contre la criminalité urbaine    Un responsable de l'ONU appelle à la mise en œuvre des mesures de la Cour internationale de Justice    Exportation d'équipements électriques algériens vers le Sénégal et la Côte d'Ivoire    Inhumation des moudjahidine Youcefi Mohamed Bencheikh et Telli Hamza    « La voix de Hind Rajab » reçoit le Lion d'argent    James Patterson offre 50 000 $ pour finir l'écriture d'un livre    Qualifs Mondial 2026: l'Algérie et la Guinée se neutralisent (0-0)    Madrid annonce une série de mesures contre l'entité sioniste    La présidente accueille une délégation de la communauté algérienne établie à l'étranger    Ouverture de la 20e édition    Le président du Front El Mostakbal appelle à renforcer la cohésion nationale et à soutenir les réformes    Programme TV - match du mercredi 29 août 2025    Programme du mercredi 27 août 2025    L'Algérie et la Somalie demandent la tenue d'une réunion d'urgence du Conseil de sécurité    30 martyrs dans une série de frappes à Shuja'iyya    Lancement imminent d'une plate-forme antifraude    Les grandes ambitions de Sonelgaz    La force et la détermination de l'armée    Tebboune présente ses condoléances    Lutte acharnée contre les narcotrafiquants    La Coquette se refait une beauté    Cheikh Aheddad ou l'insurrection jusqu'à la mort    Un historique qui avait l'Algérie au cœur    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Les inconvénients de la nouvelle loi sur la profession comptable
Finances
Publié dans Liberté le 22 - 06 - 2011

La nouvelle loi organique, relative à la profession comptable en Algérie, traduit une orientation qui va à contresens des impératifs du métier, des fondements du droit des sociétés et des règles de l'économie de marché.
En Algérie, en vertu d'une nouvelle loi organique (loi 01-10 du 29 juin 2010), une profession libérale qui n'a été inventée que pour des besoins propres à l'économie de marché et que les pères fondateurs ont construite autour du principe intangible de l'indépendance, vient d'être mise, non pas sous tutelle administrative, comme certains le pensent à tort, mais, plutôt, sous administration directe de l'autorité publique.
En effet, au Conseil de l'Ordre, composé de personnes indépendantes, s'est substitué le gouvernement, représenté par le ministère des Finances, en l'occurrence, le Conseil national de la comptabilité, que préside le ministre lui même, assisté d'un fonctionnaire agissant en qualité de SG. La même loi a, par ailleurs, consacré la dislocation du métier en trois corps séparés, alors qu'il était attendu qu'elle l'unifie, à l'instar de ce qui s'est fait dans le reste du monde, la profession étant, techniquement, une et indivisible.
La mise de la profession comptable libérale sous administration publique, est-elle humainement et moralement admissible ?
Voilà des hommes et des femmes qui ont fait le choix, dans la vie, d'êtres libres et d'exercer un métier qui offre de l'indépendance (un métier qui est connu pour être fondamentalement différent, dans sa démarche et dans ses objectifs, de celui de la Cour des comptes, de l'IGF et du fisc), que l'on a transformé, du jour au lendemain, contre leur gré, en de quasi-agents de l'Etat, au demeurant sans statut. En effet, contrairement au fonctionnaire dont le traitement est garanti par l'administration, la rémunération du professionnel va devenir encore plus aléatoire qu'elle ne l'a été avant, dans la mesure où désormais, elle va être fonction de la plus ou moins bonne disposition du professionnel à jouer le jeu (accepter les termes du cahier des charges...) Sa liberté sera mise à rude épreuve dans la mesure où, en perdant son indépendance, il lui sera très difficile de gérer ses responsabilités, pénale et civile, qui restent engagées “en considération de la personne” ; quant à celle du fonctionnaire, elle sera couverte par l'administration. Le fonctionnaire aura la possibilité de gérer sa carrière ; quant au professionnel, il n'aura pas cette possibilité. Le fonctionnaire a fait le choix d'exercer sous l'autorité et au service de l'administration alors que le professionnel a fait celui de la liberté et de l'indépendance qu'il vient de perdre.
C'est là une secousse de trop forte amplitude, il faut l'admettre, qu'est en train de subir le “pur humanisme” et, partant, l'équilibre naturel de la société en Algérie. La chose n'est, pour le moment, qu'à son début. On a vu des biens nationalisés, mais c'est la première fois dans l'histoire contemporaine que l'on entend des hommes râler en marmonnant : “Maintenant, on nationalise les humains aussi”. Pour comprendre ce qui se passe dans l'esprit du professionnel exerçant à titre libéral, il faut se rendre compte que, dans le métier, tout se traite en considération de la personne. L'expression latine “intuitu personae” restitue le sens dans toute sa plénitude, d'où l'une des justifications du principe cardinal qui fonde le métier et qui veut indépendante et jouissant de son libre arbitre, toute personne qui l'exerce. Touchez au principe et vous toucherez à l'être lui-même. Par ailleurs, nous ne devons pas non plus oublier que les hommes c'est des natures. Le statut social, la personnalité, le caractère, le sens qu'un être a choisi de donner à sa vie et le rapport qu'il a choisi d'avoir à la liberté et à l'autorité revêtent, eux aussi, une importance capitale chez les humains. De tels choix, on ne devrait même pas songer à les aliéner, parce que cela torturerait des âmes. Personne n'y peut rien, parce que c'est ainsi que l'espèce humaine a été pétrie au moment de la création. Les sages affirment que la nature reprend toujours ses droits. Il y a fort à parier, je souhaite me tromper, que l'avenir ne sera pas des plus paisibles. Si on admet que “le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes, procède de la liberté de l'être humain à disposer de lui-même”, on aboutit, naturellement, à considérer, en chœur avec tous les hommes, que la grandeur est dans une décision sage, humaine et juste qui rendra au genre humain ce qui lui appartient. Tout compte fait, s'il n' y a qu'un petit geste à faire pour que les choses aillent comme dans le meilleur des mondes, pourquoi ne pas le faire ? Le bon sens populaire ne veut-il plus que le bon gouvernement soit celui qui fait le bonheur de son peuple ?
La mise de la profession comptable
libérale sous administration publique
est-elle, professionnellement,
admissible ?
Le professionnel, tel que le veulent les normes du métier, notamment le commissaire aux comptes, a pour vocation : de surveiller et de prévenir le risque social (la faillite), dans le but d'en éloigner l'établissement contrôlé. Ses contrôles s'exercent en exécution de diligences obligatoires, très précises et codifiées, parce qu'elles sont sensées servir l'“intérêt public”. Il a pour responsabilité, en tant que dépositaire de la loi, du fait de sa qualité d'organe de contrôle légal de la société commerciale, de préserver les intérêts du large public qui y est impliqué. Par contre, il lui est interdit de se livrer à une recherche systématique de la fraude, ou de s'immiscer dans la gestion, dont il doit se limiter à juger la régularité. Ses contrôles, à la différence de ceux qu'effectuent les organes de contrôle de l'Etat, s'exercent d'une manière permanente. Qu'est-ce à dire, sinon que la profession comptable libérale se situe trop loin des démarches et des objectifs des autres organes de contrôle qui sont au service exclusif de l'Etat.
Ce fait ne pose-t-il pas un problème de cohérence globale pour l'économie ? L'analyse des fondements philosophiques des deux lois relatives à la profession comptable ( loi portant SCF et loi organique), révèle que chacune d'entre elles repose sur une idéologie diamétralement opposée à celle de l'autre.
Il existe une dichotomie évidente entre les fondements philosophiques des deux nouvelles lois relatives à la profession comptable algérienne.
Loin de tout dogmatisme, il apparaît évident que le système comptable et financier algérien (SCF), s'inspire, comme le révèle son cadre conceptuel, d'une philosophie qui rappelle les fondements de la pensée néo-classique. Un courant de la pensée économique qui constitue le laboratoire, par excellence, du libéralisme dans ce qu'il a de pur. Le principe fondateur de cette pensée est le “laisser-aller, laisser-faire” et son concept de base renvoie à une définition de la valeur, toute chose étant égale par ailleurs, qui veut que la valeur de la chose soit dans son utilité. Quels que soient les reproches que l'on peut faire à cette idéologie, notamment l'usage abusif des mathématiques (la manipulation du théorème d'Euler...), la non-immixtion de l'Etat, qu'elle ne veut que définitivement récalcitrant etc. Il reste indéniable que les normes comptables internationales qui s'en inspirent et les normes d'audit qui en découlent ont cours dans le monde entier et personne ne peut y renoncer sans tomber, de facto, en marge du système économique mondial. Ceci, pour dire que le vingtième siècle est bien derrière nous et que la controverse, au sujet du bien-fondé de l'option pour les normes IAS/IFRS, ne sert plus à rien, parce que le SCF est déjà là et il n'existe d'autre alternative que celle d'en faire une réussite.
Quant à la nouvelle loi organique relative aux professions d'expert-comptable, de commissaire aux comptes et de comptable agréé, elle nous rappelle une idéologie qui prônait une certaine forme de dirigisme et dont les tenants ont commencé par faire l'apologie de la dictature du prolétariat, qu'ils ont fini, chemin faisant, par laisser tomber (c'est du moins ce que Jaurès, Bernstein et les autres, nous ont laissé entendre), pour retourner au marché, parce que, tout simplement, seul le marché est à même de garantir un financement durable de la justice sociale. Depuis, personne ne sait plus ce qu'il est advenu de cette aventure humaine qui est partie un jour d'une vue de l'esprit, que certains appellent, à tort ou à raison, “le socialisme scientifique”.
Ma crainte est que cette très sensible profession (tellement précieuse pour l'économie de marché) ne devienne le champ d'expérimentation d'un nouveau type de guerre froide, celle des textes. Le fait est inquiétant. Je pense que si la barre n'est pas redressée, la dichotomie qui existe entre les deux textes fera que dans la pratique, la gouvernance d'entreprise sera dévoyée et l'économie offrira d'elle-même l'image d'un bateau en perdition. En effet, la deuxième loi, i.e. la loi organique, semble être construite selon une logique (01), qui fatalement, va neutraliser l'efficacité de la première (le SCF), qui, rappelons-le, vise l'établissement de comptes réguliers, sincères, et reflétant une image fidèle de la réalité économique de l'entreprise.
Dans le principe, la loi organique, dans notre métier, n'est censée exister que pour garantir une application régulière et efficace du système comptable et financier en place, en l'occurrence, le SCF. Pour ce faire, elle édicte les principes et les règles de fonctionnement du métier, qui renvoient, obligatoirement, pour des raisons d'harmonie et de synergie, à un système de normes de mêmes fondements que le système qu'elle est censée servir, à savoir, le SCF. Par conséquent, si la loi organique déroge, comme c'est notre cas présentement, à la logique que je viens de décrire, non seulement elle ne jouera pas son rôle, mais elle ira jusqu'à empêcher une mise en œuvre régulière et efficace du SCF. Une telle situation se traduira par, d'une part, un contrôle des comptes dont les règles de fonctionnement et les objectifs divergeront de ce que le SCF attend et, d'autre part, des comptes qui ne seront ni réguliers, ni sincères, ni traduisant une image fidèle de la réalité économique de la société commerciale. Il en découlera une fragilisation de la protection juridique et financière des entreprises.
Nous sommes, sans nul doute, en présence d'une loi organique qui remet en cause tous les fondements du métier et, qui, en définitive, ne fera que nuire à l'efficacité de la loi portant SCF.
Selon toute vraisemblance, la deuxième loi va agir comme un virus qui va neutraliser les effets bénéfiques attendus de la première (SCF) et la faire dégénérer, dans son application (la formation insuffisante des comptables des entreprises, sur le SCF, aidant), pour que cette dernière se transforme, à son tour, en un instrument qui participera à jeter l'économie dans le tourbillon. Le processus est déjà lancé. Il y a là, je pense, un intérêt national à faire quelque chose et à le faire très vite.
F. B.
* Expert international en ingénierie financière – Paris (inscrit en 1998)
* Commissaire aux comptes –
Alger (inscrit en 1992)


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.