A l'inverse de ce qui se bricole en Algérie, l'ère du dilettantisme est révolue dans le football tunisien. L'exemple le plus édifiant nous vient du club de l'Espérance de Tunis, premier avec cinq points d'avance à l'issue des matchs du groupe B et candidat en force pour le sacre final en ligue des champions d'Afrique. Cette formation de la capitale tunisienne, jouissant d'une notoriété bien établie et d'une popularité considérable, fonctionne véritablement comme un club professionnel, même si la loi en Tunisie préfère le terme “non-amateur”, conformément à la nouvelle réglementation pour le football, adoptée en 1996. Une loi qui a été déjà prônée sous l'ère de M. Aziz Derouaz, mais qui croupit aujourd'hui dans les dédales de l'exécrable bureaucratie algérienne. Créée en 1919, l'Espérance de Tunis possède donc des infrastructures sportives dont aucun club algérien ne dispose. Même notre sélection nationale ne détient pas ces installations, pourtant nécessaires et vitales pour toute équipe qui se veut conquérante et surtout professionnelle. Jugez-en : à quelques encablures du centre-ville de Tunis, l'Espérance possède son propre quartier général où l'on peut retrouver tous les moyens adéquats, à commencer par cet indispensable outil de travail, à savoir les terrains d'entraînement. Au parc (c'est comme ça qu'on l'appelle à Tunis) de l'Espérance, il existe, tenez-vous bien, six terrains de répliques en gazon naturel, dont deux réglementaires, et un en gazon synthétique. L'un d'eux est réservé exclusivement à l'équipe A qui peut travailler en toute quiétude au moment où aucun club algérien ne peut s'enorgueillir de pouvoir bénéficier de ce moyen élémentaire et basique de travail. La qualité du gazon est digne de la pelouse du camp des loges du paris-saint-germain (PSG) est mille fois meilleure que la pitoyable pelouse du stade du 5-Juillet même. Un dirigeant présent sur place nous fera remarquer à juste titre que cela “ne sert à rien de construire de grands stades de compétition si vous n'avez pas les terrains de répliques nécessaires. Il faut donc construire davantage de terrains” d'entraînement qui, de surcroît, coûtent beaucoup moins cher et sont rapidement réalisables, puisqu'il suffit de trouver l'assiette de terrain. Il est bon de rappeler ici que la demande faite par l'USMA pour obtenir une assiette de terrain à Bouchaoui depuis 1997 est restée lettre morte en dépit des promesses des autorités de la capitale. Les six terrains sont partagés entre les équipes A, juniors, cadets, minimes et benjamins, sachant que dans les jeunes catégories, les effectifs sont doublés et que l'Espérance compte plus de 1 700 athlètes, y compris les volleyeurs, les handballeurs, les lutteurs, les judokas et les boxeurs, lesquels du reste possèdent au sein du même parc leurs propres infrastructures. Le club bénéficie aussi de salles équipées pour la préparation strictement physique (salle de musculation) et de véritables centres de soins pour une prise en charge rapide des athlètes. L'espérance de Tunis a également implanté à l'intérieur de ce parc un hôtel trois étoiles pour les regroupements des équipes et la prise en charge des éléments venus de l'étranger, à l'image de Diaké, Tézier, Bénie… Cet hôtel de 110 places est néanmoins ouvert au public pour des raisons évidentes de rentabilité (1 million d'euros en 2002), mais en direction d'une clientèle triée sur le volet, principalement des entreprises en séminaire. L'équipe A de l'Espérance dispose également d'un grand bus pour ses multiples déplacements avec toutes les commodités nécessaires. Ce bus offert par le souverain libyen, Maâmar El Kadhafi, n'a rien à envier, nous dit-on, à celui du Bayern de Munich (Allemagne). Le bus est aussi loué pour le rentabiliser pour des sociétés de tourisme alors que les autres catégories disposent également de minibus. Le coach Youssef Zouaoui nous dira au cours de cette visite des installations du club tunisien que “ce parc constitue la fierté de l'Espérance. Sans ces moyens vitaux, vous ne pouvez prétendre à la performance et à construire un grand club. Les joueurs ont besoin de travailler continuellement et dans des conditions acceptables pour progresser et atteindre le haut niveau. C'est un travail colossal qui nécessite des sacrifices, un effort d'investissement et une maîtrise du management”. Et d'ajouter : “c'est une véritable machine de production avec un encadrement qui nécessite des compétences certaines.” À ce titre, il faut signaler que l'espérance de Tunis possède un centre de formation en football et un autre en volley-ball. À l'occasion de cette virée au parc, nous avons vu comment l'Espérance prépare déjà sa relève grâce à une centaine de bambins travaillant dans des conditions auxquelles même nos seniors ne peuvent prétendre, pour l'heure, en raison de décideurs défaillants. Le DTN, Mokhtar Tritli, ex-entraîneur national, nous confie : “C'est là l'avenir du football tunisien.” Sur le plan structurel, il est à noter que l'Espérance du Tunis a adopté une gestion bicéphale avec deux directions distinctes, mais qui se complètent. La première, présidée par M. Slim Chiboub, dirigeant bien connu siégeant à la CAF et la FIFA, qui s'occupe uniquement du volet technique, à savoir le recrutement des joueurs et des staffs. La seconde incarnée par le vice-président du club, M. Mohamed Babou, dont la mission est de s'occuper de la gestion administrative et financière du club. Le budget annuel de l'Espérance de Tunis s'élève à 5 millions d'euros (50 milliards de centimes algériens) au moment où le club le plus riche de l'Algérie ne peut dépasser un budget de 8 milliards. Sachant que l'Espérance reçoit au stade d'El-Menzeh, au même titre que le Club Africain, elle a la liberté totale en ce qui concerne la gestion de la billetterie (20 000 spectateurs en moyenne) le jour de ses matches et renferme plus de 4 000 abonnés qui rapportent un bon pactole pour le club. Comment franchement dans des conditions pareilles est-il possible pour un club algérien de rivaliser avec un club tunisien ? L'Espérance de Tunis n'est pas le seul club tunisien à disposer de ces moyens colossaux. Le club africain, l'Etoile du Sahel, pour ne citer que ceux-là, disposent d'infrastructures similaires. Les tunisiens, qui étaient largement devancés par les algériens dans les années 1980, ont non seulement comblé leur retard mais aussi pris une avance de plus de vingt ans au moment où, en Algérie, l'octroi d'une assiette de terrain pour le centre des équipes nationales à Sidi Moussa a nécessité de longs mois, en dépit d'une décision ferme du chef de l'état. À méditer… S. B. LE PALMARÈS - 18 fois champion de Tunisie - 10 Coupes de Tunisie - 1 Coupe d'Afrique des clubs champions - 1 Coupe d'Afrique des Vainqueurs de coupes - 1 Coupe de la CAF - 1 Coupe arabe - 1 Super-coupe arabe
