Les budgets colossaux alloués à la wilaya sont loin d'être consommés. En ces temps d'embellie financière et d'opulence budgétaire où le développement local gagnerait à réussir un bond salutaire dans toute cette Algérie profonde où les attentes, les besoins et les espoirs des citoyens sont nombreux et légitimes dans tous les domaines, l'effort de décentralisation tant décrié ne suit toujours pas et le monopole de l'Etat ne fait qu'accentuer les embouteillages et les retards de réalisation au grand dam des populations et des élus locaux qui les représentent. C'est ainsi qu'à Tizi Ouzou, par exemple, les budgets colossaux alloués à la wilaya sont loin d'être consommés à chaque fin d'exercice alors qu'il y a tant de projets inscrits et d'infrastructures à réaliser dans tous les secteurs, et cela va de la santé et l'éducation jusqu'à l'habitat en passant par l'hydraulique, l'énergie, l'industrie, les travaux publics, l'agriculture et les transports. “Dieu merci, il y a beaucoup d'argent à investir dans l'intérêt de nos régions et de nos citoyens mais malheureusement les élus de l'APW et des APC n'ont aucun pouvoir de décision", dira Hocine Haroun, le nouveau P/APW de Tizi Ouzou qui maîtrise le sujet pour avoir siégé durant de longues années d'abord comme P/APC puis comme élu durant plusieurs mandats à l'APW. “Il est vrai que dans le nouveau code de wilaya, les élus de l'APW ont le droit de proposer des projets pour le programme sectoriel et de participer à des réunions de travail avec des responsables de l'administration. Certes, il s'agit là d'une nouvelle opportunité qui donne aux élus l'occasion d'émettre des avis et des propositions sur tel ou tel projet mais il faut savoir que le sectoriel est un grand budget de l'Etat qui est entre les mains du wali. C'est dire que ce dernier a toute latitude de gérer et de répartir ce budget comme bon lui semble, encore que ce sont les relations entre les élus et le wali, autrement dit les élus et l'administration qui peuvent contribuer à une bonne concertation et un certain consensus dans les projets et les actions à mener pour peu qu'il y ait bien évidemment une certaine symbiose entre les deux parties. Cedi dit, il faut bien admettre que le programme sectoriel a toujours été l'apanage du wali qui a les pleins pouvoirs de décision", dira encore le P/APW de Tizi Ouzou. Les vœux des élus sont rarement exaucés ! A titre d'exemple, il rappellera que “l'APW de Tizi Ouzou a toujours proposé des projets de développement local mais ses vœux n'ont pas toujours été exaucés. Faut-il rappeler, dit-il, que le regretté P/APW Rabah Aïssat avait proposé, il y a bien longtemps, la nécessité de réaliser un grand stade omnisports pour la wilaya qui a mis beaucoup de temps pour être retenu et qui connaît aujourd'hui un retard considérable dans sa phase de réalisation. L'autre exemple réside dans la nécessité de construire un nouveau CHU à Tizi Ouzou dans la mesure où l'actuel CHU Mohamed-Nédir qui est un hôpital datant des années 50 ne répond plus aux besoins de la wilaya et nous n'avons toujours pas obtenu satisfaction pour son inscription malgré tous les ministres de la Santé qui sont passés ces dernières années à Tizi Ouzou. Personnellement cela fait bien des années que je siège à l'APW de Tizi Ouzou où nous avons maintes fois demandé à relier les trémies de Tizi Ouzou pour réaliser un long tunnel souterrain pour fluidifier la circulation automobile et redonner son cachet d'antan au centre-ville où le décor a été gravement dénaturé alors que le commerce a été tout simplement ruiné mais nous n'avons reçu aucun réponse jusqu'à aujourd'hui" précisera le P/APW de Tizi Ouzou. “Par ailleurs, nous avons proposé la construction en urgence d'un lycée à Idjeur mais on nous sort tout un arsenal d'objections et de barrières administratives qui ne tiennent pas debout alors que les lycéens de la région souffrent le martyre surtout en période hivernale. C'est vrai que certaines propositions émanant des élus finissent par se concrétiser mais elles se font au gré du temps et du bon vouloir de l'administration sans tenir compte des priorités et des urgences de l'heure", enchaînera Hocine Haroun qui s'étalera encore sur un long chapelet de doléances citoyennes des plus légitimes. Pour une réelle politique de décentralisation En fait, tout est tributaire de la compatibilité – ou de l'incompatibilité, c'est selon – qui prévaut, dans la plupart des cas, entre le président d'APW et le wali pour aller de l'avant quand le courant passe bien ou au contraire buter sur bien des blocages quand il y a des divergences qui provoquent bien souvent des fossés d'incompréhension et de susceptibilités au détriment du développement local et de l'intérêt du citoyen, comme c'est le cas dans de nombreuses wilayas. Pour ce faire, le P/APW de Tizi Ouzou se dit plutôt favorable à une réelle politique de décentralisation au profit des communes dont les besoins et les attentes varient d'une région à une autre. “J'estime que le développement doit être pensé et élaboré par les élus qui connaissent mieux que quiconque le terrain et sa dure réalité. Ma vision, dira-t-il, est que le maire puisse disposer de budgets conséquents et de bénéficier d'une plus grande autonomie de gestion pour réaliser les projets urgents et fiables de sa commune quitte à les contrôler au centime près, tout en laissant les grands projets du sectoriel aux différentes directions de wilaya qui sont plus habilitées à réaliser les grands ouvrages. Personnellement, j'ai déjà assumé les fonctions de P/APC à Aït-Bouaddou où je suis parvenu à réaliser à l'époque un CEM en l'espace de huit mois", ajoutera le P/APW de Tizi Ouzou. Tout cela pour affirmer, une fois de plus, que des efforts de décentralisation ne feront qu'impliquer davantage les élus locaux dans l'effort de développement des régions et alléger par là-même le lourd fardeau des directions de wilaya qui, dans bien des cas, ne savent pas à quel saint se vouer et ont bien du mal à réaliser leurs projets et à consommer les crédits qui leur ont été alloués, comme c'est souvent le cas depuis plusieurs années déjà à Tizi Ouzou. M. H.
