Pour l'ancien responsable de Sonatrach, cette rente n'a pas été utilisée de manière efficace. La compagnie nationale d'hydrocarbures Sonatrach fête cette année son 50e anniversaire. À l'occasion une halte semble nécessaire pour faire un bilan de ce demi-siècle d'existence. Un exercice auquel s'est livré l'ancien ministre de l'Energie, Nordine Aït Laoussine, lors d'une Convention nationale sur l'énergie tenue le premier novembre dernier à Alger. D'emblée Nordine Aït Laoussine explique que "dès les premières années de notre indépendance, il nous est apparu que le compromis des Accords d'Evian n'était qu'une étape dans notre lutte de Libération nationale et que le rôle de levier puissant attendu de l'exploitation de nos richesses nécessitait la mise en œuvre d'une stratégie dont l'objectif fondamental était le développement économique et social du pays par le biais d'une sage utilisation des moyens et ressources procurés par les hydrocarbures". La finalité assignée à cette stratégie, ajoute-t-il, nécessitait la réalisation de trois objectifs indissociables, à savoir, le contrôle effectif de l'exploitation de nos ressources pour nous permettre de renforcer et de disposer librement de nos moyens d'action, la récupération de la rente pétrolière, dont l'essentiel était alors accaparé par les sociétés étrangères, et l'amélioration de cette rente à travers l'augmentation de la fiscalité, de la production et des prix à l'exportation et la lutte contre le sous-développement et la diversification de l'économie nationale par le biais des effets de diffusion et d'entraînement attendus du recyclage de la rente pétrolière. Il finira par souligner que "si nous avons gagné la bataille du contrôle de nos richesses en hydrocarbures ainsi que la bataille de la récupération et de l'augmentation de la rente pétrolière, nous avons perdu celle du recyclage effectif et de l'utilisation efficace de cette rente. L'effet de diffusion et d'entraînement attendu de l'exploitation massive de nos hydrocarbures par le biais du recyclage de la rentre pétrolière n'a donc pas joué". Causes de l'échec : des objectifs et des politiques de développement peu pertinents Concernant les raisons de cet échec qui, selon lui, sont multiples et connues, il indique que "les nombreux experts algériens qui se sont penchés sur la question sont unanimes. Les économistes soutiennent que l'échec est dû à l'absence ou à la non-pertinence des objectifs de développement et des politiques économiques suivies. Il serait dû à l'absence de planification stratégique, à un climat des affaires qui entrave et décourage le secteur privé". Pour lui, l'échec serait également dû à des contraintes de gouvernance et à une incapacité de mise en œuvre des réformes. En définitive, il est dû à l'absence persistante de synergie entre tous les acteurs et institutions de l'Etat. "Attribuer l'échec de nos politiques économiques au fameux syndrome hollandais ou à la malédiction du pétrole comme certains le font volontiers, est, à mon avis, une exagération, pour ne pas dire un raccourci provocateur", ajoute-t-il. En effet, le conférencier explique que depuis l'indépendance du pays "nous avons connu une période pendant laquelle le pétrole a pleinement joué son rôle de catalyseur de l'économie nationale. Pendant les deux premières décennies de l'Algérie indépendante, nos revenus pétroliers étaient beaucoup plus limités mais ils ont cependant permis à toutes les classes de la société algérienne d'accéder à l'éducation, à la santé publique, à la consommation moderne, à l'emploi et au progrès social. Par la suite, la rente a été presque exclusivement canalisée vers le soutien de la consommation aux dépens de l'investissement productif et de la diversification de l'économie nationale". Lors de cette rencontre, Nordine Ait Laoussine a souligné que la cadence de production des hydrocarbures enregistrés depuis les années 2000 a favorisé un affaiblissement des gisements. L'Algérie a déjà épuisé les deux tiers de ses réserves pétrolières récupérables et plus de la moitié de ses réserves de gaz naturel. "Un tel degré d'épuisement des ressources qui a conduit à une baisse de la production ces dernières années nous impose la mise en œuvre de mesures radicales, dont l'intensification de l'exploration et la maîtrise de la consommation nationale", a-t-il préconisé. L'intensification de la production dans les années 2000 a affaibli les gisements L'ancien ministre de l'Energie a préconisé de limiter la production pétrolière à une échelle qui permette le financement de l'économie. Ce niveau de production nécessaire au développement de l'économie doit être discuté et faire objet d'un consensus entre tous les acteurs et institutions du secteur. La préservation des réserves d'hydrocarbures, prônée par plusieurs pays pétroliers comme la Norvège, obéit au besoin d'assurer une disponibilité de l'énergie aux Algériens et une sécurité énergétique aux générations futures, a-t- il expliqué. Pour autant, il considère que l'Algérie n'a pas dit son dernier mot concernant la reconstitution de ses réserves d'hydrocarbures conventionnels, dont le potentiel est important pour peu qu'elle accentue l'effort de l'exploration. Il considère que les réserves récupérables de pétrole doivent "essentiellement" servir à satisfaire la demande énergétique algérienne premièrement. Nordine Aït Laoussine reste, cependant, optimiste puisque comme il l'explique "nous avons les moyens de nous en sortir car notre pays est non seulement riche par ses ressources naturelles mais aussi par ses acquis, par le dynamisme de sa jeune population et sa capacité à prendre la relève des aînés". S. S. Nom Adresse email