Si les autorités locales aspirent à la relance des activités, notamment la réouverture des administrations publiques, à partir de demain, les militants antigaz de schiste, eux, misent, au contraire, sur une forte mobilisation et appellent à "une grande marche" prévue aujourd'hui. Visiblement affecté par la "fracturation" provoquée dans ses rangs, après un mois de résistance sans répit, le mouvement antigaz de schiste d'In-Salah accuse le coup, certes, mais n'abdique pas. Et contrairement au vœu cher des autorités ayant actionné tous leurs relais en vue de casser ce mouvement, la détermination des militants est loin d'être entamée. Après les discours et autres promesses peu convaincants, les hautes autorités du pays jouent désormais leurs dernières cartes : elles invitent la société civile d'In-Salah à désigner une délégation de "30 personnes" pour se rendre à Alger et y rencontrer "une personnalité". L'invitation a été adressée jeudi dernier, aux membres du collectif citoyen, dit "groupe des 22", même si ce dernier est de plus en plus contesté par de nombreux citoyens. "Nous avons reçu une invitation officielle de la part des hautes autorités du pays qui nous demandent de désigner une délégation de 30 personnes, qui sera reçue à Alger par une grande personnalité, sans nous préciser son identité", nous confirme Abdelkader Bouhafs, l'un des rares leaders visibles de ce collectif. L'objectif de cette rencontre, qui nous rappelle bizarrement les négociations, en 2001, avec les comités des aârouch de Kabylie, est évidemment de tenter de convaincre les militants antigaz de schiste de renoncer à leur protestation. Elle est, indique M. Bouhafs, l'initiative des élus de la région, à leur tête le député du RND, Mohamed Baba Ali, qui s'est distingué jusque-là par son soutien aux militants antigaz de schiste. Certainement par peur d'être définitivement discrédités par les manifestants qu'ils représentent, les membres de ce collectif ont jugé utile de soumettre cette proposition à la volonté des pensionnaires de la place de la Résistance qui refusent toujours de lever le camp, et ce, malgré les intimidations des services de sécurité visiblement instruits. À présent, seuls les membres de ce collectif et certains de leurs amis semblent intéressés pour faire le voyage à Alger, tandis que la grande majorité des manifestants juge que seule une décision claire des pouvoirs publics d'arrêter les forages peut convaincre. Pris entre la pression des autorités et les exigences des militants, les membres de ce collectif informel se sont bizarrement "éclipsés" de la scène ces dernières 24h. Ils sont injoignables même au téléphone. Leur absence a toutefois laissé place à l'émergence de nouveaux meneurs. Le plus en vue est Mohamed Bouicha, membre fondateur de l'organisation non agréée, le Comité national pour la défense des droits des chômeurs, (CNDDC). Montant pour la première fois sur scène, ce dernier a réussi à "réanimer" la foule campant sur la place de la Résistance par son discours tranchant. "S'ils pensent réellement aux générations futures, ils feront mieux de laisser ce gaz de schiste au sous-sol. Ne vous fiez pas aux promesses et n'ayez surtout pas peur des intimidations et autres pressions que le pouvoir tente d'exercer sur nous. Nous devons rester solidaires et continuer notre combat jusqu'à satisfaction de notre revendication, à savoir la fermeture des puits", a-t-il clamé, sous les applaudissements de nombreux présents sur la place de la Résistance. Si les autorités locales, appuyées par les services de sécurité dont la présence se fait de plus en plus sentir dans la ville, aspirent à la relance des activités, notamment la réouverture des administrations publiques, à partir de demain, les militants antigaz de schiste, eux, misent, au contraire, sur une forte mobilisation en prévision de la grande marche prévue pour aujourd'hui. Les soutiens à cette action bouclant un mois pile de résistance, ont commencé à se manifester, depuis hier déjà, avec l'arrivée d'un convoi de militants de la wilaya d'Adrar, menés par un autre membre fondateur de la CNDDC, en l'occurrence Mohamed Gasmi. La délégation comprend entre autres, les représentants de l'association locale (Adrar), Chabab El-Khir, du collectif des étudiants ainsi que ceux de la coordination du Touat. Les frais de déplacement, nous précise-t-on, sont assumés par des commerçants locaux. "Nous sommes ici pour soutenir les habitants d'In-Salah, quelle que soit leur décision (...). S'ils ont montré la voie, ils ont besoin du soutien des militants de toutes les wilayas, et j'ai la conviction que le front national antigaz de schiste finira par vaincre", a souligné le militant d'Adrar. F. A.
