Les réactions aux quatre coins de la planète sont marquées par la colère et l'effarement avec une volonté de résistance exprimée par la plupart des acteurs politiques et économiques. "J'ai été élu pour représenter les habitants de Pittsburgh, pas de Paris", a déclaré Donald Trump, qui a invoqué la défense des emplois américains pour dénoncer dans son plaidoyer un accord "très injuste" pour l'Amérique. On est loin de la position de Barak Obama, l'un des grands artisans de l'accord conclu en décembre 2015 à Paris dans le but de contenir la hausse de la température moyenne de la planète à moins de 2°C, à l'horizon 2100, par rapport à l'ère préindustrielle. En effet pour le prédécesseur du président Trump, l'enjeu pour l'Amérique est de prendre le leadership de la lutte contre le réchauffement climatique qui implique un leadership des entreprises américaines dans les technologies de la promotion de l'économie verte. Le lobby climato-sceptique qui a aidé à propulser Trump à la présidence a donc pris le dessus ; exit donc la responsabilité historique US dans l'accumulation des gaz à effet de serre (GES) dans l'atmosphère, le nouveau locataire de la Maison-Blanche a usé d'un ton parfois provocateur dans son allocution. Les réactions aux quatre coins de la planète sont marquées par la colère et l'effarement avec une volonté de résistance exprimée par la plupart des acteurs politiques et économiques. C'est le cas aux Etats-Unis où de New York à la Californie, plusieurs dizaines de villes et d'Etats ont organisé la résistance pour promettre qu'au niveau local, l'Amérique continuerait la promotion d'une économie verte. C'est ensuite les acteurs importants de l'Accord qui sont montés au créneau, Obama en tête qui, tout en regrettant l'arbitrage de son successeur, ajoute : "J'estime que les Etats-Unis devraient se trouver à l'avant-garde. Mais même en l'absence de leadership américain, même si cette administration se joint à une petite poignée de pays qui rejettent l'avenir, je suis certain que nos Etats, villes et entreprises seront à la hauteur et feront encore plus pour protéger notre planète pour les générations futures." Laurent Fabius, qui avait présidé les travaux qui ont abouti à cet Accord (CoP21) n'y va pas de main morte, il a dénoncé "une faute honteuse et une erreur majeure", et le recours à "un lot de mensonges" pour justifier cette décision. Ségolène Royal qui a pris son relais parle de "grave délit contre l'humanité" (!) "L'accord de Paris durera, le monde peut continuer à compter sur l'Europe", a déclaré le commissaire européen à l'Action pour le climat, Miguel Arias Canete. D'ailleurs l'Allemagne, la France et l'Italie ont publié un communiqué commun, dans lequel "elles regrettent" cette décision et annoncent que l'accord ne pouvait en aucun cas être renégocié, avant d'ajouter que "les Etats-Unis nuisent au monde." Emmanuel Macron, fraîchement élu président de la République, juge que "Donald Trump commet une faute pour l'avenir de la planète" et invite "tous les scientifiques, ingénieurs, citoyens engagés à venir travailler en France" (!). On le voit du côté de l'Europe, les condamnations sont unanimes, voire même excessives pour certaines, dans les termes utilisés. Les autres grands pays pollueurs regrettent aussi la décision américaine mais les réactions sont plus mesurées. "l'Inde est pour l'Accord de Paris et travaillera dans ce domaine, même au-delà", a déclaré le Premier ministre indien à la sortie d'une entrevue avec le président français Macron. C'est le même ton chez les Chinois. le document sanctionnant les travaux entre l'UE et la Chine (hasard du calendrier) note : "Nous sommes déterminés à avancer ensemble sur des politiques et mesures pour l'application concrète des engagements pris dans le cadre de l'accord de Paris". La Russie, qui regrette cette décision, est plus sereine : "Cet accord ne doit entrer en vigueur qu'à partir de 2021, nous avons encore le temps...", a déclaré Vladimir Poutine au lendemain de l'annonce de son homologue américain, Donald Trump. Quid de la responsabilité historique des pays industrialisés ? L'autre problème, le plus important d'entre ceux que posent ce retrait, est le devenir du Fonds vert-climat. Rappelant que ce mécanisme adopté lors de la Conférence de Copenhague en 2009 (reconduit lors de la CoP21 à Paris) est destiné à soutenir différents projets, notamment avec pour objectif de diminuer les émissions de GES, de lutter contre la déforestation et de prendre des mesures d'adaptation aux conséquences du réchauffement climatique. Les bénéficiaires de l'aide sont en priorité les pays en développement, à commencer par les plus vulnérables. L'argent qui sera mobilisé devait permettre aux pays en développement d'emprunter un chemin vertueux pour le climat, c'est-à-dire pour que ces pays construisent un modèle énergétique de développement qui "zappe" le plus possible les énergies fossiles contrairement aux pays de l'Union européenne et de l'Amérique du Nord qui portent la responsabilité de l'accumulation des GES dans l'atmosphère tout au long de leur industrialisation. Le retrait du Fonds vert pour le climat, annoncé aussi par Donald Trump, n'a pas suscité beaucoup de commentaires. Il faut rappeler tout de même qu'en termes de réduction d'émission, l'Accord de Paris n'a aucun caractère contraignant. Nous avons eu à revenir à maintes reprises sur "ce talon d'Achille" de l'agrément. Dans le fond, c'est la mesure phare de la décision américaine (retrait du Fonds vert) car les Etats de l'Union, les grandes villes et les entreprises sont déjà à l'heure de l'économie verte. Le lobby du charbon qui a gagné cette bataille ne peut espérer être performant durablement. Le répit sera de courte durée, selon tous les experts, devant la montée de l'exploitation du gaz de schiste et le dynamisme de l'économie américaine dans le domaine des énergies renouvelables. Par contre le manque à gagner pour le Fonds vert sera problématique pour impulser une politique mondiale en faveur du climat, c'est un mauvais signal alors que les autres potentiels donateurs hésitent encore à mettre la main à la poche. Remarque subsidiaire : les réactions des dirigeants, notamment européens, pour violentes qu'elles soient à l'égard du président américain n'ont pas abordé, jusque-là, cet aspect du problème. R. S.