Les événements que le pays a connus dans les années 1990 et les profondes mutations socioéconomiques intervenues à la faveur de la globalisation de l'économie mondiale ont visiblement laissé des séquelles et des traumatismes psychiques graves parmi la population. Ce constat a été dressé, hier, par les intervenants qui se sont succédé à la tribune de l'Institut national de la santé publique (INSP) qui a abrité une journée d'études dédiée à la santé mentale. Les participants à cette rencontre, organisée par le ministère de la Santé, étaient tous unanimes à relever l'accroissement effréné, ces dernières années, du nombre de personnes souffrant de pathologies inhérentes au psychique. Le professeur Mohamed Chakali, sous-directeur au ministère de la Santé, a présenté, à cet effet, une photographie circonstanciée sur la santé mentale en Algérie, qui représente, selon lui, un enjeu de santé publique. Les statistiques communiquées en marge de la journée d'étude concernant les pathologies les plus prévalantes et relevant de la psychiatrie donnent froid dans le dos. Il s'agit principalement de la schizophrénie, de la dépression et des addictions. Le professeur nous confiera que près de 5% de la population est atteinte de dépression, soit près de 2 millions sont déprimés. La frange de personnes souffrant de schizophrénie représente 1% de la population globale, soit 400 000 cas. Le nombre de jeunes souffrant d'addiction, notamment de toxicomanie, avoisine les 20 000 cas. Cette population de toxicomanes est, en majorité, née lors des sanglants événements que le pays a connus dans les années 1990, et grandit encore. Ces chiffres obtenus restent, dit-on, approximatifs du moment que ces statistiques sont, précisera-t-il, obtenus sur la base de recoupement des bilans dressés par les structures de santé mentale ouvertes à travers le territoire national. Selon l'inventaire de 2016 de l'activité des établissements de santé dédiés à la prise en charge des personnes atteintes de troubles mentaux, près de 1 million d'Algériens sont passés en consultation chez un psychiatre ou chez un psychologue. Cet accroissement de la population souffrant de pathologies liées au psychique impose ainsi la mise en place d'un plan national de promotion de la santé mentale (PNPSM) 2017-2020. Ce plan viendra, précisera-t-il, corriger les anomalies relevées dans l'ancien programme du ministère. Les promoteurs de ce plan visent, dit-on, l'optimisation de ressources humaines, matérielles et financières existantes. Ce plan prévoit ainsi un meilleur redéploiement de l'encadrement médical, soit de médecins psychiatres au nombre de 898 et 1 368 psychologues et orthophonistes, soit d'infirmiers spécialisés au nombre de 606. Le PNPSM a consacré un long chapitre à l'amélioration du rendement des structures dédiées aux soins psychiatriques en attendant la réalisation de nouveaux établissements spécialisés. Les services spécialisés offrent, à présent, près de 6 000 lits dans le Nord et les Hauts-Plateaux notamment. Les offres de soin au niveau des régions du Sud sont très réduites. Près de la moitié des wilayas du sud du pays ne possède d'aucune structure psychiatrique. H. Hattou