Les deux figures du combat identitaire, le Dr Mouloud Lounaouci et Arezki Kecili, qui ont été empêchés la semaine dernière, à coups de gaz lacrymogènes, d'animer, à l'université de Tizi Ouzou, une conférence-débat faisant le parallèle entre le mouvement d'Avril 80 et le mouvement populaire de 2019, ont été chaleureusement accueillis, avant-hier, dans la soirée, à la bibliothèque communale d'Irdjen, dans la wilaya de Tizi Ouzou, où ils ont animé, à l'invitation du P/APC, une conférence dans une salle pleine à craquer. Entrant directement dans le vif du sujet, le Dr Lounaouci a tenu à souligner que c'est le mouvement berbère d'Avril 80 qui a brisé le mur de la peur instauré sous la dictature de Boumediene et entretenu par Chadli Bendjedid, et qui, ensuite, a permis aux Algériens d'entamer le long processus de conscientisation et de libération des consciences qui, après plusieurs autres épisodes historiques de lutte, a consenti à enclencher le nouveau processus révolutionnaire auquel nous assistons aujourd'hui. "Si je parle de processus révolutionnaire, c'est parce que nous ne sommes pas encore dans une révolution qui, elle, doit être porteuse d'un projet de société et doit se fixer des objectifs à atteindre", a, toutefois, tenu à préciser le Dr Lounaouci, qui n'hésite pas à qualifier ce qui se produit actuellement de "ras-le-bol populaire". Cela dit, Mouloud Lounaouci a estimé qu'il ne faudrait pas manquer cette occasion pour poursuivre ce processus jusqu'à devenir une révolution. "Et lorsqu'on est dans un processus révolutionnaire, on a besoin de tous les segments de la société, hommes, femmes, jeunes, et âgés", a-t-il plaidé, insistant, ainsi, sur la nécessité de préserver l'union du peuple. "Le pouvoir va encore jouer la carte de la division, renforcer sa propagande dans ce sens. Il œuvre déjà sournoisement à distiller son message pour inciter le peuple à se méfier de l'élite et des partis politiques, or, le peuple a besoin de son élite comme le train a besoin de sa locomotive. Ce dont il faut se méfier, c'est de la surenchère de ceux qui ne cherchent qu'à se placer et de ce que l'on peut qualifier de peuplocratie qui se décline dans certains discours qui développent l'idée que le peuple en entier va participer en même temps à la gouvernance. La volonté du peuple doit être respectée oui, mais à travers ses représentants", a développé le Dr Lounaouci, soulignant, avec beaucoup de réalisme que "nous ne pouvons plus être dans la démocratie directe de la Grèce antique". Abordant la transition politique vers un Etat de droit, Mouloud Lounaouci s'est dit favorable à "la mise en place d'une Assemblée constituante, qui va élaborer la nouvelle Constitution qui sera l'émanation du peuple", une solution qui ne doit, toutefois, être mise en branle, a-t-il conditionné, qu'"une fois des invariables, sinon des préalables consacrant la démocratie, fixés et acceptés par tous". Avant de parvenir à cette idée de Constituante, Mouloud Lounaouci estime qu'il faut, en premier lieu, en finir avec le système actuel et, pour ce faire, a-t-il détaillé, "il faut mettre fin aux trois piliers sur lesquels il repose : il faut en finir avec le jacobinisme, enrayer l'idéologie arabo-islamiste et demander à l'armée de devenir une armée républicaine".