À défaut du passage d'un modèle de consommation énergétique fondé à plus de 80% sur les énergies fossiles vers un modèle non carboné où il y aura place pour le renouvelable, l'Algérie hésite à mettre en pratique une approche intégrée qui tienne compte des divers volets économiques, productifs et sociaux. En matière de consommation énergétique, le pays s'est fourvoyé dans les procédures, alors qu'il est devenu difficile de concilier les exigences de rentabilité économique (vérité des prix) et la logique des subventions (des prix artificiellement bas). Aux dires de beaucoup d'experts, les subventions sont de fausses solutions qui n'aboutiront à rien. Bien au contraire, l'Etat débourse beaucoup d'argent (15 milliards de dollars en subventions pour l'énergie, selon les estimations disponibles) pour soutenir les prix à la consommation et n'en tire aucun avantage économiquement perceptible. De plus, il puise de manière excessive dans les ressources gazières pour produire de l'électricité et satisfaire la consommation en gaz des ménages et de l'industrie. Cette consommation explose, s'établissant entre 40 et 45 milliards de mètres cubes (m3) par an, dont 15 milliards de m3 injectés dans la production d'électricité. Cette tendance atteindra son paroxysme à l'horizon 2028, puisqu'à cette date, la consommation va s'envoler à 67 milliards de m3, selon des chiffres élaborés par la Commission de régulation de l'électricité et du gaz (Creg). L'Algérie, dont la production actuelle de gaz naturel oscille entre 130 et 140 milliards de m3, risque, sous l'effet d'une demande interne plus forte, de voir ses capacités d'exportation, s'amenuiser dans les quelques années à venir. Evidemment, ce rythme de consommation élevée demeure insoutenable. Aussi, faut-il changer de modèle de consommation, en économisant du gaz utilisé dans la production d'électricité et en développant davantage le renouvelable. Tewfik Hasni, consultant en transition énergétique, contacté par Liberté, explique qu'"il n'existe pas un modèle standard de consommation d'énergie et que chaque pays peut développer un modèle axé sur ses spécificités, ses besoins propres, et fondé sur la sécurité énergétique". Tewfik Hasni estime par ailleurs que "les subventions aux prix de l'énergie faussent la mise en place d'une réelle politique des énergies propres, alors même que les prix de l'électricité issue du renouvelable sont en train de baisser". Pour l'expert, les coûts du solaire thermique se situeraient, "en 2022, entre 5 et 6 cents de dollar le kilowattheure (kWh)". Quant au photovoltaïque, il resterait dans une fourchette de "2 à 3 cents de dollar le kWh". Des prix désormais compétitifs par rapport à ceux de l'électricité conventionnelle, tandis que la consommation encore largement répandue du fossile et le laxisme de la réglementation pourraient créer des tensions liées à la consommation d'électricité et de gaz. Une législation a été élaborée en 2002 pour permettre la création d'un marché intérieur de l'électricité propre pleinement opérationnel. Dix-huit ans plus tard, elle n'a pas été mise en œuvre. Beaucoup d'experts demandent que des démarches soient entreprises pour réduire les subventions aux énergies afin de rendre celles renouvelables plus compétitives sur un marché plus équitable.