Sous contrôle judiciaire depuis juin 2019, l'ancien ministre des Transports Amar Tou a été entendu par la Brigade économique et financière de la police de Constantine dans l'affaire de la réalisation de l'aéroport de la capitale de l'Est. Un dossier dans lequel ont déjà été auditionnés Bedoui et Boudiaf en tant que walis. Après les auditions des deux ex-walis de Constantine Noureddine Bedoui et Abdelmalek Boudiaf par les enquêteurs de la Brigade économique et financière (BEF) relevant du Service de la Police judiciaire (SWPJ) de la sûreté de wilaya de Constantine, l'ancien ministre des Transports entre 2008 et 2013 Amar Tou vient de répondre à son tour à une convocation du même service qui semble s'intéresser de plus près au gouffre financier généré par le projet de rénovation de l'aéroport Mohamed-Boudiaf lancé au début des années 2000 et qui n'a vu le jour qu'en 2013. C'était hier au siège de la sûreté de wilaya de Constantine que l'ex-ministre, qui a hérité de pas moins de quatre portefeuilles ministériels entre 1997 et 2013, a passé la majeure partie de la journée. Un interrogatoire qui intervient après ceux de l'ex-Premier ministre Noureddine Bedoui et de l'ancien ministre de la Santé, de la Population et de la Réforme hospitalière Abdelmalek Boudiaf au mois d'octobre dernier. Les deux ex-walis de Constantine avaient alors répondu à des convocations de la BEF de cette wilaya à la suite d'une commission rogatoire délivrée par le magistrat instructeur près la Cour suprême déléguant à la Police judiciaire de la circonscription administrative en question de mener des investigations sur des dossiers remontant à leurs passages respectifs à la tête de l'exécutif de la troisième ville du pays. Plusieurs affaires impliquant leur intendance suspecte à la tête de cette wilaya sont remontées à la surface dont, notamment, l'octroi d'indus privilèges en termes de marchés publics et d'assiettes foncières, ou encore d'actes de gestion proprement dits des projets de développement dont a bénéficié Constantine. D'autant plus que leurs passages dans cette wilaya, de 2005 à 2010 pour Boudiaf et de 2010 à 2013 pour Bedoui, étaient marqués par une embellie financière qui se prêtait aux indélicatesses, voire à la voracité, de responsables et intervenants fourbes, même s'ils bénéficient encore de la présomption d'innocence, puisque l'enquête est toujours en cours. Le rappel d'Amar Tou, l'ex-ministre des Transports entre 2008 et 2013, une période durant laquelle Abdelmalek Boudiaf et Noureddine Bedoui se sont succédé à la tête de la wilaya de Constantine, est justement lié à l'un des dossiers considérés comme catastrophiques pour la trésorerie publique pour avoir englouti des enveloppes faramineuses pour un résultat en deçà des attentes. Il s'agit, en effet, du projet de rénovation de l'aérogare internationale Mohamed-Boudiaf de Constantine qui a duré plus de douze années, connaissant des réévaluations en cascade pour des îlots de travaux désuets, remis en cause et reparti à zéro à plusieurs reprises. Un feuilleton interminable qui avait mis à mal Amar Tou, lui-même, contraint d'effectuer des visites régulières au chantier pendant toute la durée de son autorité sur le secteur des transports, concédant parfois des rallonges budgétaires quitte à reprendre des œuvres jugées inadéquates et inadaptées. En somme, un véritable gouffre financier pour un projet qui s'est éternisé avant de procréer un ouvrage, somme toute, quelconque. L'on ne sait d'ailleurs pas si l'audition d'hier d'Amar Tou avait trait à son implication directe dans ce scandale ou s'il a été entendu comme témoin. Dans les deux cas, ses réponses ne sauraient absoudre les deux ex-walis de Constantine de par la délégation des pouvoirs dont ils jouissaient. Amar Tou n'est d'ailleurs pas à son premier ennui avec la justice, puisqu'au mois de juin 2019, il avait été mis sous contrôle judiciaire par le magistrat instructeur près la Cour suprême dans le cadre d'affaires de corruption et d'octroi d'indus privilèges s'agissant de marchés publics. Griefs qui pourraient être retenus de nouveau contre lui dans le cadre de l'affaire de l'aérogare de Constantine, tant il est vrai que beaucoup de soupçons pesaient déjà à l'époque sur les aptitudes des entreprises en charge du projet qui avaient bénéficié, dit-on, d'énormes largesses. Connu pour sa proximité avec le clan du président déchu, Amar Tou avait été nommé ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique entre 1997 et 1999 sous la présidence de Liamine Zeroual. Après l'arrivée de Bouteflika, il fut d'abord ministre de la Poste et des Technologies de l'information et de la communication de 2003 à 2005, puis ministre de la Santé entre 2005 et 2008, et héritera finalement du portefeuille des Transports de 2008 à 2013. Député FLN durant deux mandats, membre du bureau politique et du comité central du vieux parti, son nom est revenu, notamment, dans le "coup d'Etat" qui a conduit à l'éviction en 2004 d'Ali Benflis de la direction du FLN.