Les étudiants, accompagnés par des dizaines de citoyens, ont de nouveau marché hier à Alger, malgré la chaleur accablante en cette période de jeûne et les tentatives d'intimidation qui ont marqué le début de la manifestation à la place des Martyrs. Des contrôles systématiques d'identité, avec fouilles des sacs à la recherche d'éventuelles pancartes, ont été effectués sur les manifestants qui affluaient sur la Place des martyrs, mais aussi sur les journalistes et photographes de presse, a-t-on constaté. Mais la marche a pu s'ébranler à 11h20 en direction de la Fac centrale, en passant par l'itinéraire habituel où toutes les rues secondaires ont été bloquées par les policiers anti-émeutes, déployés en forces à travers Alger-Centre. Intervenant le jour même de la célébration, en Kabylie, du 41e anniversaire du Printemps bérbère et du 20e anniversaire du Printemps noir, la marche d'hier à Alger a été marquée par des slogans en hommage au martyrs de la cause amazighe. Sous les youyous des femmes, les étudiants ont scandé durant presque trois heures "Ulac smah ulac" (pas de pardon), "Pouvoir assassin", "Mazalagh d'Imazighen" (nous sommes toujours des amazigh), en référence aux événements meurtriers du Printemps noir de 2001, durant lesquels 127 manifestants et de simples citoyens sont tombés sous les balles des gendarmes et dont le crime demeure, à ce jour, impuni. "Nous n'avons pas oublié les 127 victimes. Qui est le responsable ?", pouvait-on lire sur l'une des pancartes, alors que certains manifestants ont défilé avec le drapeau amazigh, lors de ce 113e mardi de manifestation de soutien à la révolution populaire du 22 Février 2019. Les manifestants n'ont pas oublié non plus d'apporter leur soutien aux détenus de cette révolution, dont certains d'entre eux venaient d'être présentés devant le procureur, près le tribunal Sidi M'hamed d'Alger, alors que 22 autres détenus entamaient leur quatorzième jour de grève de la faim à la prison d'El-Harrach. "Ya al-moutaqalin, maranach habssine" (Ô détenus, nous n'arrêterons pas de manifester), criaient les manifestants, mettant en évidence les portraits des étudiants et d'autres militants arrêtés lors des marches du vendredi où encore interpellés carrément devant leurs domiciles. "Laissez nos enfants jeûner avec nous à la maison", continuaient de crier les citoyens en chœur, enchaînant chants et slogans exigeant le départ du système et réclamant une presse libre comme pouvoir de contrôle sur les responsables de l'Etat et un porte-voix du peuple : "Libérer la presse pour qu'elle devienne un pouvoir de contrôle sur les responsables et rapporter la voix et les espoirs du peuple."