RESUMé : Deux fois par semaine, Katia écrit à sa mère. Pas une seule réponse. Elle en est malade de déception. Lors du remariage de son père, elle a l'occasion de rencontrer des tantes éloignées. L'une d'elles est prise de compassion pour elle. Elle l'invite chez elle… -As-tu révisé tes cours ? demande Saléha à sa belle-fille Katia. - Non, pourquoi ? répond celle-ci. - J'ai entendu tes cousines parler de compositions, réplique Saléha. Elles ont toutes leur nez plongé dans leurs livres et cahiers. Pourquoi n'en fais-tu pas autant ? - Parce que j'ai bonne mémoire, je n'ai pas besoin de réviser. J'ai tout là, dit la fille en montrant sa tête. Pourquoi se mettre la pression la veille des examens quand le reste du temps, on le passe à jouer ? - Je suis heureuse de savoir que tu as conscience de la chose, répond Saléha. Si tes résultats sont aussi excellents qu'au dernier trimestre, on aura de quoi être fiers de toi. - Papa ne s'en rend même pas compte ! - Tu te trompes. Même s'il ne te dit rien, il garde un œil sur toi. Katia ne l'a jamais senti. En fait, depuis qu'il s'est remarié, elle trouve qu'il a beaucoup changé. C'est à peine s'il lui parle. Il n'est pas encore levé quand elle part à l'école avec son oncle et ses cousines. Le soir, il rentre à la tombée de la nuit. Il la regarde du coin de l'œil avant d'aller à la chambre. Il s'isole. Fini le temps où il passait des heures à discuter avec son frère et ses belles-sœurs. Fini le temps où tout avait de l'importance. Dans sa classe, elle a des camarades qui, tout comme elle, sont enfants de parents divorcés. Leurs pères se sont complètement désintéressés d'eux. D'autres, et leur cas est plus grave, sont maltraités physiquement. Ils sont contraints à se réfugier chez des oncles et des tantes. Mais la solution est toujours provisoire. Katia est soulagée. Même si elle souffre de l'indifférence qu'affiche son père à son égard, personne n'a levé la main sur elle. Et personne ne se sert d'elle pour accomplir les tâches ingrates. Sa belle-maman n'est pas mauvaise avec elle. Malgré son jeune âge, elle a conscience qu'elle aurait pu tomber sur pire. Lorsqu'elle raconte à ses camarades qu'elle ne fait rien à la maison, on ne la croit pas. - Tu ne laves pas la vaisselle ? Même pas ton linge sale ? - Saléha fait tout durant mon absence, leur répond-elle. Elle veut que je me consacre à mes devoirs. - Tu en as de la chance ! lui dit-on. Ou peu-être qu'elle veut avoir le beau rôle ? Ton père s'est remarié pour avoir d'autres enfants, n'est-ce pas ? - Oui, c'est même pour cette raison que ma mère est partie. Elle ne voulait pas qu'il se remarie. - As-tu de ses nouvelles ? La question réveille la douleur d'une plaie qui n'est pas près de fermer. Katia continue à lui écrire régulièrement comme s'il en dépend de sa survie. La gentillesse de son oncle l'étonne et surprend même ses camarades quand elle leur dit que c'est lui qui les envoies. - Tu n'es pas inquiète par le fait qu'elle ne te réponde pas ? - Un jour, elle le fera ! réplique-t-elle, très sûre d'elle. Lorsque sa tante Fatima s'invite chez eux et qu'avant de retourner chez elle, elle tient à l'emmener, Katia est loin de se douter pourquoi. ADILA KATIA (À suivre)