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Un grand voyageur du Moyen-Age (III)
Marco Polo (1254-1324)
Publié dans La Nouvelle République le 21 - 01 - 2009


Le retour en Europe
Le khanant de Perse était dévasté par des conflits internes, mais les voyageurs, pourvus de nouveaux sauf-conduits royaux, traversent le pays sans inconvénient. Leur équipement n'a rien de modeste. Ils ont de l'or, des joyaux, de riches toiles et des perles qu'ils doivent à leurs propres négociations marchandes ou à la générosité avec laquelle Koubilaï Khan a récompensé leurs services. Avec leurs trésors et leurs écrits, ils franchissent la frontière de l'Empire mongol et entrent en Occident. Marco Polo a plus de 40 ans. Il est parti de Venise à 17 ans. Son retour au monde qui l'a vu naître ne se fait pas sous les meilleurs auspices. A leur arrivée à Trébizonde, où leurs sauf-conduits ne sont plus valables, les voyageurs sont dépouillés d'une bonne partie de leurs richesses. Ils poursuivent leur route vers Constantinople et, de là, embarquent pour Venise où ils arrivent à la fin de 1295. Marco Polo a perdu une bonne partie des fruits de ses aventures et de son travail, mais nul ne peut lui disputer sa connaissance de l'Orient. Les Polo sont la curiosité du tout Venise, parents et amis les croyaient morts et les voici qui réapparaissent après 25 ans d'absence. Comment ne pas être ébloui par les récits de Marco Polo ? Certes, beaucoup de ce qu'il raconte paraît incroyable, mais qui pourrait se soustraire à l'univers fabuleux et magique qu'il décrit, même s'il n'est pas réel ?
Les merveilleux récits de Marco Polo
Pour les orgueilleux vénitiens, il est difficile d'admettre que Hang-Tchéou est, elle aussi, construite sur l'eau et au moins 10 fois plus étendue que la splendide Venise. Comment croire qu'en Orient existe une pierre qui brûle et une fibre flexible qui résiste au feu, un animal à une seule longue corne sur le front que Marco Polo appelle «Unicorne» et qui semble être la licorne de la légende ?
Plus incroyables encore sont les histoires de Marco sur Koubilaï Khan et la bataille qu'il a dirigée d'une plate-forme placée sur le dos de quatre éléphants et à laquelle ont participé plus d'un million de guerriers. Et que dire des nombreux palais du Khan, comme celui de Chang-Tou, entouré d'une muraille de 15 kilomètres de long, renfermant de nombreux jardins et étangs, un bois où le souverain chasse et un immense édifice de marbre, ou bien celui de Cambaluc, dont l'une des salles peut héberger 10 000 invités qui, pendant qu'ils mangent et boivent royalement, jouissent du spectacle des danseuses et des musiciens ! Que penser encore des fêtes anniversaires ou de l'An nouveau où l'on organise des défilés de 5 000 éléphants richement harnachés ? Et des tributs que le grand khan reçoit : or, perles et pierres précieuses qui arrivent sans cesse des quatre coins de l'empire en reconnaissance de son indiscutable autorité ? Mais le plus surprenant des récits de Marco Polo pour cet auditoire où prédominent banquiers et marchands, habitués à faire des affaires avec de solides pièces d'or et d'argent, est ce qu'il dit du papier monnaie, fabriqué à la monnaie impériale en utilisant une pâte de fibres végétales. On en fait de fragiles billets portant des inscriptions et auxquels on assigne des valeurs différentes. Ils circulent dans tout l'empire comme moyen de paiement et remplacent les pièces de monnaie en métal.
Prisonnier à Gênes
La vie de Marco Polo s'écoule paisiblement, jusqu'en 1298, moment où éclate la guerre entre la république de Venise et sa rivale de toujours dans le commerce de la Méditerranée, Gênes. Pour résister aux attaques de la flotte génoise, Venise réunit tous les navires et tous les hommes en état de combattre. Au cours d'une des batailles maritimes contre les Gênois, qui finiront par remporter la victoire, Marco Polo est fait prisonnier. La nouvelle se répand bien vite à Gênes de la capture du Vénitien qui a parcouru l'Orient pendant un quart de siècle et dont la réputation a franchi les limites de la ville.
L'intérêt qu'on lui porte est si vif que, de sa prison, Marco Polo doit relater à nouveau ses souvenirs devant un public composé de fonctionnaires, de marchands, de maires et d'érudits génois. Le hasard veut que, dans cette même prison, soit détenu Rusticien de Pise, dit Rusticello, auteur de romans de chevalerie, très à la mode à cette époque, qui écrit en français, langue acceptée pour les ouvrages de ce genre.
Le Livre du Million
Rusticello se charge de mettre en ordre, de donner forme et de traduire les notes de son compagnon de prison. Aussi quand, en 1299, Gênes et Venise signent la paix, Marco Polo retrouve la liberté et rentre dans sa patrie avec le manuscrit qui rassemble le récit de ses expériences en Orient, traduit en français par l'écrivain pisan. L'ouvrage est publié sous le titre le Livre de Marco Polo ou le Devisement du monde, devisement signifiant description. Mais, dès sa parution, tout le monde l'appellera, familièrement, le Livre du million.
Ce titre lui a été donné par ses lecteurs vénitiens qui s'étonnent des chiffres astronomiques cités par Marco Polo en parlant de ce qu'il a vu. Pourtant, le livre deviendra un best-seller, nombre de ses lecteurs le prenant pour un livre fantastique, sans croire au prologue où Marco Polo déclare qu'il «vit tout cela de ses yeux et, ce qu'il ne vit pas, il l'entendit d'hommes sûrs en vérité».
A une époque où l'Occident n'entretient pas de relations directes avec l'Orient et considère Constantinople comme la limite de la civilisation, le livre de Marco Polo fait connaître un point de vue inédit et documenté sur ces lointains pays du Levant, dont la majorité des habitants ne constituent pas des tribus incultes comme le supposaient les Européens. Dans le prologue, Marco Polo explique son intention : «Vous y trouverez toutes les grandissimes merveilles et les diversités de la grande Arménie, de la Perse, des Tartares, de l'Inde et de maintes autres provinces...» Le plus émouvant est peut-être de constater que le récit se déroule sur un ton impersonnel, comme si l'auteur n'avait pas été le protagoniste des exploits relatés. Le Million est un témoignage sur la diversité du monde et de ses habitants, et la confirmation que des habitudes, des croyances, des coutumes différentes ne sont pas nécessairement inférieures, ou méprisables, comparées à celles qui sont connues et acceptées. Il ne s'agit pas d'un journal de voyage où le narrateur relate les accidents naturels qu'il affronte ou ses rencontres avec des groupes hostiles. Aucune de ses pages ne mentionne de hauts faits personnels, comme si cela perdait toute importance devant l'objectif principal : la description des 1 000 merveilles découvertes. Certes, quelques-unes des considérations de Marco Polo sont exagérées, comme le portrait qu'il fait de Koubilaï Khan, invariablement juste, invincible et magnanime. Il l'a idéalisé par gratitude envers celui qui fut son protecteur. Mais l'authenticité de bien des choses qu'il mentionne, et que ses contemporains considéraient comme de simples fables issues de sa fantaisie, sera plus tard confirmée.
Cette pierre qui brûle, c'est le charbon ; les fibres délicates qui résistent au feu constituent l'amiante ; l'animal qui a une seule corne sur le front est le rhinocéros. Et saurait-on critiquer Marco Polo pour avoir presque complètement ignoré la culture chinoise évoluée que les Mongols avaient assimilée ?
Les dernières années de Marco Polo
Celui qui fut qualifié par la postérité de plus grand voyageur terrestre de l'histoire n'était ni un érudit ni un artiste, ni un philosophe. Descendant de marchands, il appartenait à une société, celle de Venise, où l'activité fondamentale était le commerce et dont les membres avaient la formation typique d'un milieu où les connaissances les plus appréciées concernaient des questions éminemment pratiques. En dépit de ces limites, Marco Polo a pu surmonter les 1 000 inconvénients qu'il rencontra dans ses longs voyages et, sans faire de parade, il a su transmettre les connaissances et les expériences acquises dans ces territoires éloignés que les Européens ne visiteraient que des siècles plus tard. Peu après sa libération et son retour à Venise, Marco Polo épousa Donata Badoer et se consacra au négoce. La mort de son père, vers 1300, puis, peu après, celle de son oncle lui firent perdre les deux seuls interlocuteurs valables auprès desquels il pouvait rappeler les souvenirs de ses aventures fabuleuses. De son mariage, naquirent trois filles, dont on peut supposer qu'elles écoutèrent sans en perdre un détail les étonnantes histoires paternelles sur la cour et les possessions du grand Khan, et sur les coutumes des nombreux peuples qu'il avait connus. Il décrivait probablement leurs demeures et leurs vêtements, leurs méthodes pour combattre les maladies, leurs rites et leurs cérémonies religieuses.
La famille Polo vivait dans une situation financière aisée. Parmi ses serviteurs, se trouvait un esclave tartare qu'on avait baptisé Piero. On disait que Marco Polo l'avait ramené d'Orient mais il est probable qu'il l'ait acheté à Venise, l'une des places européennes les plus importantes pour la traite des esclaves. Les données biographiques sur Marco Polo sont rares. Ses propres écrits parlent peu de lui, mais on sait que, dans ses dernières années, il libéra son fidèle esclave tartare.
Il mourut, en 1324, à 70 ans et fut enterré à Venise, à l'église de Saint-Laurent. Grâce à son testament, on a pu calculer que son patrimoine correspondait à une soixantaine de sacs d'or et qu'il possédait encore des pièces de soie et des brocarts qui avaient échappé au pillage à Trébizonde.
Une réputation non démentie
Sa réputation ne cessa de croître. Le doge de Venise avait pris l'habitude de faire don d'une copie du Million à ses illustres visiteurs. Un exemplaire retenu par une chaîne était exposé dans un lieu public pour que quiconque qui sache lire pût le consulter. L'ouvrage fut traduit en plusieurs langues. Tout personnage, ou institution, important en Occident en avait une copie. L'apparition de l'imprimerie au milieu de XVe siècle fit se multiplier les éditions après la première publiée, en 1477, à Nuremberg.
Les grands navigateurs de l'époque, en majorité portugais et italiens, consultaient le livre de Marco Polo, l'un des rares documents à disposition pour les explorateurs. On conserve aujourd'hui à Séville, en Espagne, un exemplaire du Million que lut Christophe Colomb et qui porte de nombreuses annotations marginales de sa main.
Cela ne doit pas nous étonner. En effet, le grand amiral génois projetait un voyage pour découvrir la route des Indes en naviguant toujours vers l'ouest, tournant le dos au monde connu. Pourquoi n'aurait-il pas consulté le récit de l'extraordinaire voyageur vénitien du XIIIe siècle, à cette époque encore la meilleure autorité sur les connaissances de ces territoires lointains et fabuleux?
(Suite et fin)


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