La reprise des négociations directes entre le gouvernement israélien et l'autorité israélienne annoncée officiellement par l'administration américaine, vendredi dernier, est une victoire à la fois pour Barack Obama et les pays arabes modérés alliés des Etats-Unis, notamment l'Arabie saoudite. Les pourparlers directs devraient commencer dans deux semaines après une invitation par la Maison Blanche adressée aux Palestiniens et aux Israéliens afin de discuter de la création d'un Etat palestinien. Barack Obama veut une manifestation de prestige à Washington pour lancer les pourparlers qui devraient durer un an. Mahmoud Abbas se rend aux négociations résigné. Il est très isolé parmi les dirigeants palestiniens qui estiment qu'il s'agit pour lui d'un «suicide politique». Mais il compte ouvertement sur une «surprise militaire qui attend le Proche-Orient» pour s'extraire de ces discussions. Il compte sur une guerre que certains jugent imminente. Des informations des renseignements militaires israéliens font état de préparatifs de guerre de la part de l'Iran et de la Syrie qui restent convaincus de l'imminence d'une attaque israélienne contre les installations nucléaires de la République islamique. Les gardiens de la Révolution iraniens s'estiment prêts à contrer «la stupidité des Etats-Unis et du régime sioniste» tandis que le Premier ministre syrien, Naji al-Otari, a réuni ses ministres et responsables sécuritaires pour leur ordonner de se préparer à la guerre. L'Iran a prévenu les Occidentaux qu'en cas d'attaque, il ciblerait tous les «intérêts des ennemis dans n'importe quelle partie du monde.» En tout cas, seules de fortes pressions économiques et le spectre d'une confrontation avec l'Iran ont pu contraindre à la fois Mahmoud Abbas et Benjamin Netanyahou au dialogue. Jusque-là, ni les pressions politiques américaines et européennes ne semblaient en mesure de forcer la main à Mahmoud Abbas et de le contraindre à engager des négociations directes avec Netanyahou. Il avait déclaré encore en juillet qu'il ne «voyait aucune raison de céder aux pressions américaines à la lumière de l'échec patent des négociations de proximité». C'était avant que les principaux bailleurs de fonds arabes de l'Autorité palestinienne ne le fassent subitement changer d'avis et que Washington promette une aide financière substantielle. L'Autorité palestinienne se débat aujourd'hui pour boucler son budget et payer ses salariés tandis que les pays arabes ont bloqué leurs aides financières. Le dirigeant palestinien Saleh Rafat se plaint que «les Arabes ne paient pas. Il est urgent pour eux de respecter leurs promesses». Il explique que les fortes pressions que l'Autorité subit tout comme le Hamas visent à contraindre les deux organisations concurrentes à se rapprocher. Le Fatah qui contrôle la Cisjordanie et le Hamas qui détient le pouvoir Ghaza. Les pays arabes modérés, Arabie saoudite et Egypte en tête, ne veulent pas laisser le champ libre à l'Iran dont l'influence ne cesse d'augmenter à Ghaza. Quant au Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou, il a déclaré le mois dernier à la suite d'une visite à Washington «être prêt à débuter des discussions directes et honnêtes avec l'Autorité palestinienne». L'administration Obama a fait du donnant-donnant avec le gouvernement israélien : un soutien sans faille pour contrer le programme nucléaire iranien en échange d'une reprise des négociations. Les pressions successives sur le président de l'Autorité palestinienne sont illustrées par la promesse de 400 millions de dollars d'aide civile de Washington qui lui assure, par ailleurs, que le Premier ministre israélien donnerait son accord pour une sorte de plan Marshall, une idée avancée par l'Arabie saoudite afin de relancer l'économie en Cisjordanie et aussi à Ghaza. Maintenant des deux côtés, les difficultés ne font que commencer. Benjamin Netanyahou va devoir parvenir à un accord avec l'aile nationaliste de sa coalition gouvernementale pour prolonger le gel des constructions dans les implantations qui prend fin le 26 septembre. Il avait, pourtant, promis le contraire. Mais la menace manifestée par les travaillistes de quitter la coalition si les constructions reprennent est un atout. De toute façon, les Israéliens ne sont pas convaincus de la volonté de négocier des Palestiniens. Le politologue Emmanuel Navon ne croit plus à une solution négociée : «Il y a une réalité démographique qu'on ne peut pas ignorer. D'un côté, le conflit est insoluble sur la base de 1967, mais de l'autre, le statu quo est intenable pour des raisons démographiques. Les Palestiniens font tout aujourd'hui pour ne pas négocier avec Israël, car ils pensent que le temps joue pour eux.»