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Extrait d'une mort incompréhensible
Publié dans Le Quotidien d'Oran le 14 - 05 - 2011

« …Quand la balle m'a atteint, je suis tombé. Et avec moi, les immeubles, un arbre au loin, deux oiseaux qui n'avaient rien fait et tout le bruit du monde. C'est ainsi que je suis mort : une balle dans la poitrine et un grand point exclamation dans la tête. Sauf que j'étais encore là. Presque rien ne change quand on se fait tuer. Du coup, je n'ai pas hésité : après avoir ouvert les yeux encore une fois, je vis le goudron de la route et, au loin, une dizaine de paires de chaussures qui piétinaient au ralenti. Je savais que je n'avais que quelques minutes : prompt comme à l'époque où je volais les fruits du voisin, je me suis mis debout et je le vis, là, à mes côtés, étendu, bien mort, éteint, obscurci : mon propre corps. J'avais encore le slogan à la bouche et de la buée sortaient des mots. Je me sentais en colère comme si un homme m'avait fait les poches ou m'avait volé les chaussures à la sortie de la mosquée. Quand on se fait tuer, on se fait trahir surtout et on vit l'au-delà, je crois, comme un grand moment d'énervement en attendant le jugement dernier. En colère donc, comme je vous le raconte, j'ai décidé de prendre mon cadavre et de continuer pour le déposer chez nous, dans mon lit et le laisser se reposer. J'ai marché bien droit vers le cordon des flics qui nous mettaient en joue et des voitures banalisées où on a déjà entassé la moitié du peuple en révolte. De toutes les manières, me disait une voix, on ne peut pas tuer un homme deux fois. J'avais besoin d'abord de le crier au visage de l'Etat, puis d'emmener mon cadavre quelque part pour lui renouer les lacets et le laisser reprendre le souffle et ensuite rentrer quand la manif sera terminée. Dans les airs, des débris de verre étaient en suspension, ainsi qu'un cri avec des gouttelettes de salive, un jeune était étrangement tordu dans son lancer de pierre, comme une statue fixée, un mur blanc était devenu rouge à cause de la lumière d'un gyrophare. J'ai donc marché, après la première balle, mon propre corps sur le dos dont je sentais tout le poids et le trimbalement des chaussures qui me heurtaient le dos car je le tenais par la taille, la tête en bas et les fesses vers le ciel, sur mon épaule. Etrangement, personne ne semblait s'occuper de moi, ni les flics, ni les snipers sur les toits, ni mes amis venus avec moi pour faire la Révolution. J'étais pourtant le seul mort abattu lors de la charge des flics et personne ne se souciait de ce que j'avais sur le dos. Au loin, certains entouraient ma flaque de sang alors que moi j'étais derrière leur dos à vouloir les tirer par la veste.
Puis-je me suis lassé ?
Cela est venu comme lorsqu'une musique s'éteint ou lorsqu'on rentre chez soi après une vaine recherche de formulaires ou lorsqu'un mariage devient ennuyeux.
J'ai décidé de rentrer. Alors.
Dans la rue, il n'y avait personne tout d'un coup. Cela m'a rappelé le jour, j'avais sept ans, où je suis revenu de l'école et que je n'ai trouvé personne chez nous en poussant la porte de la maison. Tout y était : la tasse de café à sa place, le pain dans le sac suspendu à la fenêtre et aussi l'arbre qui ne répond jamais, mais personne d'autre. C'était ma première panique, vraie. J'ai crié le nom de ma mère, j'ai fouillé les pièces puis j'ai eu atrocement peur. Des années après, j'ai vu un film qui racontait l'histoire d'un homme qui a survécu à toute l'humanité. C'était pareil. Les magasins était ouverts, les vitrines offertes ou cassées, des voitures étaient arrêtées portes ouvertes en plein milieu des croisements, mais personne d'autre. Juste le bruit de la manif derrière moi qui allait s'amenuisant. Comme si je sortais de la ville alors que j'allais vers son cœur. Je n'ai jamais aimé l'effort physique, et le cadavre sur mon dos était lourd. J'avais soif et je sentais ma propre odeur comme sur une autre veste que la mienne. Je voulais rentrer mais je ne savais plus où : le nom de la ville m'échappait d'un coup. J'étais où ? Dans le quartier de Khor Maksar, et l'autre dans le quartier de cheikh Othman à Aden ? Peut-être que je suis encore dans le quartier Financier de Manama. A bien regarder, c'était difficile de voir : cela ressemblait, à cause d'une lointaine mosquée qui suppliait son Dieu, à la rue de Midane à Damas. De toute façon, je commence à oublier tout, sauf le poids de mon corps sur mon dos. C'est peut-être ça la mort : être partout sans savoir où se trouve sa propre maison ou sa propre mère. Puis marcher sans fin pendant que tout devient poussière sans la trace de vos pas….»


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