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Dix nouvelles douloureuses
Innovation de la douleur , de Mohammed Djafar
Publié dans El Watan le 28 - 07 - 2018

L 'écrivain arabophone, Mohammed Djafar, nous affuble ici d'un beau recueil
de nouvelles, intitulé, à juste titre d'ailleurs, Innovation de la douleur,
paru en 2017 aux Editions El Ikhtilef, Alger/ Dhifaf, Liban.
Tout au long des dix nouvelles composant l'oeuvre exquise, l'auteur puise tout son talent littéraire pour décrypter les détours de la souffrance humaine, qui s'apparentent dans maintes situations, à bien s'y méprendre, beaucoup plus à de l'auto-flagellation que du souffre-douleur.
Mais par quelles circonvolutions l'homme arrive-t-il à accentuer sa propre douleur plus qu'il en faudrait ? Je me limiterais à détecter entre les lignes de chaque nouvelle comment l'homme, dans tous ses états psychiques, oedipiens et freudiens, «innove et s'inocule» sa propre mortification.
Le dénominateur commun de la vie quotidienne est la douleur à petites gorgées, puis la surdose comme aboutissement final d'hallucinations. Le style d'écriture du poète Mohammed Djafar est dénudé de toutes phrases rébarbatives, se contentant de bien choisir son vocabulaire, percutant et épatant au passage.
Ci-bas un synopsis pour chaque morceau de sa narration, avec un verbe limeur et enchanteur :
1. LE DOUTE
Tout débute quand la femme trifouille dans les vêtements de son mari, avant de fourrer le linge dans la machine à laver. Elle découvre dans la poche arrière de son jeans un bout de papier soigneusement plié, avec un numéro de téléphone portable inscrit dessus, sans nom.
Inéluctablement, elle pense à une quelconque femme. Le doute prend racine et la préoccupe, la hante même. Elle se perd en envisageant plusieurs hypothèses, l'une rajoutant sur l'autre une chape de souffrance sur ses pensées.
«En amour, qui doute accuse», tranchait Alexandre Dumas. Elle suppute : «numéro d'une amante ou celui d'une collègue de travail ?» L'incertitude l'accable, la paralyse presque. Oserait-elle affronter son mari ? L'obsession la démantibule.
Elle se sent fragilisée, suffoque même.

La solitude la consume à petit feu, brindilles de doute qui crépitent dans son foyer. Au fond de l'abysse de la psyché, elle s'enlise davantage.
Soudain, ses enfants scolarisés frappent à la porte, elle sèche ses larmes, chasse ses incertitudes et ouvre ses bras à ses mioches...
2. LE BARRAGE
Deux ans après l'assassinat du président algérien Mohamed Boudiaf, un homme débarque à l'aéroport d'Alger, mettant fin à trente ans d'exil. Personne ne s'est soucié de son retour, son nom n'étant pas fiché par la police.
Et lui, qui croyait le contraire, souffrait même de cette
hantise. Il s'imaginait pourchassé, guetté et
attendu de pied ferme pour le jeter au cachot,
quoi-qu'innocent.
La pluie bruine quand un taxi le dépose tout près d'un barrage militaire,
quelques minutes après un accrochage. Durant
trois décennies, il sassait sa cervelle pour justifier
sa fugue depuis l'ère Ben Bella, et maintenant
se voyant contraint de justifier plutôt le
pourquoi de son come-back au bercail !
3. LA «QUESTION»
C'est l'histoire d'un romancier arabophone qui veut écrire une oeuvre à même de rafler un prix littéraire arabe prestigieux, bien rémunéré de surcroît. Il voit l'éventuelle consécration comme la seule façon pour s'attirer les feux de la rampe et entrer au panthéon des grands écrivains de son ère.
Faudrait-il qu'il se débarrasse de ses inquiétudes qui plombent sa plume prometteuse ? Il partage avec son épouse un logis vétuste. Il mise sur l'encouragement de
sa femme, dubitative au départ. D'où l'idée, lui
suggère-t-elle, d'aborder la sempiternelle
«question palestinienne», qui semblerait le
meilleur appât de l'heure, si l'auteur veille à
devenir un grand écrivain, se la coulant douce.
4. L'AVEUGLE CLAIRVOYANT
Un homme et une femme, ayant étudié ensemble
à l'université, virent leur idylle s'estomper
après que chacun eut pris le chemin de
son bourg natal. L'un promit à l'autre de rester
fidèle.
Le jeune homme effectua son service national
et perdit de vue sa bien-aimée. Trois ans s'écoulèrent, silence radio. Puis, conviés à une fête, les deux se retrouvent dans un même
espace festif. L'homme la repère aux côtés d'un
autre homme. Le doute l'envahit et ses prémonitions
resurgissent. Il en souffre, lui qui était
resté loyal à son amour. A sa grande douleur,
la femme semble l'ignorer, ce qui le mortifie
encore plus. Pourquoi s'affliger autant de souffrances
gratuites ? Que c'était inapproprié de
tenir un amour aveugle et volatile, anéanti par
trois ans de séparation !
5. AMBIGUITE
La scène se passe à proximité du marché couvert,
au coeur de Mostaganem. Un terroriste tue
un policier par balle. Pris de panique, les gens
déguerpissent dans tous les sens. Le lendemain,
avant que l'aube ne pointe, une unité de forces
spéciales et une vingtaine de policiers font une
descente dans le quartier haï Ederb, attenant à
la rivière Aïn Sefra, et investissent les parages.
La maison du suspect fut assaillie, fouillée de
fond en comble, sans trouver la moindre arme
à feu. Dans cette nouvelle, Mohammed Djafar
la narre en trois fois, en changeant uniquement
le modèle de la marque de la voiture Renault,
qui chapeautait l'opération.
L'auteur renvoie-t il par «ambigüité» aux rumeurs des masses,
qui ne retiennent que des détails insignifiants, abstraction faite de la surdose de douleur de l'homme suspect ?
6. LAIT FRAIS
Un enfant sort de l'école par la mauvaise porte
et se perd dans la rue, comme englouti par
un trou noir. Peur. Panique. Pleurs. Personne
ne répond à ses appels. Esseulé, il s'égare et
s'enfonce dans le chaos. Il tournoie et se rend compte qu'il est juste derrière l'immeuble où il habite ! Pas si loin perdu, après tout ! Ça a duré
une poignée de minutes, mais la souffrance
morale perdure.
Une fois rentré, il tait sa mésaventure et masque ses anxiétés de la journée à ses parents. A la tombée de la nuit, l'insomnie le cisaille et le prive du sommeil. Et de même pour les nuits suivantes. Il chausse une frayeur démesurée, qui le cloue au lit de l'inconnu.
La peur devient son ombre, peine à s'en départir.
Il finit par cohabiter avec sa phobie indéfinie.
7. LA FEMME QUI TOMBA D'UN NUAGE
Dans cette nouvelle, surgit le sous-titre Innovation
de la douleur, que le narrateur a choisi
comme titre de sa présente oeuvre. Il est question
d'une triple douleur d'une jeune veuve:
corporelle, sentimentale et psychologique.
Son frère s'étant opposé au choix du mari de
sa soeur, il assassine son beau-frère. La veuve,
éplorée, décide de se suicider en se taillant les
veines de son poignet gauche. Mais, elle y survit
par miracle, et se retrouve hospitalisée.
La tragédie la martyrise. L'assassin n'est autre que
son propre frère. Au lieu de prendre congé de
la douleur psychologique suite à la perte macabre
de son mari, elle «s'invente» une autre
physique, en voyant sa tentative suicidaire faillir.
Les visiteuses la culpabilisent d'avoir bravé
les us et les coutumes, désuètes à vrai dire.
«Comment a-t-elle osé désobéir à son frère,
pour se marier avec celui qu'elle aime et non
avec l'ami de son frère !» La mère de la veuve
tente, inutilement, d'extirper sa fille endolorie
de sa descente aux enfers dantesques. La fille
apprend à sa mère qu'elle est enceinte...
8. RENDEZ-VOUS RATE
Une femme donne rendez-vous à son petit
ami dans une rue quelconque. Elle arrive dix
minutes en avance. La morosité l'accueille.
Elle aurait souhaité être un lampadaire ou une
poubelle plutôt que de subir la bestialité de
ces hommes sans vergogne.
L'élancement s'étire dans le
temps. Au fil de son attente
pénible, elle est sujette à une
kyrielle de harcèlements de la
part des passants et des voituriers,
qui lui ravissent, petit à
petit, l'ardeur de la rencontre
imminente avec son amant,
qui tarde à pointer le gland.
En arrivant, son ami décèle
un changement de comportement
chez sa petite amie.
L'auteur se pose, pour ainsi
dire, la question pertinente:
«Peut-on tisser des relations
intimes et naturelles dans un
environnement aussi délétère,
qui nie l'humanité de la
femme et jonche son sentier
de harcèlements de tous
genres ?»
9. L'AMI DE SA PROPRE OMBRE
Un jeune homme se réveille,
conséquemment à
une nuit houleuse avec une
prostituée. Il est écrivain/
journaliste, naturellement.
Il rejoint le siège du journal.
Son ombre ne le quitte
point. Cette ombre, estelle
juste une métaphore, ne
faisant allusion qu'à la surveillance secrète de
tous ceux qui portent une plume rebelle. Une
nuit folle, bien arrosée et sous came, à l'invitation
de son autre ami de plume. L'euphorie
au summum. Dehors, il retrouve l'ombre qui
le traquait. Dans une encoignure étroite et
ombreuse, des malfrats le détroussent. Affolé,
il esquisse une opposition, qui lui coûte des
coups de poignard. Il s'affaisse sur le pavé, se
vide de son sang. L'ombre lui couvre le visage
avec un journal, puis s'en va, laissant le journaliste
pour mort !
10. L'HOMME VIRIL QUI DEVORA SON
COEUR
Hôtel Hilton, Alger. Un écrivain quinquagénaire
bien établi et une jeune nouvelliste
débutante partagent la même chambre. Elle
s'entiche de lui dans l'espoir de gravir les
échelons de la littérature mondiale. Elle
l'approche, charnellement parlant, pour qu'il
lui préface son premier recueil de nouvelles,
Coeur hâtif …A vrai dire, depuis qu'il est primé
et traduit de par le monde, il a enfilé le costume
de Casanova. Chaque nuit, il consomme une
nouvelle femme, la croque voluptueusement.
L'auteur met la lumière, tamisée, sur des pratiques
courantes dans la sphère littéraire. Les
intérêts priment-ils les bonnes moeurs ?!


(*) Mohammed Djafar, né le 21 septembre
1976, est auteur prodige de deux romans en
arabe : Délire des cloches du Jugement dernier
et Des trompettes en pierre. En poésie, il a
publié Passage sur le dos du rêve, et aussi un
autre recueil de nouvelles, Rites d'une femme
qui ne dort jamais.

Par Belkacem Meghzouchene , romancier
Innovation de la douleur
Recueil de nouvelles
Mohammed Djafar
Edition El Ikhtilef Alger
Dhifaf Liban, 2017


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