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1492, l'histoire entre perdition et découverte
Le charme discret de la barbarie
Publié dans El Watan le 03 - 02 - 2005

Sait-on toujours ce que l'on fête ? Que célèbre-t-on le 31 décembre de chaque année ? Le passage ordinaire d'une année à l'autre, dans l'effervescence et le bruit. Beaucoup de bruit pour rien.
Tout juste peut-on espérer que l'année qui arrive soit moins pire que celle qui lui succédera. Quelle belle date en vérité. Une forme de carnaval qui déguise le cœur en fête. Une nuit. Le 31 décembre 1491 n'a été fêté par personne. En cette nuit à nulle autre pareille, tout le monde dormait d'un sommeil ordinaire. Le lendemain un ordre nouveau allait naître, et tout le monde dormait, les princes comme leurs astrologues le nez dans les étoiles, dans un monde trop vieux. Aucune terre à l'horizon. Le ciel était calme et la mer océane livrée à ses démons repoussants. L'Orient aux musulmans et l'Occident aux chrétiens, avec l'exception grenadine, l'Andalousie plantée comme une belle épine au cœur de l'Espagne. L'exception semblait aller d'elle-même comme pour toute bonne règle. Mais seule la grammaire a l'art de figer les règles et leurs exceptions. L'histoire se met en branle. Premiers frémissements, à l'ouest, du côté de Grenade. Nul besoin d'être devin pour déchiffrer le complot qui se trame dans le décor splendide de l'Alhambra. La Grenade rouge s'apprête à tomber aux pieds des rois catholiques, comme un bon fruit mûri par cinq siècles de gloire et deux siècles de résistance. En cette nuit du 31 décembre 1491, la tension est à son comble. L'entourage du dernier roi musulman d'Andalousie se doute bien que ce sont les ultimes et traîtresses tractations entre leur émir Boabdil et Ferdinand d'Aragon secondé par son épouse inflexible, Isabelle de Castille. Mais que faire ? Lamentations sur les murs de mosaïque et pleurs qui glissent dans les vasques de marbre précieux. Trahison et corruption valent bien une chanson amère ;
Un monde à mourir se décide Les paons dans la cour aux lions Courent criant au suicide La fin du Royaume nasride (...) Ainsi les rois prennent la mer Et tienne qui veut leur pari Drapeaux nouveaux neuves chimères Il n'est spectacle plus amer Que de voir mourir sa patrie.
Dans Le Fou d'Elsa, Louis Aragon pleure la chute de Grenade en janvier 1492, et ce n'est peut-être pas un hasard si le long poème commence par une faute de français : La veille où Grenade fut prise. Faute de grammaire. Histoire fautive. Il n'y aura plus d'exception à la règle imposée par les prédateurs. La veille du jour où Grenade fut prise, la patrie grenadine s'apprête à mourir pour accoucher d'un monde de Gredins où la violence s'ordonne à coups de gourdins et de goupillon. Sur les ruines du royaume nasride, l'Europe chrétienne s'apprête à naître pour longtemps.
L'heure du réveil
Dans 1492, Jacques Attali compare l'Europe à ce géant qui s'endort après avoir beaucoup guerroyé. Affaibli, asservi par de multiples maîtres, il finit par reprendre des forces et s'avise un jour de menacer une silhouette qui se profile à l'horizon et qui, à sa grande surprise, passe son chemin. Alors le géant échafauda un plan : reprendre des forces, sans se presser ; puis briser ses chaînes rouillées d'un seul coup, rigoureux et franc. Et partir à la conquête du monde. Ce qu'il pensa, il le fit. En homme de raison, en barbare vengeur. L'Europe est ce géant qui se réveille au premier matin de janvier 1492. Après un trop long sommeil, le mastodonte s'ébroue, et il s'imagine avec une identité irréductiblement chrétienne, découvre l'Amérique, le chocolat, le tabac, le maïs, la première des grammaires en langue « vulgaire » et le théâtre sur une scène fermée. En 1492, l'Europe décide de s'enfermer dans la christianisation et la pureté qui ont obsédé la reine Isabelle de Castille ; dans le même temps le vieux continent part à la conquête d'un nouveau monde découvert par Christophe Colomb grâce à cette même Isabelle. L'Europe qui se réveille en 1492, se veut humaine et nouvelle, elle se donne un avenir de rationalisme et de démocratie. L'Europe rêve de progrès. Beau rêve, mais c'est un rêve qui tue. Le progrès a été un concept enthousiasmant, mais ravageur, car il a nécessité un double corollaire : colonialisme et ethnocentrisme qui ont massacré des populations entières et des civilisations anciennes, dans un monde dit « nouveau ». Passé l'instant de la découverte, le nouveau monde finira par devenir férocement américain, perpétuant la tradition ancienne d'une Europe conquérante au nom du progrès et de la démocratie, avec les relents pestilentiels d'une opposition entre le christianisme triomphant et l'Islam décadent, diabolisé à la manière sarrasine. L'histoire ne serait-elle qu'une succession répétitive de réveils de mastodontes ? Peut-être, après tout, n'y avait-il rien à fêter en cette nuit du 31 décembre 1491. L'année qui s'annonçait, allait finir par devenir ordinaire avec le temps, au cours des cinq-cents longues années qui séparent 1492 et 1991, la date de publication de 1492 de Jacques Attali. Le livre pourrait être lu comme la célébration d'une date formidable à la veille de l'année 1992. Nous sommes d'accord avec l'auteur pour ne pas l'entendre ainsi. En ces temps de commémoration, que reste-t-il à commémorer ? Dans notre histoire moderne, quelle date ? Allez, rien qu'une seule dans la longue nuit de la barbarie ? 1492 ! Encore et toujours, ne serait-ce que pour se rappeler cette femme, la mère de Boabdil, qui lance à son fils félon, au moment de l'exil : Pleure comme une femme ce que tu n'as pas su défendre comme un homme. 1492 ! Une femme, une musulmane avait dit à sa manière que la messe était dite. Ite.


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