Le traquenard dans lequel est tombée notre équipe nationale au Caire a-t-il altéré le moral des troupes au point où notre qualification à la Coupe du monde serait prématurément compromise ? Les autorités algériennes ont pourtant été prévenues sur les expédients pour le moins malhonnêtes utilisés par les Egyptiens pour remporter leurs matchs décisifs. Car le caractère prémédité d'un acte aussi odieux n'échappe à personne. Sauf peut-être à la presse cairote qui a fait dans le feuilleton de mauvais goût (un de plus) en accusant les joueurs algériens de masochisme, coupables, semble-t-il, de se cogner la tête contre les vitres du bus pour on ne sait quelle mise en scène… Ce n'est pas la première fois qu'Oum Eddounia se rend coupable d'une telle forfaiture à l'égard de nos représentants sportifs, prétextant un contentieux qui n'existe que dans l'esprit de ceux qui veulent et réussissent presque à nuire aux relations entre les jeunesses des deux pays. En 1978, à la faveur des Jeux africains d'Alger et lors du tournoi de football, des échauffourées ont éclaté sur le terrain entre des joueurs égyptiens et libyens. Le service d'ordre présent aux alentours a dû intervenir pour séparer les belligérants. C'était suffisant pour accuser certains agents de l'ordre d'avoir pris fait et cause pour les joueurs libyens en brutalisant les footballeurs égyptiens. Le lendemain, les autorités égyptiennes retirent des Jeux la totalité de leur délégation sportive, soit 470 athlètes, plongeant la poursuite des compétitions dans l'incertitude. Depuis, les Algériens ont souvent été pris à partie au Caire, au moment où le discours officiel, chez nous, louait la drôle de fraternité. Nos citoyens ont conscience que le pouvoir algérien a toujours fait prévaloir les aspects politiques et les relations « fraternelles » au détriment de la fierté nationale. Et si ce n'était la forte émotion qu'a suscitée chez nous le caillassage du bus de l'équipe nationale et les risques majeurs à l'ordre public que cela pourrait générer en cas de défaite, parions que, comme ce fut le cas à Sfax pour le compte de la Coupe d'Afrique – un jeune Algérien tué, des centaines de blessés, des véhicules détériorés à cause de l'extrême brutalité de la police tunisienne – la conscience nationale serait bien partie pour un nouveau traumatisme si la diplomatie algérienne n'était pas montée au créneau. Tant mieux, même si une telle attitude ne s'inscrit pas dans les mœurs du pouvoir algérien. Le public égyptien, nous le savons, attend de son équipe la victoire et rien que la victoire, quitte à cautionner d'autres flibusteries sur la délégation algérienne avant et pendant le match. Nos ambassadeurs sont par contre avertis que la gloire ne s'acquiert, au Cairo Stadium, qu'avec le sacrifice d'entrer dans un match où tous les coups seront permis. Puisse la lâche attaque du bus dont ils ont fait l'objet à leur arrivée les galvaniser durablement, leur donner l'inébranlable volonté de « mettre le pied », de prendre leur revanche sur des adversaires indignes et d'être à la hauteur des attentes du peuple algérien qui, à l'occasion, a ressuscité sur les toitures et aux fenêtres l'emblème national. Ce soir, nous danserons peut-être jusqu'au matin…