Vote de budget 2026 en France    Six nouveaux ambassadeurs chez Abdelmadjid Tebboune    Elaboration d'une nouvelle politique sectorielle plus moderne et adaptée au terrain    Des mesures favorables aux personnes en situation de handicap    La peur d'une dissolution a changé de camp ?    Ghaza : La majorité des patients transférés vers les pays voisins    Les travailleurs humanitaires en danger    Opération coup de poing de la police à Mostaganem 70 suspects arrêtés    Campagne de don de sang à Mostaganem Un élan de solidarité pour sauver des vies    Démantèlement d'un réseau national de vol de voitures    L'Algérie, une histoire millénaire dans la résistance !    Cap sur le renforcement de la coopération culturelle entre l'Algérie et la Mauritanie    Alger, carrefour des cultures !    Dynamiser les comités de quartiers pour appuyer le développement local    Classement ITTF : l'Algérie signe le meilleur rang mondial de son histoire    Les Vertes écrivent une nouvelle page de leur histoire    Ligue 1 Mobilis : la LFP fixe les horaires des matchs de la 10e journée    Etude pour la réalisation du dédoublement de la route nationale    Programme TV du 24 octobre 2025 : Ligue 2, Ligue 1, Serie A, Pro League – Heures et chaînes    Programme TV du 22 octobre 2025 : UEFA, Ligue 1 Algérie, Championnats Africains - Heures et chaînes    Début catastrophique pour la billetterie de la CAN 2025    Festival international du Malouf: fusion musicale syrienne et russe à la 4e soirée    Adhésion de l'Algérie à l'AIPA en tant que membre observateur unique: le Parlement arabe félicite l'APN    Industrie pharmaceutique : nécessité de redoubler d'efforts pour intégrer l'innovation et la numérisation dans les systèmes de santé nationaux    Conseil de sécurité : début de la réunion de haut niveau sur la question palestinienne et la situation au Moyen-Orient    Examen de validation de niveau pour les diplômés des écoles coraniques et des Zaouïas mercredi et jeudi    APN : la Commission de la santé à l'écoute des préoccupations des associations et parents des "Enfants de la lune"    Réunion de haut niveau du Conseil de sécurité sur la question palestinienne et la situation au Moyen-Orient    Boudjemaa reçoit le SG de la HCCH et le président de l'UIHJ    Athlétisme / Mondial 2025 : "Je suis heureux de ma médaille d'argent et mon objectif demeure l'or aux JO 2028"    Ligne minière Est : Djellaoui souligne l'importance de la coordination entre les entreprises de réalisation    Mme Bendouda appelle les conteurs à contribuer à la transmission du patrimoine oral algérien aux générations montantes    CREA : clôture de l'initiative de distribution de fournitures scolaires aux familles nécessiteuses    Poursuite du suivi et de l'évaluation des programmes d'investissement public dans le secteur de la Jeunesse    Agression sioniste contre Ghaza : le bilan s'alourdit à 65.382 martyrs et 166.985 blessés    La ministre de la Culture préside deux réunions consacrées à l'examen de l'état du cinéma algérien    Le Général d'Armée Chanegriha reçoit le Directeur du Service fédéral pour la coopération militaire et technique de la Fédération de Russie    Foot/ Coupe arabe Fifa 2025 (préparation) : Algérie- Palestine en amical les 9 et 13 octobre à Annaba    L'Algérie et la Somalie demandent la tenue d'une réunion d'urgence du Conseil de sécurité    30 martyrs dans une série de frappes à Shuja'iyya    Lancement imminent d'une plate-forme antifraude    Les grandes ambitions de Sonelgaz    La force et la détermination de l'armée    Tebboune présente ses condoléances    Lutte acharnée contre les narcotrafiquants    La Coquette se refait une beauté    Cheikh Aheddad ou l'insurrection jusqu'à la mort    Un historique qui avait l'Algérie au cœur    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



2084 de Boualem Sansal : Voir derrière les frontières
Publié dans El Watan le 22 - 09 - 2015

Boualem Sansal est en phase de devenir l'un des auteurs les plus remarqués de la saison littéraire française. Il est en position de décrocher l'un des cinq prix majeurs de l'automne pour lequel son dernier roman 2084, paru chez Gallimard, est sélectionné. Déjà en lice dans la deuxième liste des candidats au prix Goncourt, l'auteur algérien sera aussi dans le dernier carré des écrivains qui peuvent prétendre obtenir le prix Renaudot, le prix Médicis, celui de Flore, où il est assez rare qu'un auteur soit ainsi plébiscité par autant de membres de jurys littéraires.
Dans un monde irréel et en apparence fictionnel, Boualem Sansal décrit dans son roman un univers bien réel, celui d'un monde totalitaire abouti, à la manière et dans la lignée du roman marquant dans le genre, le célèbre 1984, de George Orwell. La première lecture qu'en ont faite les critiques littéraires sur une dénonciation de l'islamisme qui aboutit à un régime dictatorial est loin de rendre compte de la richesse à la fois du fond et de la forme de ce livre majeur. Ceux qui ont vu une dénonciation du travestissement de l'islamisme, lui-même travestissement criminel de l'islam, ont cependant raison.
Après une guerre terrible contre le reste du monde, en Abistan, une religion a pris le pouvoir et invente de nouveaux rites, un nouveau Dieu et un nouveau délégué. Le monde connu est inféodé à ce système écrasant. Derrière les frontières, après quelques siècles d'asservissement, on dit qu'il n'y a rien… D'une certaine manière, en s'inspirant du livre d'Orwell, Sansal est allé au bout du message de l'écrivain anglais quant à sa vision d'un monde déshumanisé, où l'individu n'est plus qu'un rouage de la société despotique. Sansal décrit un monde du pire, plongeant dans la nature reptilienne de l'humanité prédatrice, d'un côté, et de l'autre dominée, mise au pas.
Un monde où une poignée de dominants absorbent la sève de la majorité. Ce n'est pas seulement le totalitarisme islamiste que l'écrivain dépeint là tant cela pourrait être, par exemple, le tableau figuré de l'univers économique actuel qu'on nomme capitalisme, déguisé sous la «religion» du libéralisme, ou d'autres systèmes pernicieux. L'angle littéraire de Sansal, dans une écriture splendide, est ainsi bien plus vaste que les limites où on voudrait l'enfermer.
Une vision claire de la folie du monde
Rien d'étonnant que cet ouvrage époustouflant parvienne d'Algérie. Il fallait vraiment en avoir gros sur le cœur, vouloir expurger un malaise profond comme un caillot de sang qui obstrue l'afflux d'oxygène dans les veines pour fondre dans le prodige d'offrir l'un des ouvrages les plus marquants. La puissance expressive est ici au service d'une vision claire de la folie du monde.
Avec une ouverture qui se manifeste dans cette phrase à la fin du livre : «Il faut laisser quelques secrets pour l'autre vie, si elle existe et s'il est permis de s'y exprimer.» On était d'abord dubitatifs de l'ambition de Sansal de s'inspirer de 1984, écrit en 1949 par l'écrivain anglais qui, à partir de l'univers glacial du stalinisme, léguera à la postérité des concepts devenus des noms communs pour décrire surtout le monde moderne post-capitaliste, telle l'idée du Big Brother qui voit tout et dirige tout, jusqu'aux consciences.
En fait, loin des poncifs retenus de l'œuvre d'Orwell, il fait aussi fort et par moments plus fort encore en réussissant, sans dénaturer Orwell, à tutoyer les hantises de 1984 : la guerre ; la croyance comme arme de domination ; la réécriture toujours recommencée de l'histoire avec des interlocuteurs interchangeables ; la recomposition des forces planétaires ; la Novlang qui invente des mots selon les exigences politiques.
On pourrait dire que Sansal actualise Orwell, mais en réalité, on n'actualise pas ce qui est toujours actuel et fait partie de l'humanité au plus profond, c'est-à-dire l'acceptation de l'horreur de la domination et de la manipulation des esprits. Sansal finit joliment en inventant les nouveaux mots d'ordre dans un registre de l'absurde froid et terrible qui n'a rien à envier à celui d'Orwell : «La mort, c'est la vie ; Le mensonge c'est la vérité ; La logique c'est l'absurde.» Cela fait écho au triptyque orwellien : «La guerre c'est la paix, la liberté c'est l'esclavage, l'ignorance c'est la force.» Avec pour Sansal, ce rêve majeur de la transgression de la frontière, la cassure de l'enfermement, thème de tout temps prégnant, mais éminemment actuel : briser ce bornage réel ou imagé qui doit être franchi «quoi qu'il en coûtât, tant il est formidablement possible que de l'autre côté se trouve la partie manquante de la vie».


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.