Déclarations attentatoires aux symboles et aux constantes de la nation: le dénommé Belghit Mohamed Amine placé en détention provisoire    Hadj 1446H : départ du premier groupe de pèlerins samedi prochain    "Les massacres français du 8 mai 1945 : mémoire nationale et positions internationales", thème d'un colloque international mercredi et jeudi à l'Université de Guelma    La stratégie algérienne de lutte contre le cancer repose sur "la prévention et le traitement"    Opep+: l'Algérie et sept autres pays annoncent une nouvelle augmentation de leur production pétrolière à partir de juin    L'Algérie est une et unie, son identité nationale n'est pas une matière à surenchère    ADE : signature de cinq conventions pour la modernisation des services d'eau    Le Commandement des Forces navales organise des portes ouvertes sur le Service national des Garde-Côtes    Le président de la République accorde un intérêt majeur à la presse nationale et aux métiers de l'information et de la communication    L'ONU appelle l'entité sioniste à cesser "immédiatement" ses attaques contre la Syrie    1ers Jeux scolaires Africains 2025 : réunion des chefs de mission les 19 et 20 mai à Alger (CASOL)    Batimatec: tenue de la 27e édition du 4 au 8 mai à Alger    Ciblés délibérément par l'occupant sioniste: les journalistes palestiniens tués dans une proportion jamais observée dans aucun conflit    Accidents de la route: 12 morts et 516 blessés en 48 heures    Recueillement à la mémoire des martyrs de l'attentat terroriste du 2 mai 1962 au port d'Alger    Début à Alger des travaux du 38e Congrès de l'Union interparlementaire arabe    CHAN 2024: la sélection algérienne A' à pied d'œuvre à Banjul    Ligue 2 amateur: beau duel pour l'accession entre le MB Rouissat et l'USM El Harrach    Poursuite du stage à Sidi Moussa avec l'intégration des joueurs du CSC    L'Algérie clôture sa participation avec un total de 21 médailles    Kiev doit céder les territoires conquis par la Russie    Domination de la sphère informelle et écart croissant entre le cours du dinar sur le marché parallèle et celui du cours officiel : quelles solutions ?    Le projet de loi présenté à l'APN    Les représentants de la société civile interpellent les hautes autorités du pays    Ooredoo et l'Association nationale de volontariat organisent une opération de reboisement à Bou Saâda    Lorsque l'on a la bravoure en principe, il n'y a plus d'obstacle    La responsabilité politique du ministre Bruno Retailleau    De Gustav Landauer à Hassan Nasrallah ou l'universalité de l'esprit de la société    Le championnat national de football se met à jour    Présentation à Alger des projets associatifs    Quelles est la situation de la balance commerciale et des exportations hors hydrocarbures en 2024 de l'Algérie ?    Des prix « lignes rouges » et des représailles contre les contrevenants    Patriotisme et professionnalisme    Avant-première du documentaire ''Zinet Alger : Le bonheur'' de Mohamed Latrèche    Les renégats du Hirak de la discorde    Un site historique illustrant l'ingéniosité du fondateur de l'Etat algérien moderne    La Fifa organise un séminaire à Alger    Khaled Ouennouf intègre le bureau exécutif    L'Algérie et la Somalie demandent la tenue d'une réunion d'urgence du Conseil de sécurité    30 martyrs dans une série de frappes à Shuja'iyya    Lancement imminent d'une plate-forme antifraude    Les grandes ambitions de Sonelgaz    La force et la détermination de l'armée    Tebboune présente ses condoléances    Lutte acharnée contre les narcotrafiquants    La Coquette se refait une beauté    Cheikh Aheddad ou l'insurrection jusqu'à la mort    Un historique qui avait l'Algérie au cœur    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



A la frontière de la mégalomanie et de la fascination
Publié dans El Watan le 02 - 10 - 2015

Le «je» traîne à longueur de pages pour décrire les derniers moments de la vie de celui qui s'est assis sur la Libye pendant 42 ans. Toute l'histoire se déroule, comme dans un film d'horreur, dans la nuit du 19 au 20 octobre 2011 au District 2 à Syrte, à l'est de Tripoli. Le «guide» est presque pris au piège dans une école désaffectée choisie par son fils Mouatissim entouré de ses fidèles compagnons, le général Abou Bakr Younès, ministre de la Défense, le général Mansour Dhao, le commandant de la Garde populaire, le lieutenant-colonel Trid et l'ordonnance Mostefa. Les rebelles, qui ont pris d'assaut la ville, ne sont pas loin.
L'écrivain prend soin de rappeler «l'enfance bédouine» au Fezzan de celui qui deviendra, après le coup d'Etat militaire contre le roi Idriss, «guide de la Djamahiria arabe libyenne». Mais le romancier n'insiste pas, se contente d'évoquer la kheïma, le désert, les chameaux… Et vite, il passe au Mouammar déjà adulte, mégalomane, revanchard et assoiffé de pouvoir. «Je suis Mouammar El Gueddafi, la mythologie faite homme.
S'il y a moins d'étoiles ce soir dans le ciel de Syrte et que ma lune paraît aussi mince qu'une rognure d'ongle, c'est pour que je demeure la seule constellation qui compte», écrit-il. «Ils peuvent m'envoyer tous les missiles dont ils disposent, je ne verrai que des feux d'artifice me célébrant», ajoute-t-il. A chaque chapitre, Yasmina Khadra, qui semble nager dans des eaux qu'il connaît parfaitement, rappelle «la folie des grandeurs» du dictateur, sa folie, sa tyrannie, sa suffisance, son mépris du peuple, sa haine pour ses adversaires. Au fil des pages, cela devient inévitablement ennuyeux.
Tyrans
Yasmina Khadra, qui n'a jamais visité la Libye ni discuté avec El Gueddafi de son vivant, évoque le père inconnu de l'ancien maître de Tripoli, la frustration d'un premier mariage refusé… Le romancier s'est concentré jusqu'à l'épuisement sur la psychologie tourmentée d'El Gueddafi en tentant d'explorer sa fragilité et ses failles. Tous les tyrans sont-ils faibles de personnalité ?
Portent-ils tous une profonde blessure qui «alimente» leurs dérives ? Une «voix» parle à El Gueddafi, guide ses pas, lui évite les pièges… De la fiction ? Possible. El Gueddafi a une curieuse attirance pour Vincent Van Gogh, le peintre naturaliste néerlandais qui s'est coupé une oreille avant de se suicider. Le personnage d'El Gueddafi avale tout l'espace «vital» du roman au point de faire oublier les événements tragiques en cours, les autres personnages et les causes du drame. Le général Mansour disparaît dans des conditions obscures.
Et l'écrivain oublie presque le lieutenant-colonel Trid après l'attaque des rebelles, lors de l'évacuation de l'école et la tentative de fuite. Syrte est mal décrite. Se contenter d'évoquer la ville en ruines, comme on le fait dans un film de guerre, est un exercice facile. La scène de la capture d'El Gueddafi est violente, mais pas suffisamment construite.
Yasmina Khadra, qui n'a pas aimé le «lynchage» de l'ancien guide de la Révolution libyenne, a voulu se débarrasser rapidement de ce moment tragique malgré son importance historique. C'est là toute la difficulté d'écrire un roman lié à des événements récents et encore entourés de zones d'ombre. Comment El Gueddafi a-t-il été tué ? Qui a tiré sur lui et dans quelles circonstances ? Le romancier, qui visiblement n'a pas fait d'enquête pour nourrir son récit, a évacué la question de la mort comme s'il ne voulait pas donner «une fin» à son personnage central.
Guide libyen
Yasmina Khadra, qui a le génie de raconter des histoires sur des pays qu'il ne connaît pas, a écrit le roman en trois semaines, s'est appuyé sur des anecdotes racontées par un colonel libyen rencontré dans les années 1980 à Moscou et sur des récits de presse. Il a puisé dans son imagination en portant péniblement tous les habits de son personnage. «Je suis sûr de ne pas avoir été très loin de la vérité», a confié l'écrivain dans une récente interview, comme pour se justifier.
Existe-t-il une vérité absolue ? Définitive ? La littérature ne doit-elle pas sauter la barrière vérité-mensonge ? Il est évident que Yasmina Khadra est fasciné par Mouammar El Gueddafi. Il lui était facile de dresser son portrait, de sonder son âme, de parler comme lui, d'épouser ses thèses. «J'ai écrit en état de transe. J'ai cru que j'étais El Gueddafi», a encore confié le romancier déjà accusé par ses adversaires d'être mégalomane. Regardons de près : il y a beaucoup de ressemblances entre Mouammar El Gueddafi et Yasmina Khadra.
Originaire du Sahara, Yasmina Khadra — Mohamed Moulessehoul — est un ancien militaire qui a voulu tenter l'aventure du pouvoir en se présentant à l'élection présidentielle de 2014. «Je pense qu'on m'a barré la route», a-t-il affirmé dans une déclaration à un journal. Et comme El Gueddafi, Yasmina Khadra a vécu une enfance dure, a une haute idée de lui-même et porte le projet d'une certaine revanche à prendre. Il était donc presque naturel que l'auteur de Qu'attendent les singes… s'intéresse au personnage «tragique» de Mouammar El Gueddafi et pas à celui de Zine El Abidine Ben Ali ou de Saddam Hussein.
Contresens
Il y a une fausse neutralité dans l'écrit littéraire de Yasmina Khadra. A plusieurs reprises, le romancier fait parler son personnage en termes durs contre ceux qui le critiquent, qui lui reprochent sa réussite, les jaloux. On croit relire d'autres romans de Yasmina Khadra qui traîne la même amertume depuis des années. La dernière nuit du Raïs a un goût de gâteau presque raté. Le romancier, qui garde une certaine finesse dans la narration, est tombé dans la facilité de l'écrit prêt à emballer, prêt à consommer comme un sucre rapide. On n'apprend pas grand-chose ni sur la vie d'El Gueddafi ni les dernières heures qu'il a vécues. Ce n'est pas un roman-enquête, juste une fiction qui nous rappelle les frasques d'El Gueddafi, presque un roman historique.
La littérature est un champ vaste à labourer sous la pluie ou sous le soleil. Yasmina Khadra a juste creusé deux ou trois sillons pour «libérer» sa tête d'un livre qu'il voulait écrire depuis longtemps pour rendre «hommage» au guide libyen en prenant les chemins à contresens, en faisant mine de «plaire» à tout le monde. Exercice subtil mais à haut risque. Mais Yasmina Khadra sait ce qu'il fait, lui qui cite Rabelais, Tolstoï et Shakespeare. «N'est jamais seul celui qui marche vers la lumière», écrit-il sur son site internet… El Gueddafi considérait la Lune comme son astre, «si rayonnante qu'elle faisait de l'ombre aux astres alentour», écrit le romancier dans La dernière nuit du Raïs.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.